Des trains sur des "rails verts": la SNCF investit plus d'un milliard d'euros pour accélérer sa décarbonation

Des travaux de remplacement sur une voie - BFM Lyon
On le sait, le réseau ferré français est vieillissant avec une moyenne d'âge de 30 ans environ. Une situation qui présente de grandes disparités, certaines lignes comme Paris-Clermont Ferrand étant particulièrement vétuste, entraînant des incidents en série.
Face à cette situation, l'Etat a alloué un peu plus de moyens à SNCF Réseau pour régénérer les voies (1,5 milliard d’euros de plus par an), notamment sur les lignes les plus anciennes. L'acier est au centre de ces dépenses puisque c'est la matière première pour fabriquer des rails qui est le facteur numéro un d'émissions de CO2.
SNCF Réseau remplace ainsi 2.000 à 2.500 kilomètres de rails en acier par an à raison d'un kilomètre par jour avec les trains usines.
Mais pas question désormais de passer outre les questions environnementales et de décarbonation. Les prochains achats de SNCF Réseau seront donc écoresponsables, à faible émission CO2 dans la production, la volonté étant de faire rouler les trains sur des "rails verts".
Deux aciéries françaises mobilisées
SNCF Réseau vient donc d'attribuer des contrats auprès d'aciéries d’un montant total de 1,3 milliard d’euros pour prolonger ses approvisionnements en rails à très faibles émissions de CO2 sur six ans. Les volumes sont impressionnants. "Durant cette période de six ans, SNCF Réseau sécurisera chaque année ses approvisionnements à hauteur de 170.000 tonnes de rails très largement décarbonés", explique la filiale du groupe SNCF.
Cette commande couvrira 80% des besoins de SNCF Réseau sur la période. L'idée n'est pas nouvelle mais elle monte en puissance.
"Nous l'avons initié lors du contrat précédent mais lors du dernier appel d'offres, nous avons intégré des critères de décarbonation. Nous avons valorisé ces critères dans le choix final", explique à BFM Business, Matthieu Chabanel, PDG de SNCF Réseau.
C'est Saarstahl Rail à Hayange (Moselle) et l'aciérie Saarstahl Ascoval à Saint-Saulve (Nord) qui en seront les principaux fournisseurs. Deux sites français donc, qui vont pouvoir rebondir grâce à cette commande avec près d’un millier d’emplois confortés.
Ce rail vert ne sera pas plus cher, son "coût reste dans les mêmes ordres de grandeur que le marché précédent", assure le dirigeant.
Des rails déposés, fondus et transformés en rails neufs
Mais au fait, c'est quoi un rail vert? C'est le résultat d'une approche circulaire. Ainsi, la majorité des rails déposés sur les chantiers ferroviaires (150.000 tonnes d’acier retirées chaque année) sont revendus afin qu’ils puissent être utilisés comme matière première pour produire de l’acier neuf.
"Un tiers de ces vieux rails sont revendus directement à notre partenaire industriel Saarstahl, ils sont ensuite refondus pour la production de rails neufs à partir d'acier 100% recyclé dans des fours à arc électrique, selon un processus nommé 'boucle courte' qui permet des économies substantielles d'énergie et de matières premières tout en réduisant les déchets", détaille SNCF Réseau.

"Les rails déposés sur les lignes à grande vitesse peuvent aussi être réutilisés sur des lignes moins sollicitées après tests et validation; là encore c'est de l'économie circulaire", ajoute Matthieu Chabanel.
Pour quels résultats? SNCF Réseau évalue à 10% la baisse de ses émissions de CO2 liés à SNCF Réseau, soit 200.000 tonnes. Un chiffre qui paraît faible mais que défend Matthieu Chabanel.
"Il faut bien comprendre que nos volumes d'achat représentent 5 milliards d'euros par an et pour ces rails décarbonés ce sont environ 200 millions d'euros par an. On a donc une performance forte sur un volume faible", explique-t-il.
Pour autant, de l'aveu même de Philippe Tabarot, le ministre des Transports, les dépenses "restent insuffisantes pour inverser la spirale de dégradation du réseau".
Des efforts plus importants à venir
Un avis partagé par Matthieu Chabanel qui attend avec impatience la signature du prochain contrat de performance pluri-annuel avec l'Etat.
"Ce contrat est en cours de révision pour augmenter les moyens alloués à la régénération du réseau. Le volume d'acier décarboné commandé sera bien plus important", explique-t-il.
En attendant, d'autres leviers d'économie circulaire sont actionnés pour réduire encore les émissions de CO2. Ainsi, les flux entre les différents sites industriels sont en grande partie assurés par une logistique ferroviaire.
Par ailleurs, sur les deux millions de tonnes de ballast déposées chaque année, 200.000 tonnes sont réemployées sur le réseau après un tri, tandis qu’une quantité significative est réintroduite directement sur les chantiers.
Quant aux traverses en béton, "ils constituent un bon matériau pour la sous-couche routière ou pour des infrastructures d’assainissement, tandis que les traverses en bois sont valorisées énergétiquement. À court terme, SNCF Réseau collectera 100% des matériaux structurants de la voie en vue de leur valorisation".