Exit le projet Scaf? Berlin s'interroge sur sa participation au programme d'aviation de combat du futur

Stop ou encore? Le gouvernement allemand doit rapidement décider s'il poursuit le développement du projet d'aviation de combat du futur (Scaf – Système de combat aérien futur) avec la France, a déclaré à Reuters Christoph Schmid, député allemand membre de la commission de la défense, à la veille de discussions de haut niveau sur le sujet.
L'Allemagne reproche à l'industrie française de bloquer la prochaine phase de développement du programme Scaf en exigeant de diriger seule le projet, a déclaré mardi le ministère allemand de la Défense dans un document. Les divergences pourraient compromettre le lancement de la deuxième phase, à savoir la mise au point de démonstrateurs aptes à voler, qui était initialement prévue à la fin de cette année, selon des sources de défense.
Discussions politiques et tensions industrielles
Le président français Emmanuel Macron doit recevoir jeudi le chancelier allemand Friedrich Merz dans sa résidence d'été du fort de Brégançon, dans le Var. Des discussions ministérielles se tiendront vendredi à Toulon. "Si nous n'obtenons pas de décision à Toulon pour entrer dans la phase 2, tout deviendra de plus en plus difficile", a déclaré mercredi le social-démocrate Christoph Schmid.
"Plus la décision est retardée, plus la mise en œuvre du Scaf devient irréaliste."
Le projet Scaf, dont le coût est estimé à plus de 100 milliards d'euros, a connu des retards depuis l'annonce de son lancement en 2017, en raison de querelles intestines sur le partage des tâches et les droits de propriété intellectuelle entre la France et l'Allemagne, ainsi qu'entre leurs industries nationales respectives.
Dassault Aviation, Airbus, qui représente l'Allemagne, et l'Espagnol Indra, sont les principaux industriels impliqués dans le projet, qui vise à remplacer à partir de 2040 le Rafale français et les Eurofighter allemands et espagnols par un avion de combat de nouvelle génération.
"Ce ne serait pas une catastrophe pour l'Allemagne et la France de se séparer maintenant si c'est dans l'intérêt national ou européen", estime cependant Christoph Schmid, qui fait pression pour que Berlin commande 60 Eurofighter supplémentaires d'ici 2029 afin de remplacer sa flotte vieillissante de Tornado.
Une situation qui n'est pas sans rappeler le milieu des années 1980, lorsque la France quitte le projet d'avion de combat européen – un projet initié avec l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et le Royaume-Uni (qui créeront l'Eurofighter) – et lance le développement du Rafale. L'abandon du projet par les Allemands pourrait servir de base à l'examen d'autres options pour le développement d'avions de combat d'ici le milieu des années 2030, a-t-il ajouté.
Clarifier les responsabilités
Côté français, le PDG de Dassault Aviation Éric Trappier a maintes fois fustigé le partage des tâches et plaide pour un leadership clair, au risque de mettre en danger le programme, comme il l'a redit lors de la conférence de presse des résultats semestriels en juillet: "citez-moi un seul exemple de projet ambitieux industriel dans le monde où il n'y a pas de leader".
"La question se pose pour l'efficacité du projet qui est à trois pays (...) où il n'y a pas un vrai leader mais trois 'co-co-co'. (…) Comment je peux avoir un leadership alors que j'ai en face de moi quelqu'un qui pèse deux fois plus?", avait-il ajouté, visant Airbus.
Les ministres allemand et français de la Défense s'étaient accordés en juillet sur l'organisation d'une réunion spécifique au sujet du Scaf, qui doit se tenir en octobre prochain, précise-t-on à BFM Business.