"On peut avoir un patrimoine élevé" mais pas de revenu: le président du Conseil d'analyse économique détaille les nombreux exemples où la taxe Zucman rate ca cible

L'idée de la "taxe Zucman" n'en finit plus d'agiter le débat public. Alors que ses promoteurs défendent cet impôt plancher minimum de 2% sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros pour une meilleure justice fiscale, d'autres voix – parmi lesquelles certaines organisations patronales, qui préparent un "énorme meeting" pour se faire entendre – pointent du doigt ses limites et ses conséquences pour les entreprises.
"On peut comprendre le constat de base qui est que, sur quelques centaines de contribuables avec le revenu économique le plus élevé, vous avez des taux effectifs d'imposition plus faibles que des cadres supérieurs", ce qu'on "peut trouver injuste" même si ce sont "souvent des dispositifs qui ne sont pas illégaux", a observé ce jeudi le président délégué du Conseil d'analyse économique, Xavier Jaravel, sur BFM Business.
Mais cette même taxe Zucman "n'est pas ciblée" sur ce problème et "va toucher des cas comme des start-up, qui n'ont aucun revenu et qui clairement ne font pas d'optimisation fiscale", a souligné Xavier Jaravel.
Des contre-exemples
La taxe Zucman se fonde sur une "présomption de revenu" lorsque l'on possède un patrimoine très élevé, et "si je vois que vous avez un patrimoine élevé et que vous ne me donnez pas de revenu que je peux fiscaliser, il doit y avoir un problème", explique l'économiste.
"Dans certains cas tout à fait, mais dans d'autres absolument pas", a-t-il nuancé, prenant pour exemple "Deezer qui n'a pas fait de profits pendant 17 ans".
Le laboratoire Biomérieux "est détenu à 59% par la famille Mérieux" et "serait donc soumis à la taxe Zucman", or "ils réinvestissent depuis les années 1960 le gros des profits de l'entreprise dans l'entreprise pour la faire croître", a-t-il ajouté, et "c'est là aussi un cas où il n'y a pas d'optimisation fiscale".
"Il faut garder le constat de départ" sur l'injustice fiscale, mais il faut plutôt proposer des mesures "plus ciblées" comme "une taxation des holdings, une remise à plat de certains dispositifs comme le pacte Dutreil, des sujets sur les plus-values latentes qui ne sont pas taxées", a ainsi énuméré Xavier Jaravel.
Réforme du pacte Dutreil
Concernant le pacte Dutreil, qui accorde une exonération partielle des droits de donation pour une transmission d'entreprise, "la plupart des économistes pensent que ça n'est pas très efficace" en l'état actuel, a assuré l'économiste, évoquant "des baisses du plafonnement sur les droits de succession" pour les "grosses transmissions d'entreprise avec des seuils très élevés de plusieurs dizaines ou centaines de millions d'euros", ce qui permettrait de garder "l'esprit" de la taxe Zucman.
"Il y a beaucoup de choses qu'on peut changer" dans le pacte Dutreil et "c'est juridiquement très solide" contrairement à la taxe Zucman, a poursuivi Xavier Jaravel, qui indique qu'il s'agit d'un dispositif "très coûteux" pour les finances publiques, de l'ordre de "5 milliards d'euros" par an. "Plutôt que d'avoir un dispositif inédit qui porterait surtout sur 15 personnes comme la 'taxe Zucman', il me semble plus intéressant d'avoir un package de dispositifs", a-t-il résumé.