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E-commerce: le gouvernement présente un arsenal de mesures anti-fraude à la TVA

Les fraudes à la TVA concernent principalement les vendeurs établis dans des pays tiers, surtout en Asie, qui proposent en France leurs produits sur des places de marché, ces dernières pouvant le cas échéant être intermédiaires de paiement et/ou de transport et logistique.

Les fraudes à la TVA concernent principalement les vendeurs établis dans des pays tiers, surtout en Asie, qui proposent en France leurs produits sur des places de marché, ces dernières pouvant le cas échéant être intermédiaires de paiement et/ou de transport et logistique. - Adrian Dennis-AFP

Le gouvernement va rendre les sites d'e-commerce directement redevables de la TVA sur tous les produits commandés par les clients français et expédiés depuis l'étranger. La mesure s'appliquera en 2021. D'autres sont prévues en 2020 comme la publication d'une liste noire des sites "non-coopératifs" avec l'administration.

Dans le cadre du renforcement de la lutte contre la fraude fiscale, le ministre de l'Action et des Comptes publics prend plusieurs mesures contre la fraude à la TVA dans l’e-commerce, qui seront inscrites dans le projet de loi de finances pour 2020.

Ces fraudes concernent principalement les vendeurs établis dans des pays tiers, surtout en Asie, qui proposent leurs produits sur des places de marché accessibles en France depuis des sites d'e-commerce, ces derniers pouvant le cas échéant être intermédiaires de paiement et/ou de transport et logistique.

Gérald Darmanin avait reçu ce lundi matin les dirigeants des principales plates-formes de commerce en ligne en France pour leur présenter son arsenal anti-fraude à la TVA. Celui-ci se décline en trois mesures principales.

  • Rendre les plateformes en ligne directement redevables de la TVA due sur les transactions qu’elles facilitent. Ces sites connaissent en effet les transactions, les vendeurs et les acheteurs, justifie le gouvernement. Ces nouvelles règles de collecte de la TVA par les plateformes entreront en vigueur en 2021.
  • Mise en place d’une liste "noire" des opérateurs de plateforme non coopératifs avec l'administration fiscale. Cette liste sera rendue publique en cas de non-respect de 5 obligations édictés par Bercy; payer la TSN (taxe Gafa), s'ils sont redevables, répondre aux demandes de l’administration, transmettre le revenu des utilisateurs, prendre les mesures requises pour que les vendeurs paient la TVA et payer la TVA due au titre des transactions facilitées.
  • Mise en place d’un registre tenu par les entrepôts logistiques permettant d’identifier l’origine et la destination des colis et le montant de l’impôt dû. Ils devront le conserver pendant 10 ans.

La fraude à la TVA prend, pour simplifier, deux formes principales. Soit le colis commandé depuis la France est directement expédié depuis un pays tiers (hors UE) par fret express (70 millions de colis par an) ou par fret postal (non chiffrable mais beaucoup plus). Dans ce cas la douane n’a pas les moyens de contrôler les millions de colis qui arrivent sur les plateformes logistiques aéroportuaires, et qui représentent chacun un enjeu très faible. Ils sont très souvent sous-déclarés, notamment pour bénéficier de la franchise de TVA pour les envois inférieurs à 22 euros.

Soit les biens ont été préalablement importés par le vendeur et sont stockés dans un entrepôt en attendant la livraison au client final. Le vendeur doit en principe s’immatriculer à la TVA en France, mais en pratique, très peu de vendeurs sont enregistrés et la TVA disparaît sans que l’administration ait connaissance des sommes en jeu, sans même parler de les récupérer.

Un arsenal inspiré du dispositif appliqué au Royaume-Uni

Au-delà des pertes massives pour le Trésor public, cette fraude constitue donc une concurrence déloyale qui pénalise, avant tout, les commerçants et les e‑commerçants français et européens qui respectent les règles.

Pour son dispositif anti-fraude à la TVA visant les sites d'e-commerce, le gouvernement français s’est inspiré en grande partie du dispositif anglais. Les obligations pesant sur les entrepôts et le principe de responsabilité solidaire des plateformes (loi fraude 2018) ont été appliqués au Royaume-Uni en 2016. Outre-Manche, l’administration fiscale estime que la fraude est comprise entre 1 et 1,5 milliard de livres (de 1,13 à 1,7 milliard d'euros) pour les seuls biens en provenance de l’étranger hors UE. Dans la mesure où les marchés sont comparables, ces montants pourraient être similaires en France.

Hormis les nouvelles règles de collecte de la TVA par les sites d'e-commerce qui entreront en vigueur en 2021, toutes les autres mesures qui seront inscrites dans le projet de loi de finances 2020, seront applicables dès l’année prochaine: la liste noire, les obligations des entrepôts, mais aussi la responsabilité solidaire en matière de TVA (qui couvre toutes les ventes de biens et de services) issue de la loi fraude de 2018.

Gaëtane Meslin, avec Frédéric Bergé