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Jusqu'à 1,5 million de retraités gagnants: le passage à l'abattement fiscal de 2.000 euros "assez largement redistributif" selon l'Institut des politiques publiques

Le gouvernement envisage de réformer l'abattement fiscal dont profitent les retraités lors de la déclaration de revenus.

Le gouvernement envisage de réformer l'abattement fiscal dont profitent les retraités lors de la déclaration de revenus. - AFP

L'abattement forfaitaire de 2.000 euros pour les retraités, annoncé par le gouvernement pour le budget 2026, bénéficierait "assez largement" aux moins aisés s'il s'applique aussi pour le calcul des aides au logement, et permettrait un gain budgétaire d'"environ 550 millions d'euros", selon l'Institut des politiques publiques (IPP).

Un potentiel redistributif assez significatif. Tel est l'avis de Sylvain Duchesne, économiste à l'Institut des politiques publiques (IPP), concernant la réforme de l'abattement fiscal dont profitent les retraités.

Dans un billet publié ce mardi 29 juillet, ce spécialiste de la fiscalité des ménages considère en effet que le passage à l'abattement forfaitaire de 2.000 euros pour tous les retraités bénéficierait "assez largement" aux moins aisés si celui s'applique aussi pour le calcul des aides au logement.

Pour rappel, les retraités bénéficient actuellement d'un abattement de 10% sur leurs revenus déclarés au fisc, qui correspond en fait à la déduction pour les frais professionnels dont profitent les contribuables actifs. Mais dans l'idée de mettre davantage à contribution les retraités les plus aisés, le Premier ministre François Bayrou a annoncé, le 15 juillet dernier, dans le cadre de son plan de redressement des finances publiques, la transformation de cet abattement en un forfait de 2.000 euros à déduire des revenus déclarés à l'administration fiscale.

550 millions d'euros d'économies à la clé

Actuellement, l'abattement de 10% dont bénéficient les retraités est aussi déclaré aux Caisses d'allocations familiales (CAF) pour calculer l'éligibilité aux aides au logement. Mais on ne sait pas encore si le gouvernement a l'intention d'appliquer cette même logique avec le nouvel abattement forfaitaire de 2.000 euros.

"L'application de la nouvelle modalité d'abattement à la fois au calcul de l'impôt sur le revenu et à celui des aides au logement serait fortement redistributif, tout en permettant une amélioration du solde budgétaire d'environ 550 millions d'euros", a estimé l'économiste de l'IPP.

Mais alors qu'il est en quête d'économies substantielles - 43,8 milliards d'euros dès 2026 - le gouvernement pourrait être tenté de ne pas tenir compte des prestations sociales dans l'application de ce nouvel abattement forfaitaire.

"Au contraire, une application uniquement au calcul de l'impôt sur le revenu conduirait à des recettes presque deux fois plus importantes (environ un milliard d'euros), pour un effet redistributif moindre et une grande majorité de perdants à la réforme", a souliné l'expert.

Un changement sans impact jusqu'à 20.000 euros de pension annuelle

D'après les calculs de Sylvain Duchesne, la réforme de l'abattement fiscal pour les retraités serait sans impact pour ceux qui perçoivent 20.000 euros de pension annuelle.

Sous ce seuil, ils verront leur abattement augmenter. "Ils auront donc des revenus considérés comme plus bas, qui ouvrent droit à payer moins d'impôts et à percevoir plus de prestations sociales, alors que ce sera l'inverse pour les foyers fiscaux recevant plus de 20.000 euros", a détaillé l'IPP.

Le revenu déclaré au fisc serait en effet considérablement réduit pour les retraités aux pensions plus modestes. Par exemple, le montant de l'abattement dont profiterait un retraité touchant 5.000 euros de pension à l'année serait multiplié par 4, passant de 500 euros à 2.000 euros déduits des revenus déclarés à l'administration fiscale grâce à la réforme.

C'est au-delà de 20.000 euros de pensions annuelle que les retraités seront davantage imposés. Un retraité seul percevant à l'année 50.000 de pension ne pourra déduire, après la réforme, que 2.000 euros de ses revenus déclarés au fisc, au lieu de 4.399 euros actuellement.

Jusqu'à 1,5 million de gagnants si l'abattement est appliqué au calcul des prestations sociales

Si le gouvernement prévoit la prise en compte du nouvel abattement de 2.000 euros dans le calcul des prestations sociales comme les aides au logement, alors la réforme se traduirait ainsi par 1,5 million de gagnants (9% des retraités) contre 1,4 million de perdants (8%) du fait de la hausse d'impôt.

A l'inverse, si seul le mécanisme d'abattement sur l'impôt est modifié, et que le nouvel abattement n'est donc pas pris en compte dans le calcul des prestations sociales, seuls 100.000 de retraités seraient potentiellement gagnants avec cette réforme.

Caroline Robin avec AFP