BFM Business
Energie

Agrivoltaïsme: le gouvernement s'attend à "un afflux massif de projets dans les prochains mois"

placeholder video
Le décret encadrant le développement de l'agrivoltaïsme a été publié mardi au Journal officiel après de longues négociations entre l'administration, les énergéticiens et le monde agricole pour que la production d'énergie solaire cohabite avec celle de nourriture.

Il ne s'agit que d'un levier dans le déploiement des panneaux photovoltaïques pour atteindre les 100 GW de capacités installées d'ici 2035 en France, soit une multiplication par cinq. Mais le développement de l'agrivoltaïsme fait également écho à la crise agricole qui a secoué l'Hexagone un peu plus tôt dans l'année. Mardi matin, a été publié au Journal officiel un décret prévoyant notamment que les baisses de rendement induites par la production d'électricité à partir de panneaux photovoltaïques implantés sur des pâtures, des vergers, des terres de maraîchage ou d'autres cultures ne puissent excéder 10% par rapport à "la moyenne du rendement" observé sur une parcelle témoin.

Plus d'un an après l'adoption de la loi d'accélération sur la production d'énergies renouvelables, la raison d'être de ce décret est "d'offrir un cadre consensuel" aux agriculteurs et énergéticiens selon le cabinet de Roland Lescure. "On pourrait imaginer qu'en couvrant seulement 3% de la surface agricole en panneaux photovoltaïques, on atteindrait nos objectifs mais ça n'avançait pas car il n'y avait pas de cadre", a précisé le ministère délégué chargé de l'Industrie et de l'Energie lors d'un brief téléphonique.

"Il y a des projets exemplaires de part leur consultation et leur capacité à embarquer les parties prenantes et des projets qui se font en opportunisme. Pour 90 projets qui se passent bien, c'est souvent les 10 projets qui se passent mal et qui érodent la confiance des acteurs."

Favoriser les expérimentations et innovations

Mais l'objet de ce décret est aussi d'apporter une réponse à la problématique du niveau de vie des agriculteurs qui est de nouveau apparue au grand jour il y a plusieurs semaines. "A la fin, le photovoltaïque est une source de rémunération stable et dérisquée pour les agriculteurs, souligne le cabinet de Roland Lescure. Ce décret est aussi un outil pour répondre aux impératifs de pouvoir d'achat et de niveau de vie des agriculteurs." De son côté, le cabinet d'Agnès Pannier-Runacher qualifie les revenus issus de l'agrivoltaïsme de "durables et prévisibles", ce qui peut selon lui encourager "des phénomènes de reprise agricole de terrains délaissés" ou encore "des reprises d'exploitation existantes et des transmissions inter-générationnelles."

Si le cabinet de la ministre déléguée auprès de Marc Fesneau évoque des "rendements supérieurs à 30%", il insiste sur le fait que la mise en place de projets photovoltaïques ne doit pas pour autant conduire à l'abandon de l'activité agricole. Par ailleurs, le texte du décret reste volontairement "vague" pour laisser le champ libre à des expérimentations et innovations afin d'"identifier les meilleures options et pratiques [d'agrivoltaïsme] et faciliter à terme leur déploiement."

"La volonté du gouvernement est de ne pas restreindre l'agrovoltaïsme à une seule technologie."

Plusieurs centaines de projets dans les tuyaux dans certains départements

Les deux ministères s'attendent à un "afflux massif de projets dans les prochains mois" après la publication de ce décret. "On sait que plusieurs porteurs de projets attendaient la sortie de de décret pour pouvoir respecter les critères de l'agrivoltaïsme, relève le cabinet de la ministre déléguée auprès du ministre de l'Agriculture et de la souveraineté alimentaire. Plusieurs centaines de projets dans certains départements, beaucoup moins dans d'autres." "Ca se déploie partout et certains projets ont déjà pu sortir de terre et sont en suspens de ce cadre qui sort désormais", appuie le cabinet de Roland Lescure qui rappelle cependant que le temps de déploiement effectif des projets se fera sur plusieurs années et que "les objectifs de photovoltaïque en France ne reposeront pas que sur l'agrivoltaïsme."

"Le critère principal de l'agrivoltaïsme est le maintien de l'activité agricole et le bénéfice agronomique apporté par l'installation photovoltaïque."

Le décret sera prochainement complété par un arrêté sur les modalités de contrôles et de sanctions en cas de non-respect lesquelles pourront aller "jusqu'au démantèlement de l'installation en question avec remise en état de la parcelle" d'après un communiqué du gouvernement. Par ailleurs, l'inscription au futur document cadre ne donnera pas un droit automatique d'installation de panneaux photovoltaïques à un porteur de projet et ce dernier devra quand même passer par la case préfecture au préalable. Enfin, le cabinet de Roland Lescure indique qu'une charte de bonne pratique sera publiée dans les prochains mois pour accompagner les acteurs concernés dans "l'identification d'un développement harmonieux d'un projet d'agrivoltaïsme."

Timothée Talbi