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Pourquoi la Russie a fait abattre un de ses drones les plus perfectionnés

Le drone russe a été abattu par un Sukhoï Su-57 (image d'illustration).

Le drone russe a été abattu par un Sukhoï Su-57 (image d'illustration). - Dimitar DILKOFF

Un drone russe de nouvelle génération a été abattu par un avion de combat russe au-dessus des lignes ukrainiennes. Moscou aurait décidé la destruction de cet appareil ultra secret pour que ses technologies ne tombent pas dans des mains occidentales.

Plutôt le détruire que laisser l'ennemi mettre la main dessus pour en découvrir les innovations et la provenance des composants. C'est sans doute la raison qui a poussé la Russie à abattre un S-70 Okhotnik-B (chasseur en russe, d'où son surnom de Hunter), le drone le plus perfectionné de l'aviation russe. Et pour bien faire comprendre l'avance technologique dans ce domaine, Moscou a participé à la diffusion des images montrant l'attaque aérienne.

Sur la vidéo publiée par l'armée ukrainienne, on peut voir un avion de chasse russe, très probablement un SU-57 tirer un missile guidé sur le drone qui s'écrase dans une forte explosion. Selon des médias locaux, les deux appareils volaient à plus de 7000 mètre d'altitude au-dessus de la ville de Konstantinovka, dans la région de Donetsk, à l'est de l'Ukraine.

À l'instar du X-47B américain ou du nEURon européen, le S-70 Okhotnik-B est un chasseur furtif conçu pour voler en binome avec des avions de combat de cinquième génération. Supersonique et furtif, cet avion de combat non habité (Ucav) a été conçu par les avionneurs Russian Aircraft Corporation MiG et Sukhoï.

Ce drone est un concentré de technologies. Il est survitaminé avec une intelligence artificielle pour détecter les cibles terrestres et transmettre des informations précises des territoires qu'il survole. Conçu pour mener des attaques air-sol, il affiche des dimensions impressionnantes : 19 mètres d'envergure et 14 mètres de longueur. Au décollage, avec ses armements, son poids peut atteindre 25 tonnes dont près de 3 tonnes de munitions.

Un programme de 170 millions de dollars

Avant cet évènement, il n'avait pas été officiellement présenté. Quelques images montraient un appareil futuriste orné d'une étoile rouge sur chacune de ses ailes.

La plupart des analystes militaires s'accordent pour dire que le pilote du SU-57 semble avoir perdu le contrôle du drone. S'il s'écrasait en Ukraine dans une zone contrôlée par les troupes ukrainiennes, Moscou aurait craint que les pays occidentaux ne récupèrent des informations sur sa conception afin de pirater les autres exemplaires de ce drone. La Russie ne disposerait que de trois unités et en prépare trois autres.

Pour le mettre au point, Moscou aurait investi près de 170 millions de dollars. Chaque exemplaire coûterait entre 15 et 18 millions de dollars. Selon un post d'Osint Defender publié il y a un an, le S-70 aurait effectué son premier vol d'essai en 2019 pour être opérationnel en 2024. Apparemment, les choses ne se sont pas passées comme prévu.

Au vu de ces caractéristiques et des montants en jeu, il n'était pas question de laisser un pays occidental étudier les technologies qu'il contient pour les copier ou arriver à pirater le système de communication qui le relie au pilote de Su-57.

Moscou craindrait aussi que l'Otan découvre les défauts de ces cellules furtives. Selon un article publié en 2019 par le site spécialisé rusi.org, le drone russe affiche un retard technologique avec les démonstrateurs occidentaux ou chinois. Pour d'autres experts, le drone russe serait une imitation low-cost du X-47B américain.

En l'abattant dans un endroit particulièrement surveillé par les Ukrainiens, la Russie aurait-elle voulu faire croire que son programme était abouti ? Dans cette guerre de l'information, toutes les questions sont ouvertes et toutes les réponses sont permises.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco