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Les concurrents de la SNCF dans votre région, c'est pour quand?

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Le regain d'utilisation du train suscite de multiples candidatures de concurrents français et internationaux de la SNCF. Qui n'entend pas se laisser faire.

Si la concurrence sur les lignes nationales et TGV de la SNCF est encore très timide (même si un nouvel acteur arrive en juillet) dans les régions, les appels d'offres se multiplient pour des lancements commerciaux prévus entre 2024 et 2040.

Le droit européen impose en effet à partir du 1er janvier 2024 une mise en concurrence du trafic ferroviaire pour toutes les régions via des appels d'offres obligatoires.

Des appels d'offres chargés puisqu'ils incluent en général la gestion et l'exploitation du service public, le transfert des salariés vers le nouvel opérateur (en cas de défaite dela SNCF) mais aussi l’entretien et la maintenance du matériel roulant, l'accueil et l'information des voyageurs, le tout dans une logique d'amélioration du service rendu.

Ces appels à la concurrence ont lieu (ou ont eu lieu) dans la plupart des régions françaises. Pour la SNCF, c'est un risque majeur et multiple de perdre son monopole historique après des décennies de domination solitaire. Mais l'entreprise nationale n'entend pas se laisser faire.

"La SNCF sera partout, a assuré son PDG Jean-Pierre Farandou. On va se battre sur chaque appel d’offres". Faisons le point.

Marseille-Toulouse-Nice: Transdev, le premier à faire tomber la SNCF

Quand? A partir de 2025

La région PACA est la première à avoir sélectionné (en 2021) un opérateur après appel d'offres qui remplacera donc pour la première fois en région la SNCF en 2025.

C'est Trandev (fruit de la fusion en 2011 de Transdev et Veolia Transport) qui a remporté la mise. Le contrat porte sur 10 ans et impose à Transdev de doubler le nombre d'allers-retours quotidiens sur la ligne.

Trandev annonce "14 liaisons aller-retour par jour et des cadencements à l’heure sur une plus large amplitude horaire, apportant ainsi plus de qualité de service, de fiabilité, de régularité et de ponctualité (97,5% des trains ponctuels), un aspect attendu par les voyageurs du quotidien", peut-on lire dans un communiqué.

Rappelons en effet que l'offre de la SNCF est très vertement critiquée depuis des années par les usagers pour ses problèmes chroniques et par la région à travers son président Renaud Muselier (Les Républicains). Ce dernier s'est empressé dès que possible (en 2019) d'organiser le premier appel d'offre en France pour le TER suite à l'application du droit européen.

Le 23 juin, la région a annoncé sa volonté d'ouvrir à la concurrence l'ensemble des lignes restantes de son réseau, en deux lots, l'un sur des lignes dans l'est de la Provence et les Alpes, et l'autre pour des lignes plutôt dans l'ouest de la Provence.

Le rapport adopté envisage des contrats de concession au plus tôt à l'automne 2025 pour un début de l'exploitation au plus tôt à l'horizon 2029 sur ces lots.

Par ailleurs, sur les lignes "Azur", incluant les liaisons moins rentables entre Les Arcs/Draguignan (Var) et Vintimille (Italie), ainsi que les lignes Nice-Tende et Cannes-Grasse (Alpes-Maritimes), la SNCF était ainsi la seule à candidater et a donc remporté le lot.

Pays de la Loire: la SNCF remporte le premier lot

Quand? A partir de fin 2024

SNCF Voyageurs, filiale de la SNCF, a décroché le contrat concernant l'attribution du premier lot du réseau TER des Pays-de-la-Loire que la région a choisi d'ouvrir à la concurrence pour augmenter son offre ferroviaire.

La région avait reçu cinq offres, dont une offre d'une filiale de la Caisse des dépôts et consignation (CDC) et une d'une filiale de la RATP.

Le contrat, dont le coût pour la région s'élève à 100 millions d'euros, prévoit d'augmenter de 26% l'offre de trains, et après ouverture à la concurrence des deux autres lots, de 33% d'ici 2030. Il prévoit également le transfert de 377 agents de la SNCF vers sa filiale et la construction d'un atelier de maintenance (coût évalué à 40 millions d'euros).

Hauts-de-France: malgré les tensions, un premier lot pour la SNCF

Quand? entre fin 2024 et 2028

C'est un euphémisme de dire que les relations entre la région et la SNCF sont tendues. La première accusant la seconde ne pas remplir sa part du contrat avec beaucoup trop de retards et de trains annulés qui empoisonnent la vie des usagers. Autant dire que l'ouverture à la concurrence est attendue comme le Messie.

Les appels d'offres portent notamment sur les lignes TER à grande vitesse, une particularité régionale.

Quatre candidats sont en lice pour le premier lot: la SNCF, le groupe français de transports Transdev, Régionéo qui réunit la RATP Dev et Getlink et la compagnie espagnole Renfe. Surprise, c'est la SNCF qui a gagné.

"Le choix n'a été pas difficile entre les deux candidats", SNCF Voyageurs et l'opérateur Transdev (filiale de la Caisse des dépôts), a indiqué à l'AFP une source proche du dossier. "Dans la notation, la SNCF est devant. Il n'y a pas photo: on prend le meilleur", a-t-elle ajouté.

Quand la SNCF veut, la SNCF peut !", s'est félicité Xavier Bertrand, soulignant que l'entreprise s'engageait "à faire mieux avec les mêmes moyens". De quoi justifier ce choix.

Ce premier lot concerne l'"étoile d'Amiens" qui représente 17% des TER dans la région (Amiens-Tergnier-Laon, Amiens-Saint-Quentin, Amiens-Albert, Amiens-Abbeville, Beauvais-Abancourt-le-Tréport, Amiens-Creil, Amiens-Montdidier-Compiègne).

Le contrat débutera fin 2024, pour neuf ans.

Les trois autres lots seront eux attribués respectivement en 2026, 2027 et 2028, pour des périodes de six à neuf ans.

Ile-de-France: le gros morceau

Quand? entre 2025 et 2040

C'est un des "très gros" morceaux de l'ouverture à la concurrence. Huit lignes exploitées par SNCF Transilien (lignes J, L, N et U, R, P, H et K) seront progressivement ouvertes à la concurrence pendant trois ans, de 2025 jusqu'à 2028.

Du côté des RER, l'ouverture se fera en douceur sur les cinq lignes franciliennes. La ligne E sera la première à être concernée en 2025. Suivront bien plus tard, les lignes C et D en 2039, puis les lignes A et B pour finir en 2040 (co-exploitées par la SNCF et la RATP).

Nouvelle-Aquitaine: la SNCF en attendant mieux

Quand? A partir de 2027

Le contrat entre la région et la SNCF arrive à échéance au 31 décembre 2023. Il couvre 4 lots: l’étoile de Bordeaux, Périgord-Limousin et Poitou-Charentes.

Les élus de la région Nouvelle-Aquitaine ont voté ce lundi une nouvelle convention d'exploitation des TER avec la SNCF couvrant la période 2024-2030, durant laquelle la collectivité ouvrira progressivement ses lignes à la concurrence.

Là encore, la région peste contre les dysfonctionnements de l'entreprise publique mettant en avant 91 à 92% de trains ponctuels alors que la fréquentation a augmenté de 15% par rapport à 2019.

Un premier lot géographique sera attribué dans l'ex-Poitou-Charentes "pour une mise en service par le nouvel attributaire en 2027" et "au moins deux autres" parmi les trois restants (Bassin bordelais, Limousin-Périgord et Sud Aquitaine) seront attribués d'ici la fin du mandat du socialiste Alain Rousset en 2028.

Grand-Est: une première pour le 'transfrontalier'

Quand? A partir de 2024 et jusqu'en 2028

En 2024 sept liaisons représentant un total de 525 kilomètres au départ de Metz (Moselle), Strasbourg (Bas-Rhin) et Mulhouse (Haut-Rhin) vers les villes allemandes frontalières de Trèves, Sarrebruck, Neustadt, Karlsruhe, Offenbourg et Müllheim, seront concernées par la concurrence après un appel à la concurrence lancé fin 2021.

D’une durée de quinze ans, le marché est divisé en deux lots, un au départ de Metz et un de l’Alsace. Il constitue une "première en France pour le transfrontalier", a souligné Jean Rottner, président (LR) du conseil régional.

L’ouverture multipliera l’offre par deux à quatre selon les tronçons, en réponse à une "forte demande", et elle "la créera même" sur les lignes Metz-Trèves et Strasbourg-Karlsruhe, "qui passeront de zéro train en semaine à respectivement 8 et 17 allers-retours par jour".

Pour la Champagne-Ardenne, le conseil régional du Grand-Est a annoncé son intention de lancer un appel d'offre en avril 2024 pour l'exploitation de son réseau de transport régional à partir de fin 2028.

Normandie: une ouverture qui inquiète

Quand? A partir de 2030

Cinq lots vont être ouverts à la concurrence et le premier sera "L’étoile de Caen". Il représente 14,4% de l'offre théorique de transport en Normandie et permet de relier Caen à Bayeux, Saint-Lô ou Lisieux.

L'ouverture de l'ensemble des lignes de la région Normandie devrait être mise en place à l'horizon 2030.

L'arrivée d'acteurs différents sur autant de lots inquiète. Pour le syndicaliste CFDT, "on tire une balle en plein cœur du réseau. L’étoile de Caen, c’est un des meilleurs TER de France, dans le top 3 en matière de ponctualité et de qualité du service client".

"Quand on découpe le marché en lots, il n’y a plus de synergie possible, explique Mathieu Vilela, de la CGT. Chaque opérateur aura son pool de conducteurs, il n’y aura plus d’entraide pour faire fonctionner le réseau".

Occitanie: la région ne veut pas d'ouverture à la concurrence

La région est la seule à ne pas ouvrir à la concurrence son réseau pour ces 10 prochaines années. "La Région Occitanie fait le choix assumé du service public en poursuivant son partenariat avec le groupe SNCF, considérant qu’il est le mieux armé pour répondre aux enjeux du transport ferroviaire" peut-on lire dans un dossier de presse.

Rappelons que jusqu'au 31 décembre 2023, les régions peuvent lancer des appels d'offres ou attribuer les lignes à la SNCF, option qu'a choisi la région.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business