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Frank Boulben favori pour la direction d’Orange

Frank Boulben en janvier 2021 à New York City lors d'un évènement Verizob

Frank Boulben en janvier 2021 à New York City lors d'un évènement Verizob - Bennett Raglin / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Ce dirigeant de l’Américain Verizon a les faveurs de Bercy qui veut secouer l’opérateur français. Son profil international et sa stratégie alternative pour Orange ont séduit l’Etat actionnaire.

Personne ne l’a vu venir et il est pourtant en pôle position. Frank Boulben est le candidat surprise dans la course pour la direction d’Orange. Passé par Orange et Vivendi, actionnaire à l’époque de SFR, il a ensuite rejoint l’opérateur canadien Rogers. Il est chez le géant américain Verizon depuis cinq ans et aujourd’hui responsable de l’optimisation des ventes grand public. Deux autres candidats sont sur les rangs: Christel Heydemann et Ramon Fernandez.

Mais selon plusieurs sources, Frank Boulben est le candidat privilégié par le comité de gouvernance d’Orange et l’Etat, son actionnaire à 23%. Même si politiquement, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, est plus nuancé. "A compétence égale, il privilégie une femme" précise son entourage qui ne veut pas choisir entre les deux prétendants. Un léger avantage pour Christel Heydemann, la responsable de la zone Europe chez Schneider et administratrice d’Orange depuis 2017.

Selon un membre du gouvernement proche d’Emmanuel Macron, Frank Boulben a aussi les faveurs du Président sans éliminer pour autant la candidature de Christel Heydemann. Le secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler, doit les rencontrer ces jours-ci, en tous cas avant le conseil d’administration de l’opérateur du 24 janvier qui doit se pencher sur la gouvernance.

"Forte impression"

"Frank Boulben correspond à notre volonté de choisir un profil nouveau et plus orienté sur le business" nous confirme-t-on à Bercy. Il a fait "forte impression" lors des entretiens qu’il a passé devant le comité de gouvernance d’Orange et l’Agence des participations de l’Etat (APE), l’administration de Bercy, nous expliquent plusieurs sources. Frank Boulben a séduit en présentant une stratégie en rupture avec celle déployée par l’actuel PDG, Stéphane Richard. Il a privilégié la multiplication de partenariats, notamment avec les plates-formes, dans certains métiers comme les contenus, la cybersécurité ou la banque.

"Orange ne peut pas faire tous ses métiers seul et en être propriétaire", abonde un dirigeant du groupe. Une allusion au bouquet de chaines OCS, dont Canal+ est actionnaire minoritaire, et à Orange Bank qui a failli être vendu à BNP Paribas. Un moyen de recentrer Orange sur les activités purement télécoms et de revaloriser son cours de Bourse grâce aux réseaux.

Même raisonnement pour la cybersécurité alors qu’une alliance avec un spécialiste comme Atos a souvent été évoquée par l’actuel PDG d’Orange. Frank Boulben a d’ailleurs pointé l’erreur de séparer cette entité de la division entreprise, Orange Business Service (OBS), réalisée par Stéphane Richard et qui a conduit à plusieurs départs de dirigeants.

Profil international

"L’Etat veut un profil international car c’est le point faible d’Orange, ajoute une source proche du groupe. Il veut un candidat externe pour opérer un changement radical comme il l’a fait chez Air France, Renault ou Engie". Dans ces cas, l’Elysée a choisi un dirigeant très opérationnel et éloigné des pouvoirs publics pour préparer sa sortie du capital.

Mais sa volonté de bousculer Orange a aussi soulevé des réserves du côté du gouvernement. "C’est bien de vouloir changer les choses mais il y a aussi un contexte social à prendre en compte" explique une source proche de Bercy.

La rémunération en question

De son côté, Christel Heydemann laisse entendre en privé qu’elle n’est pas la favorite. Le dernier profil, celui du directeur financier d’Orange, Ramon Fernandez, a peu de chance… "En réalité, il avait été écarté par le comité chez Orange qui gère la gouvernance, explique une source proche du groupe. Mais Bercy l’a repêché car il est ancien directeur du Trésor".

Reste quelques points majeurs à régler comme la rémunération, qui "n’est pas bouclée" assure une source chez Orange. Pour Ben Smith chez Air France KLM et Luca de Meo chez Renault, "l’Etat a montré qu’il était prêt à faire des efforts", précise une source proche de Bercy, mais "les candidats connaissent aussi les contraintes financières" ajoute une autre. Chacun devra faire des concessions.

Matthieu Pechberty et Frédéric Simottel