Retraites: le patronat salue l'âge d'équilibre, les syndicats s'y opposent

Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT sur le plateau de BFMTV, le 5 mai 2019. - Capture BFMTV
Il était très attendu. Le rapport du haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, a été dévoilé ce jeudi. Les partenaires sociaux ont eu droit à une restitution dans la matinée. À la sortie de leur réunion avec Jean-Paul Delevoye et la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, ils ont tour à tour exprimé leur opinion sur les choix retenus.
La proposition d'instaurer un âge d'équilibre, assorti d'un bonus-malus, ne plaît pas à tout le monde. Concrètement, l'âge légal de départ reste 62 ans, mais la pension subira une décote jusqu'à 64 ans et une surcote au-delà, pour inciter les Français à partir à la retraite plus tard, afin d'assurer la viabilité financière du système de retraite.
Le patronat a salué l'intégration dans le rapport de cette "règle d'or", selon l'expression utilisée par le président de la CPME, François Asselin, et celui du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux. Ce dernier a également plébiscité la formule retenue par le haut-commissaire qui consiste à ce que "cet âge [d'équilibre] va varier au fur et à mesure de la démographie, des conditions économiques". "Ce pilotage-là paraît intéressant", assure-t-il.
La CGT dénonce "un enfumage"
Si ce système d'ajustement séduit le patronat, il inquiète fortement certains syndicats. Le secrétaire général de FO, Yves Veyrier rappelle qu'au départ Jean-Paul Delevoye avait uniquement proposé une surcote à partir de 63 ans. "En deux, trois mois, on est passé de 63 à 64 ans. Donc très clairement on est dans une logique où l'équilibre financier sera assuré par le recul, au fur et à mesure des contraintes budgétaires et économiques, de l'âge effectif de départ", a-t-il alerté.
Même son de cloche du côté de la CGT. Dans son rapport, Jean-Paul Delevoye a indiqué que la valeur du point ne pourra pas baisser dans le temps. Mais il ne s'agit que de préconisations, que le gouvernement peut modifier. "Monsieur Delevoye est optimiste", ironise Philippe Martinez. "Quand on entend le discours ambiant où il faut réduire les dépenses publiques, on peut tout à fait imaginer que la valeur du point sera définie par le ministère de l'Économie est quand on fera tirer les oreilles par Bruxelles, c'est vers ce genre de choses qu'on fera des économies. Là aussi on n'a aucune assurance", pointe le secrétaire générale de la CGT, qui dénonce "un enfumage".
La CFDT n'est pas contre l'âge d'équilibre en soi, mais son secrétaire général, Laurent Berger, estime qu'il est "stupide" de fixer un âge qui soit le même pour tous. "Il ne faut pas fixer cet âge pour tout le monde, il faut le laisser à la libre situation de chacun des salariés. Aujourd'hui l'âge du taux plein, il est fixé en fonction de la carrière des uns et des autres, c'est la même chose qui doit s'appliquer dans le futur régime", a-t-il insisté.
FO et la CGT ont déjà appelé à des mobilisations contre cette réforme. La première appelle à un rassemblement national le 21 septembre, la seconde à plusieurs temps de mobilisation la semaine du 20 au 27 septembre pour conjuguer les luttes sociales et climatiques. La CFDT, elle, ne souhaite pas se prononcer tant que le projet de loi n'est pas fixé. "Ce rapport est un point d'étape, il y a encore des dizaines de questions à se poser", juge Laurent Berger. Le gouvernement va à son tour mener des concertations avant de modifier le texte à sa sauce. "Il faut rentrer dans cette concertation et faire des propositions", a poursuivi le patron de la CFDT. "Nous jugerons sur pièce à l'issue du processus".