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Face à un nouveau coup de rabot du gouvernement, les pharmaciens menacent de multiplier les fermetures d'officines à la rentrée

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Contre l'avis des pharmaciens, le gouvernement a entériné le coup de rabot sur les ristournes accordées par les fabricants aux officines sur les médicaments génériques. En colère, l'intersyndicale renforce sa mobilisation et prévoit plusieurs jours de fermeture, le 16 août, puis en septembre.

Les pharmaciens sont en rogne. Et pour cause : ce mercredi 6 août, un arrêté paru au Journal officiel a entériné le coup de rabot prévu par le gouvernement, sur les ristournes commerciales accordées par les laboratoires aux officines sur les médicaments génériques. Il s'agit des copies qui portent généralement le nom des principes actifs, comme par exemple, le phloroglucinol pour le Spasfon.

Actuellement, les remises consenties aux pharmacies par les fabricants peuvent atteindre jusqu'à 40% pour les génériques. Mais à partir du 1er septembre, les remises seront plafonnées à 30% maximum du prix de vente des médicaments.

Baisse progressive du plafond de remises jusqu'à 20% en 2027

Et ce n'est pas tout : alors que le gouvernement envisageait initialement de diviser par deux le plafond des remises dès le 1er août, le ministère de la Santé a finalement opté pour une baisse progressive. A partir du 1er juillet 2026, le plafond des ristournes sur les médicaments génériques sera donc abaissé à 25%, avant d'être à nouveau diminué à 20% à partir du 1er juillet 2027.

"La trahison est actée, la colère des pharmaciens n'en est que décuplée", a réagi dans un communiqué la Fédération des pharmaciens d'officine (FSPF), syndicat majoritaire, dans un communiqué commun avec d'autres organisations de pharmaciens (Uspo, UNPF, Federgy, UDGPO).

La baisse de dix points de pourcentage du plafond des ristournes commerciales sur les génériques est particulièrement redoutée financièrement. "Ce sera un manque à gagner de 300 millions d'euros en année pleine", appuie Pierre-Olivier Variot, président de l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (Uspo), auprès de BFM Business.

Nouvelles remises sur les médicaments biosimilaires

En contrepartie des baisses du plafond des ristournes sur les médicaments génériques, le gouvernement accorde néanmoins la possibilité, aux fabricants, de consentir des remises sur les médicaments biologiques similaires (ou biosimilaires). Autrement dit, là où le plafond de remises va diminuer progressivement dans le temps pour les génériques, un nouveau plafond va être appliqué pour les biosimilaires et celui-ci sera à l'inverse augmenté. Les remises sur ces médicaments biologiques pourront atteindre 15% du prix de vente dès le 1er septembre 2025, 17,5% au 1er juillet 2026 puis 20% au 1er juillet 2027, soit l'équivalent du plafond final des remises qui sera autorisé pour les génériques.

Mais ce geste est loin de suffire selon les pharmaciens. "Le volume de ventes de biosimilaires est beaucoup plus faible que les génériques et les périmètres des pharmacies sont très variables dans ce domaine", souligne Pierre-Olivier Variot auprès de BFM Business. "Prenez deux officines équivalentes en termes de chiffre d'affaires, elles vont faire à peu près le même volume de ventes de génériques, mais pour les biosimilaires, c'est du simple au sept fois plus", poursuit le pharmacien.

"L'officine qui est près d'un hôpital pourra compenser, et encore... Mais pour les autres, ce sera la double peine", conclut-il.

En effet, la liste de biosimilaires autorisée en France est restreinte et comprend principalement des médicaments en majorité prescrits à des patients hospitalisés. On y trouve par exemple des immunodepresseurs ou des anticorps monoclonaux.

Fermeture des officines dès le 16 août

En guise de riposte, l'Uspo appelle les officines à fermer massivement leurs portes au public le 16 août. Et l'intersyndicale, qui cherche à rallier l'opinion publique à sa cause, prévoit une fermeture des pharmacies le 18 septembre puis "tous les samedis à compter du 27 septembre".

"Le gouvernement a engagé une lutte à mort contre les pharmaciens, nous jetterons toutes nos forces dans cette bataille", prévient l'intersyndicale des pharmaciens, qui espérait obtenir gain de cause avec sa grève des gardes entamée début juillet.

Dans un communiqué séparé, l'Union de syndicats de pharmaciens d'officine (Uspo) se montre encore plus combative, en annonçant préparer "une double procédure juridique contre l'État", à la fois via une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) devant le Conseil Constitutionnel et "un recours pour inaction en matière d'accès aux soins" devant le tribunal administratif.

"Est-ce que, pour une fois, la profession pourrait être récompensée de son engagement 24 heures sur 24h, 7 jours sur 7, pourrait être considérée et non pas être vue comme une vulgaire variable d'ajustement comptable des comptes de la Sécurité sociale?", avait déclaré fin juillet Philippe Besset, le président de la FSPF.

Le gouvernement prévoit 1,7 milliard d'euros d'économies sur les dépenses de santé en 2025, dont 500 millions visant le médicament, notamment via des baisses de prix.

Caroline Robin