Elle ne peut pas les détruire avec un fusil électromagnétique mais elle prend la menace au sérieux: comment la SNCF se prépare à l'intrusion de drones sur son réseau

C'est une nouvelle menace qui inquiète au plus haut point. Les intrusions de drones dans les espaces aériens de plusieurs pays de l'Otan ces derniers jours, attribuées à la Russie, montrent à quel point ce type d'engins peut facilement mettre en danger des infrastructures.
Le réseau de la SNCF, vital et critique, pourrait ainsi représenter une cible pour des drones malveillants. C'est un risque qui est pris au sérieux par la compagnie ferroviaire.
L'opérateur identifie deux risques: les drones pilotés par des particuliers et les drones militaires étrangers.
Dans le premier cas, l'entreprise souligne qu'ils sont de "plus en plus utilisés par des amateurs à proximité de trains en circulation, de touristes autour des gares, voire par des réseaux criminels à la recherche d’objets isolés pouvant être volés à proximité de technicentres".
Des signalements faits par les voyageurs
"Avec l'augmentation du nombre de drones, on doit être particulièrement vigilants pour détecter les appareils non autorisés. Lorsqu'un drone suspect est repéré, on évalue immédiatement la menace, on alerte les équipes sur le terrain et, si nécessaire, on se met en lien avec les autorités compétentes pour neutraliser le risque", explique Magali Di Crescenzo, Experte Nationale Sûreté Drones et Lutte Anti-Drones à la Sûreté Ferroviaire au sein du groupe SNCF.
"La Sûreté Ferroviaire a ainsi développé dès 2021 une nouvelle compétence en matière de détection de drones. En cas de survol d’une emprise SNCF, les collaborateurs du groupe sont invités à contacter le Poste de Commandement National Sûreté. Les voyageurs témoins peuvent également contacter le numéro d’alerte (3117) ou à envoyer au SMS au 31777. Ainsi, les équipes de la Sureté Ferroviaire sont averties et évaluent immédiatement le risque pour le matériel ou les personnes", ajoute le groupe.

En parallèle, en partenariat avec la startup Drone Keeper, la Sûreté Ferroviaire a conçu une carte interactive, recensant les missions autorisées de drones et permettant au Poste National de Commandement Sûreté de distinguer clairement les drones amis ou ennemis.
"Aujourd'hui les drones sont de plus en plus perfectionnés, de plus en plus difficiles à intercepter, c'est pourquoi nous devons améliorer nos méthodes pour garder le contrôle du ciel", souligne le superviseur au poste de commandement national sûreté.
Face aux menaces militaires, si la détection est importante, "la Sûreté Ferroviaire devrait poursuivre ses investissements dans les prochaines années, avec de nouveaux outils de détection, comme des radars, mais également par un renforcement de ses efforts de formation et d’information", préconise la SNCF.
Une menace mais aussi un outil
Mais pour le moment, à date, qu'ils s'agissent de drones civils ou militaires, la compagnie ne peut pas prendre seule la responsabilité de neutraliser ces engins. "Seules les forces de l’ordre sont autorisées à capturer en vol un drone, au moyen d’un fusil électromagnétique, ou d’un filet", poursuit Magali Di Crescenzo.
Si les drones constituent une menace claire pour la SNCF, ils représentent également un outil très efficace pour surveiller à distance le réseau et les équipements dans le cadre de la lutte contre les vols de câbles de cuivre, de plus en plus nombreux, ou les actes de sabotage.
La Sûreté Ferroviaire du groupe SNCF dispose ainsi depuis 2015 d’une flotte d’une trentaine de drones DJI Mavic et de 45 agents formés spécifiquement.
"Les drones nous permettent de surveiller en temps réel l'état des infrastructures, de détecter rapidement des anomalies ou des intrusions, et d'intervenir efficacement en cas de besoin. Ils sont particulièrement utiles pour accéder à des zones difficiles d'accès sans interrompre le trafic ferroviaire. Grâce à ces drones, le temps d’inspection de certaines infrastructures a été réduit de 30%, permettant aux équipes de se concentrer sur des interventions plus complexes et stratégiques", explique un "télépilote" de la Sûreté Ferroviaire.
Dans les aéroports, une menace réelle, des moyens limités
Des drones d'origine inconnue ont survolé des aéroports civils et militaire au Danemark mais aussi en Norvège et à Londres. Pour les neutraliser, le brouillage reste la solution la plus commune, via des fusils brouilleurs portés sur l'épaule même si d'autres techniques peu utilisées existent comme le laser.
En France, "la détection et la neutralisation des drones légers fait l'objet de mesures spécifiques depuis leur émergence (brouillage...) et relève de la responsabilité de la DGAC (direction générale de l'aviation civile) et de la gendarmerie des transports aériens. Au-delà, la protection de l'espace aérien français relève de la responsabilité du Ministère des Armées", souligne la DGAC citée par l'AFP. Sauf danger posé par le drone, qui peut être muni de charges explosives, il n'est pas prévu d'abattre l'engin volant au-dessus de zones habitées pour éviter tout dommage collatéral.