Retraites: le gouvernement a-t-il encore des marges de manœuvre pour faire évoluer sa réforme?

Au lendemain de la journée de mobilisation et avant l'arrivée du projet de loi à l'Assemblée nationale, l'exécutif se dit prêt à faire évoluer sa réforme des retraites… mais ses marges de manœuvre sont limitées.
Donner des gages pour convaincre les indécis et les opposants, sans alourdir la facture: c'est tout l'enjeu pour le gouvernement. Parmi les pistes d'évolution qui ont été évoquées, les entreprises qui présentent de mauvais résultats à l'index "seniors" pourraient être sanctionnées. Selon Gabriel Attal, le ministre du Budget, cela pourrait faire partie des discussions.
De quoi alimenter les craintes du patronat, qui s'y oppose: "comparer les entreprises n'a pas de sens", fustige le patron du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux. Une telle mesure sera compliquée à mettre en œuvre: être senior est un avantage dans certains métiers, beaucoup moins dans d'autres métiers, plus physiques.
"Un index senior, ça ne sert à rien"
Pour Nicolas Bouzou, économiste et directeur du cabinet Astares, un index, "ça ne suffit pas mais il est indispensable que cette réforme s'accompagne d'une hausse de l'emploi des seniors, la réforme doit être faite pour ça" souligne-t-il ce vendredi sur BFMTV/RMC.
Si la volonté du gouvernement est de faire progresser l'emploi des seniors dans les entreprises, "la question est de savoir comment on accompagne tous ces seniors, comment on les absorbe dans les entreprises, on aura potentiellement un million de seniors actifs supplémentaires dans les dix prochaines années et on n'a pas commencé à parler de ça", s'interroge Mathieu Plane, économiste, directeur adjoint du département Anamyses et Prévisions de l'OFCE ce vendredi sur BFMTV/RMC.
Autre problème: certaines entreprises, parce qu'elles recrutent beaucoup d'apprentis, se retrouveront avec un taux d'emploi des seniors très bas et risquent de passer pour de mauvaises élèves. Cette mesure, néanmoins, aurait l'avantage de ne rien coûter.
1200 euros net ou brut
Une autre évolution possible serait de porter le minimum de pension non pas à 1200 euros brut mais à 1200 euros net. Il y a finalement assez peu d'écart entre les deux sommes, admet un député de la majorité présidentielle.
"L'augmentation du minimum contributif est une vraie avancée sociale" estime Nicolas Bouzou "et ça fait partie des éléments où il peut y avoir une négociation ces prochaines semaines car ça ne touche pas à l'intérêt de la réforme. Ca serait 1200 euros pour tous".
Autre piste, la réduction voire l'annulation de certaines exonérations de cotisations patronales ou la taxation des plus riches. "Je ne pense pas que ça soit aussi simple que ça" affirme Mathieu Plane.
"Taxer les milliardaires à chaque fois, c'est un peu la martingale" ajoute-t-il, estimant que d'autres sujets comme la transition écologique nécessiteront de mettre à contribution les plus riches.
Pour l'économiste, un des seuls points qui pourraient changer la donne auprès de l'opinion est la question de l'âge de départ.
La question de l'âge de départ
"Il y a une mesure de justice, est-ce que certains doivent travailler 44 ans quand d'autres doivent travailler 43 ans. Je pense que c'est là-dessus que va porter le débat" souligne Mathieu Plane qui rappelle que cette question de "justice" est au coeur de la contestation.
D'ailleurs, indispensables pour faire voter la réforme, les Républicains vont se battre pour que ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans n'aient pas à cotiser plus de 43 ans. Trop cher, juge un ténor de la majorité, rappelant que l'équilibre de la réforme n'est pas négociable. Les marges de manœuvre du gouvernement sont donc très limitées.