Christine Lagarde reconnaît que l'horizon économique "s'assombrit" en zone euro

La présidente de la Banque centrale européenne Christine Lagarde a déclaré ce jeudi que "l'horizon économique s'assombrit" en zone euro en raison de la poursuite de la guerre en Ukraine et de l'inflation qui "restera à un niveau élevé indésirable pendant un certain temps".
Les conséquences du conflit armé, avec une inflation record et une grande incertitude dans l'économie, "assombrissent considérablement les perspectives pour la seconde moitié de 2022 et au-delà", a déclaré la Française après que la BCE a décidé de relever pour la première fois ses taux depuis 2011 pour tenter de juguler la hausse des prix.
Ce resserrement de la politique monétaire en zone euro a déjà été amorcé en juillet avec l'arrêt des nouveaux achats de dette sur les marchés. Les autres banques centrales sont bien plus actives depuis des mois contre la flambée des prix, comme la Fed américaine qui a fait décoller ses taux en mars. Mais la tâche de la BCE est plus complexe en raison des menaces grandissantes de coupure des approvisionnements de gaz russe, du risque que fait encourir la crise politique en Italie et de la chute de l'euro.
La BCE "est capable de faire les choses en grand"
En Italie - une des économies les plus vulnérables de la zone monétaire - le Premier ministre et prédécesseur de Christine Lagarde à tête de la BCE, Mario Draghi, a en outre remis sa démission au président. Son départ, qui pourrait entraîner des élections anticipées cet automne, a immédiatement fait redécoller le taux d'emprunt italien sur le marché.
Pour éloigner le spectre d'une nouvelle crise des dettes souveraines, la Banque centrale européenne a annoncé un nouvel instrument pour protéger les Etats les plus fragiles contre des attaques spéculatives, accentuant cet écart, "ou spread", de manière injustifiée.
La BCE argumente que ces "spreads" gênent la transmission adéquate de sa politique monétaire. Mais des conditions strictes d'utilisation doivent être définies, les gardiens de l'euro n'ayant pas le droit d'aider budgétairement les gouvernements. "Le Conseil des gouverneurs déterminera l'élégibilité" d'un pays à ce nouvel outil et "la BCE ne prend pas position sur des questions politiques" internes, a assuré Christine Lagarde sans nommer l'Italie malgré plusieurs questions sur le sujet. Mais "si nous devons l'utiliser, nous n'hésiterons pas", a assuré la Française, martelant que la BCE "est capable de faire les choses en grand".
Incertitude sur le gaz
En zone euro, la crise du gaz complique également la tâche de la BCE. Le gazoduc Nord Stream reliant la Russie à l'Allemagne a certes redémarré jeudi après dix jours de maintenance, mais il ne fonctionne toujours pas à plein régime, les livraisons ayant été drastiquement réduites depuis mi-juin. Un arrêt complet des livraisons de gaz par Moscou plongerait la zone euro dans la récession et une hausse trop rapide des taux aggraverait la situation. "Nous sommes très attentifs" sur l'énergie et "en particulier sur le gaz" en raison de son impact sur les prix de l'électricité et l'inflation, a indiqué Mme Lagarde.
Toutefois -lueur d'espoir- l'économie européenne continue, selon la BCE, de "bénéficier" de la levée des restrictions sanitaires et de la reprise de l'activité, notamment dans le secteur touristique.