L'A380 s'expose au salon de Dubaï et affiche sa résilience

Sa présence au salon aéronautique de Dubaï relève du symbole voire de la renaissance. La compagnie aérienne Emirates expose en effet en bonne place le dernier Airbus A380 qu'elle a reçu, un des derniers produits par l'avionneur européen.
Car si le gros porteur a été abandonné par beaucoup de compagnies, il fait son retour et/ou de la résistance chez d'autres. Donné pour mort à la mi 2020, le paquebot des airs n'a peut-être pas dit son dernier mot.
Petit rappel des faits. L'an passé, plusieurs grandes compagnies aériennes comme Air France, Lufthansa ou Thai Airways ont annoncé leur intention d'abandonner l'exploitation de leurs gros porteurs comme le mythique Airbus A380.
Sur la sellette
Déjà sur la sellette pour leurs coûts d'exploitation, le sort de ces énormes quadrimoteurs a été scellé par la crise sanitaire qui a paralysé le transport aérien. Leur capacité hors normes est devenue un handicap.
L'A380 et sa capacité à accueillir jusqu'à 800 passagers pose des problèmes de rentabilité et Airbus a annoncé la fin de sa production en septembre 2020.
Mais avec le redressement du trafic aérien long-courrier, puissant dans certaines régions, quelques compagnies ont donc décidé de continuer à utiliser voire de remettre en service ce magnifique appareil.
C'est donc le cas d'Emirates, plus gros utilisateur de l'A380 (118 appareils) qui continue à en faire une tête de pont, un argument de différenciation.

On "continuera d'être le plus grand opérateur de cet avion spacieux et moderne pour les deux prochaines décennies", proclame ainsi son président Tim Clark. La compagnie a déjà remis en service plus de 50 A380.
"Il fait des merveilles"
"Il a fait des merveilles pour nous en termes de perception de la marque, d'appréciation des consommateurs et générait la plus grosse partie de nos profits" alors que la compagnie opère également plus de 150 Boeing 777, confiait-il cet été au journal saoudien Arab News.
"On a mis en place les moyens pour l'opérer", expliquait en septembre dernier à BFM Business, Cédric Renard, directeur général France. Le dirigeant rappelle ainsi que la compagnie a beaucoup investi dans les aménagements des A380 afin de rendre l'expérience de voyage unique. "Voler dans un A380 d'Emirates, ce n'est pas juste voler dans un A380", résume-t-il.

Surtout, le modèle de la compagnie permet de maintenir ses superjumbos en vol.
"On a les compétences, le centre de maintenance, le trafic dense nécessaire dans nos liaisons de point à point ou en hub, la croissance du trafic vers et depuis Dubaï en longues distances", explique-t-il.
Et de poursuivre: "il n'y a pas de remise en cause, au contraire. Cet avion est superbe, il est plébiscité par les voyageurs, on croit en cet avion qui permet par ailleurs de nous différencier".
Eithad, Qatar Airways, Singapore Airlines... le font revoler
Toujours au Moyen-Orient, si la compagnie d'Abou Dhabi, Etihad (10 avions), s'interroge encore, Qatar Airways a remis en exploitation "un petit nombre" de ses dix A380 pour compenser l'indisponibilité de ses A350. Son PDG Akbar al Baker avait pourtant parlé de "plus grande erreur" en évoquant leur acquisition.
L'australienne Qantas compte recommencer à exploiter une partie de ses 10 appareils à partir d'avril 2022 tandis que Singapore Airlines et Korean Air ont commencé à en remettre en service.
En Europe, le sort de l'A380 semble au contraire défintivement scellé. Air France, qui exploitait neuf appareils et avait prévu de s'en séparer fin 2022, a effectué son dernier vol commercial le 23 mars 2020. Sa directrice générale Anne Rigail dit aujourd'hui n'avoir "aucun regret".
"C'est pour le réseau Air France un avion qui est compliqué à remplir vu sa capacité, le Covid n'a fait qu'accélérer cette décision", a-t-elle expliqué lors d'une récente conférence de presse.
Chez Lufthansa (14 exemplaires) non plus, "l'A380 ne reviendra pas", selon son patron Carsten Spohr.
En Europe, Air France et Lufthansa n'en veulent plus
British Airways (12 A380) fait néanmoins figure d'exception en décidant début octobre d'en réintégrer dans sa flotte "plus tôt que prévu" pour des vols vers Miami, Los Angeles et Dubaï.
Néanmoins, excepté Emirates dont le modèle économique s'inscrit dans l'exploitation de l'A380, pour les autres compagnies, l'avion demeure une équation complexe à résoudre. L'état de santé des compagnies aériennes (et les considérations environnementales) ne permet pas de nourrir beaucoup d'espoirs pour le retour des superjumbos dans le ciel.
"Les compagnies sont dans une logique de rentabilité. Elles se sont énormément endettées pour survivre à la crise et elles vont devoir générer de la rentabilité au maximum. Cela passe par des taux de remplissage élevés et donc des cabines plus petites", expliquait à BFM Business, Guillaume Hue, partner du cabinet Archery Strategy Consulting et spécialiste du secteur.
L'ère des superjumbos apparaît belle et bien achevée. "Honnêtement je n'y crois pas, confie à l'AFP le directeur commercial d'Airbus Christian Scherer. Aujourd'hui les nouvelles technologies qui nous amènent vers des vols durables sur le plan environnemental vont d'abord se focaliser sur les petits avions".