Bientôt la fin de la descente aux enfers pour Carmat? Le fabricant français de cœurs artificiels suspend le cours de son action et est en voie d'être liquidé

Les jours sont comptés pour Carmat. Comme l'avait révélé BFM Business cet été, le tribunal de commerce de Versailles examinera mardi 30 septembre la seule offre de reprise déposée pour sauver le fleuron français du coeur artificiel.
Dans un communiqué diffusé mercredi, la société dirigée par Stéphane Piat a annoncé la suspension du cours de son action à l'approche de l'audience. Elle a aussi indiqué qu'il est fort probable qu'elle soit "très prochainement liquidée".
"Si l’offre n’aboutit pas, il est hautement probable que la société Carmat sera liquidée (selon les règles applicables à la liquidation judiciaire) et que ses activités cesseront", détaille l'entreprise (...) Si, en revanche, l’offre est in fine retenue par le Tribunal, les activités de Carmat seront transférées au repreneur et se poursuivront donc au sein d’une nouvelle entité", détaille l'entreprise.
Subissant d'importantes difficultés financières, l'entreprise créée en 2008 et entrée en Bourse en 2010, dont le siège se trouve à Vélizy-Villacoublay (Yvelines), a demandé au début de l'été son placement en redressement judiciaire. Une décision prise à contre-coeur par ce symbole de l'innovation médicale française, en défaut de paiement après avoir échoué à rassembler les fonds nécessaires pour payer ses créanciers. Carmat avait pourtant lancé une campagne de dons fin juin, dans l'espoir de collecter au moins 3,5 millions d'euros au 30 juin, ainsi qu'environ 20 millions d'euros d'ici la fin de l'année 2025... En vain.
1 million d'euros sur la table
Un appel d'offres a donc été lancé mais seulement un repreneur s'est présenté avant la date butoir du 31 juillet pour sauver Carmat. Il s'agit de Pierre Bastid, le président du conseil d'administration de cette société à bout de souffle depuis juin 2024. Ancien patron de Schneider, Valeo et Thomson, il détient déjà 17% de l'entreprise.
D'après son offre de reprise, consultée en août par BFM Business, il met sur la table un million d'euros pour reprendre Carmat par le biais de sa société familiale belge. L'homme d'affaires s'engage aussi à apporter 150 millions d'euros sur cinq ans, dont 40 millions d'ici janvier prochain.
Il faut reconnaître que Pierre Bastid ne manque pas de motivation: il a déjà investi 60 millions d'euros depuis 2017 dans Carmat. Et pour financer son rachat, il a mis en vente un actif immobilier de prestige à New York, estimé à 76 millions de dollars.
Un délai supplémentaire accordé pour muscler l'offre de reprise
Mais le temps de trouver un acquéreur, la tâche reste délicate. C'est pourquoi l'homme d'affaires a sollicité et obtenu un report d'un mois et demi de l'audience au Tribunal de commerce de Versailles, le 19 août dernier, afin de muscler son offre. Pierre Bastid avait alors confié à BFM Business étudier une autre piste de financement, qui n'est pas mentionnée dans l'offre de reprise déposée dans les temps impartis. "J'ai lancé la cession d'une entreprise que j'ai par ailleurs, Eoliance. Le process suit son cours, il y a des signaux positifs", avait-il indiqué.
Encore faut-il trouver un repreneur pour cette société spécialisée dans la gestion de l'air des bâtiments dont les résultats ne sont pas réjouissants: -2,07 millions d'euros pour l'Ebitda, -2,17 millions pour le résultat d'exploitation, -420.000 euros de résultat net. Et le chiffre d'affaires est en recul de 8,4% en 2024.
Quid de l'avenir des salariés de Carmat?
Surtout, le délai supplémentaire accordé par le Tribunal doit permettre à Pierre Bastid d'estimer plus précisément la masse salariale qu'il pourrait être en mesure de conserver. En effet, l'offre de reprise que nous avons consultée est ambigüe : à deux pages distinctes, il est mentionné que l'homme d'affaires a l'intention de reprendre tous les effectifs "nécessaires à la reprise de l'activité", et "tous les contrats".
Recontacté par BFM Business ce jeudi, l'homme d'affaires n'a pour l'instant pas répondu à nos questions s'agissant de l'évolution de son offre de reprise par rapport à la copie initiale.
Enfin, en cas de validation par le tribunal de commerce, l'offre devra également être approuvée par le ministère de l'Économie avant d'être entérinée. En effet, Carmat officie dans le secteur stratégique de la santé publique et serait alors reprise par une société étrangère, en l'occurrence belge, ce qui nécessite l'aval du gouvernement.