Gaz, pétrole… L’Etat a absorbé plus de la moitié du choc énergétique

Un choc d’une ampleur considérable. En 2022, la hausse des prix des hydrocarbures couplée à la dépréciation de l’euro ont fait bondir le prix des importations françaises. Au point que cette flambée pourrait conduire à une perte de revenu réel de la France de 85 milliards d’euros, soit 3,2 points de PIB par rapport à 2019, selon une note de la Direction générale du Trésor publiée mercredi.
Dans le détail, cette perte proviendrait pour 56 milliards d’euros de l’augmentation de la facture de gaz (le coût d’approvisionnement a augmenté d’environ 650% en moyenne en 2022 par rapport à 2019) et pour 29 milliards de la hausse de la facture de pétrole (+77%). L’électricité n’est ici pas prise en compte, la France n’étant pas importatrice nette en temps normal.
Les finances publiques ont supporté 52% du choc
L’auteur de la note, Guillaume Clavères, précise toutefois que ces résultats doivent être considérés avec prudence car ils ne tiennent pas compte d’éventuels changements de comportements qui pourraient permettre de réduire la perte de revenu liée au choc énergétique à 2,5 voire 1,5 point de PIB. Par exemple, lorsque les entreprises décident de répercuter la hausse des prix de l’énergie sur le prix des exportations ou quand les volumes importés diminuent par rapport à 2019 en réaction à la hausse des prix de l’énergie.
Toujours est-il que le choc est brutal pour les entreprises comme les ménages. Sans intervention de l’Etat, les premières auraient subi une perte de 50 milliards d’euros (58% des 85 milliards) et les seconds de 32 milliards (37%), contre 3 milliards pour les administrations publiques.
Mais dans les faits, l’Etat est intervenu à travers une série de mesures censées atténuer le choc pour les ménages (chèque énergie exceptionnel, bouclier tarifaire, remise carburant…) et les entreprises. Si bien que les finances publiques ont in fine supporté en 2022 52% de la perte de revenu liée à l’augmentation des prix de l’énergie, soit une perte de 44 milliards d’euros. Pour les entreprises, la perte s’élève à 36 milliards d’euros (42%) après intervention de l’Etat. Les ménages absorberaient quant à eux 5 milliards d’euros de pertes (6%).
"Cette compensation ne peut être permanente"
Si les mesures de soutien de l’Etat ont permis de limiter l’inflation en France, "cette compensation ne peut être permanente", estime Guillaume Clavères pour qui le coût du choc énergétique devra être mieux réparti entre les ménages et les entreprises. D’abord parce que ces aides n’encouragent pas à la sobriété et ralentissent "l’atteinte des objectifs nécessaires à la transition climatique et à la souveraineté énergétique".
Ensuite, parce que le soutien financier de la puissance publique pour la consommation d’hydrocarbures finance "un transfert de richesses vers les pays exportateurs de gaz et de pétrole (Etat-Unis, Russie, Arabie Saoudite), qui voient leur revenu réel gonflé par une amélioration de leurs termes de l’échange" (les prix de leurs exportations augmentent plus vite que ceux de leurs importations).
Enfin, en étant financées par la dette, "les mesures de soutien font peser le coût de notre facture énergétique contemporaine sur les générations suivantes", conclut le Trésor.