Le conseil de l'Assurance maladie se prononce contre le doublement des franchises médicales mais le gouvernement va quand même publier le décret

Le conseil de l'Assurance maladie, sorte de parlement de l'institution, s'est prononcé jeudi dans un avis consultatif contre le doublement des franchises médicales (reste à charge des assurés sociaux), que le gouvernement Bayrou veut mettre en oeuvre par décret pour freiner la croissance des dépenses d'assurance maladie, a-t-on appris auprès du conseil. Le franchissement de cette étape formelle laisse désormais la possibilité au gouvernement de publier son décret s'il le souhaite, malgré l'opposition des syndicats et des associations de patients qui dénoncent une mesure touchant les personnes les plus fragiles.
Les représentants des syndicats de salariés ont voté contre la mesure, soutenus par les représentants d'institutions comme la Mutualité ou l'Union nationale des associations familiales, a précisé le conseil. Les organisations patronales ont voté pour, sauf l'U2P (artisans) qui s'est abstenue.
Un avis du Conseil d'Etat attendu après le 8 septembre
Au total, trois projets de décret ont été examinés. Le premier prévoit de doubler à 100 euros par an le montant maximal qu'un usager peut payer en franchise médicale (reste à charge non remboursé sur les boites de médicament, les consultations médicales, actes paramédicaux ou transports sanitaires).
Les deux autres doublent les montants unitaires des franchises et participations forfaitaires : dans la limite des plafonds annuels, l'assuré social devrait ainsi payer de sa poche 2 euros par boîte de médicament ou acte paramédical (1 euro aujourd'hui), entre 4 et 5 euros par acte ou consultation d'un médecin (2 à 3 euros aujourd'hui), ou 8 euros par transport sanitaire (4 euros aujourd'hui). Les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire, de l'AME, les mineurs, ou les titulaires d'une pension d'invalidité sont exemptés du paiement de ces franchises.
Il est également prévu de doubler les plafonds journaliers des franchises médicales. Ainsi, jusqu'à 16 euros par jour pourront être à la charge du patient qui fait un aller retour en transport sanitaire. Les textes ne prévoient pas, en revanche, de doubler le plafond journalier des participations forfaitaires qui resteraient donc maintenus à 8 euros par jour maximum.
Sophie Binet dénonce un procédé "honteux"
D'après les informations de BFM Business, les parties prenantes ont échangé avec la direction de la Sécurité sociale laquelle prévoit de publier le décret doublant les plafonds annuels dès ce soir. Contactée par BFM Business, la Direction de la sécurité sociale (DSS) indique ce jeudi soir que deux des trois projets de décrets sont publiables avant le 8 septembre. Il s'agit du doublement des plafonds annuels d'une part, mais aussi du montant des franchises médicales et de leurs plafonds journaliers.
Attention: le doublement des montants des participations forfaitaires, aujourd'hui facturées 2 euros pour les consultations médicales et examens de radiologie, analyses de biologie médicales, reste soumis à l'avis du Conseil d'État. Ce dernier se réunira après le 8 septembre, date à laquelle les députés doivent participer au vote de confiance sollicité par le Premier ministre François Bayrou.
"J'appelle solennellement le Premier ministre à renoncer à ce décret. On ne peut pas dans le même temps dire: 'Je me soumets à un vote de confiance' et dans l'autre, avancer à marche forcée et vouloir passer en force les mesures de son budget discrètement en catimini par décret, c'est honteux", avait dénoncé mardi Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT.
Le conseil de la Caisse nationale d'assurance maladie compte 35 membres, dont 26 représentants des syndicats de salariés et des organisations patronales, et des représentants d'institutions intervenant dans le domaine de l'assurance maladie. Son avis sur les projets de décrets est consultatif, mais le gouvernement est tenu de le solliciter avant de publier ses textes.
Dans un courrier adressé le 29 août à la ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles Catherine Vautrin, le président du conseil, Fabrice Gombert, avait sollicité un nouveau report de l'examen de ces projets de décrets qui avaient été soumis pour avis en plein été. "Le Conseil considère que ces sujets auraient dû, dès le départ, être intégrés au débat parlementaire sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale", avait-il souligné dans ce courrier consulté par BFM Business.