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Pourquoi le sujet de l'acétamipride va revenir sur la table malgré la censure partielle de la loi Duplomb

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La FNSEA réclame un projet de loi, avec un article unique, pour rouvrir la voie au retour de l'acétamipride, après la censure partielle de la loi Duplomb par le Conseil constitutionnel.

Si le Conseil constitutionnel a entravé son retour dans les champs, l'acétamipride n'a pas encore dit son dernier mot. La FNSEA, qui prépare une nouvelle mobilisation à la fin de l'automne, veut convaincre l'exécutif de déposer un projet de loi avec un article unique pour "compléter" la récente loi Duplomb et réautoriser le pesticide sur le sol français, après l'échec estival de la précédente tentative.

La mesure la plus sensible de la loi Duplomb, et qui a accaparé les débats médiatiques et parlementaires, a sans aucun doute été la réintroduction de l'acétamipride. L'utilisation de ce pesticide de la famille des néonicotinoïdes est interdite en France depuis 2018, mais elle reste encore autorisée ailleurs en Europe. Craignant une distorsion de concurrence, les producteurs de betteraves et de noisettes étaient les premiers à réclamer sa réautorisation pour lutter contre certains ravageurs.

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Adoptée par les parlementaires, la réintroduction de l'acétamipride n'a toutefois pas réussi à passer l'obstacle du Conseil constitutionnel, qui a censuré la mesure, l'estimant insuffisamment encadrée. L'article 2 de la loi Duplomb ouvrait la voie au retour du pesticide "pour faire face à une menace grave compromettant la production agricole", mais le texte ne prévoyait aucune limite dans le temps et restriction sur les produits concernés, à l'exception d'une clause de revoyure tous les trois ans.

Les Sages ont ainsi estimé que, "faute d'encadrement suffisant" sur les usages, la durée et les filières concernées, cette mesure était contraire aux exigences de la Charte de l'environnement, qui a valeur constitutionnelle depuis les années 2000.

"Des filières et des durées très précises"

Mais "le Conseil constitutionnel n'a pas fermé la porte" au retour de l'acétamipride, veut croire la FNSEA par la voix de son président, Arnaud Rousseau, qui s'exprimait ce mardi matin lors de la conférence de presse de rentrée du syndicat agricole. Retenant la leçon de la censure des Sages, la FNSEA s'est attelée à remettre le sujet sur la table de l'exécutif. Le syndicat agricole réclame le dépôt d'un projet de loi par le gouvernement pour essayer, une nouvelle fois, de permettre sa réintroduction.

"On appelle à ce que le gouvernement, celui-là ou le suivant, puisse se saisir d'un projet de loi avec un article unique", a plaidé Arnaud Rousseau.

Tel que poussé par la FNSEA, cet article unique donnerait la possibilité d'utiliser "de manière dérogatoire" l'acétamipride "pour des filières très précises, sur des durées très précises, dans des conditions très précises" en tenant compte des "injonctions" des Sages, indique le président de la FNSEA. L'objectif est "de le border juridiquement de sorte qu'il puisse être accepté par le Conseil constitutionnel et ensuite résister à un décret" qui "ne manquerait pas d'être attaqué au Conseil d'État", avance-t-il.

"Le combat n'est pas terminé" car "nous n'accepterons jamais que des produits puissent être utilisés par d'autres États européens dans un espace unique et qu'ils soient interdits en France", affirme Arnaud Rousseau. Par ailleurs, "rien n'est réglé" pour le "questionnement légitime" des Français sur leur santé car "ce n'est pas parce que ce n'est pas produit en France que ça n'arrive pas dans leurs assiettes", déplore-t-il, jugeant impossible d'empêcher les importations de produits traités à l'acétamipride.

Chute probable du gouvernement Bayrou

Mais rien n'assure que l'exécutif rouvrirait un dossier aussi sensible. "Rédigeons cet article, trouvons des porteurs. Si le gouvernement dit 'c'est non', il y a des parlementaires", d'autant plus qu'ils avaient "voté majoritairement" en faveur de la loi Duplomb lorsqu'elle abritait le retour de l'acétamipride, avance Arnaud Rousseau.

"De toute façon, qu'on le veuille ou pas, le débat va se rouvrir puisqu'il y aura cette discussion à l'Assemblée nationale", a observé le président de la FNSEA, évoquant la pétition contre la loi Duplomb, qui a dépassé les 2 millions de signatures et qui doit théoriquement faire l'objet d'un débat parlementaire. En dépit de la probable chute du gouvernement Bayrou d'ici quelques jours, le syndicat agricole croit en ses chances et plaidera "rapidement" sa cause auprès du prochain exécutif.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV