350.000 obus par an d'ici 2027: le géant allemand Rheinmetall inaugure une nouvelle usine de production de munitions

Le géant de l'armement allemand poursuit son expansion. Rheinmetall inaugure mercredi à Unterlüß, en Basse-Saxe (entre Hambourg et Hanovre), une gigantesque usine de munitions d'artillerie, symbole des efforts européens pour renforcer la base industrielle de défense. L'événement se déroule en présence du vice-chancelier et ministre allemand des Finances, Lars Klingbeil, de son collègue à la Défense, Boris Pistorius, tous deux sociaux-démocrates, ainsi que du secrétaire général de l'OTAN, Mark Rutte, invités par le président du directoire de Rheinmetall, Armin Papperger.
Rheinmetall a investi plus de 500 millions d'euros pour construire ce site, créant 500 emplois. L'usine située en pleine lande de Lunebourg, au sein d'un complexe industriel de Rheinmetall, revêt "une importance stratégique pour Rheinmetall, mais également pour la République fédérale d'Allemagne et pour l'Europe", souligne le patron du groupe de Düsseldorf dans un discours.
Une importante capacité de production
Construite en quinze mois, elle doit produire dès cette année jusqu'à 25.000 obus de 155 mm, d'une portée jusqu'à 40 kilomètres. La production devrait atteindre rapidement 350.000 unités par an d'ici 2027 sur un site de la taille de cinq terrains de football.
En pleine capacité, il s'agira de "la plus grande usine de munitions d'Europe, voire du monde", selon Armin Papperger.
Les chaînes vont tourner en priorité pour honorer la commande record de l'armée allemande (Bundeswehr) en munitions, d'une valeur jusqu'à 8,5 milliards d'euros, annoncée en juillet 2024. Une partie de la production doit être redistribuée à l'Ukraine. Des moteurs de fusées seront également fabriqués sur place à partir de l'an prochain. Le complexe d'Unterlüss produit déjà des obus de 120 mm destinés aux chars Leopard 2, utilisés sur le front ukrainien.
Rheinmetall diversifie ses activités
Au-delà de l'augmentation de la production de munitions, Rheinmetall s'impose peu à peu comme un géant de l'armement sur le sol européen, avec l'ambition de proposer une offre multisectorielle.
Le conglomérat produit aussi bien des obus que des blindés, a signé en mai dernier un accord de partenariat avec la société finlandaise Iceye Space pour produire des satellites militaires, a renforcé ses liens avec le géant américain Lockheed Martin pour produire des pièces et des tronçons de l'avion de combat F-35, bouscule le paysage européen des drones en annonçant en plein Salon du Bourget une coopération avec l'Américain Anduril pour co-produire drones de combat et missiles… et ne compte pas s'arrêter là.
Lors de la conférence de présentation des résultats semestriels début août, Armin Papperger a révélé vouloir embarquer sur le marché du secteur naval et être en cours de négociation "avec des partenaires", notamment dans le domaine des technologies sous-marines.
"J'espère que nous pourrons donner, au cours des prochaines cinq, six, peut-être sept semaines, un aperçu de ce que nous faisons. (…) Je pense que nous sommes capables de créer une grande entreprise dans le secteur naval. Nous ferons des investissements pour élargir notre portefeuille de produits."
L'Allemagne renforce son outil de défense
Cette expansion illustre le tournant engagé par l'Allemagne après l'invasion de l'Ukraine par la Russie en 2022, qui a mis fin à des années de sous-investissement, longtemps compensées par le bouclier de défense américain. Mercredi, le gouvernement allemand a approuvé des mesures pour renforcer le recrutement et la préparation militaire face aux tensions avec la Russie. Le plan vise à attirer des volontaires dans la Bundeswehr, tout en prévoyant le service militaire obligatoire si les effectifs sont insuffisants.
L'industrie de la défense profite du bond des dépenses militaires allemandes, de 28% en 2024, à 88,5 milliards de dollars, hissant Berlin au 4ème rang mondial des producteurs d'armes, selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri). Berlin prévoit encore une montée en puissance continue de son effort de défense pour atteindre 3,5% du PIB en 2029, soit plus du triple de son niveau d'avant-guerre en Ukraine, avec l'ambition de faire de son armée conventionnelle "la plus puissante d'Europe", comme il l'avait déclaré en mai dernier.