10ème journée de mobilisation: pour l'historien Stéphane Sirot, le pari de l'essoufflement est "raté"

10ème journée de mobilisation contre la réforme des retraites déjà. Pas encore un record mais pas si loin non plus. Les manifestations contre la loi du travail El Khomri, en 2016, avaient cumulé 14 journées nationales d'action.
Entamé mi-janvier, le mouvement actuel ne semble pas s'essouffler, au contraire même, il a bénéficié d'un second souffle depuis l'utilisation du 49.3 le 16 mars dernier avec, notamment, l'irruption de la jeunesse dans les cortèges.
"Le gouvernement ne peut pas tabler sur un essoufflement du mouvement, il a raté son pari," analyse pour BFM Business Stéphane Sirot, historien et spécialiste des mouvements sociaux.
Selon ce professeur d’histoire politique et sociale à l’université de Cergy-Pontoise, si rien ne se produit, la "spirale d'emballement" pourrait même s'aggraver avec le risque que les tensions montent encore d'un cran et que la crise politique empire.
"Ce serait malheureux de poursuivre ce pari raté," dit-il encore comme un avertissement alors qu'il considère que le gouvernement est responsable de la situation à force de s'imposer "contre tout et contre tout le monde".
Au micro de RMC ce mardi, Frédéric Souillot, secrétaire général de Force ouvrière, a exprimé sa détermination à continuer le mouvement jusqu'au "retrait de la réforme."
A moins d'un "éclair de conscience" de la part de l'exécutif, l'intersyndicale va encore se réunir ce soir pour convenir d'une prochaine journée de mobilisation contre le texte, comme ils le font depuis mi-janvier, a-t-il dit.
Il y a quelques jours, le leader de la CFDT, Laurent Berger, a proposé au gouvernement de mettre son texte sur "pause" à défaut de le retirer. Sa proposition qu'il a présenté comme un moyen "d'apaiser les choses" a reçu une fin de non-recevoir de la part d'Emmanuel Macron qui a invoqué la décision à venir du Conseil constitutionnel comme un moment-clé qu'il faut respecter.
Ce mardi sur France Inter, il n'était pas moins déterminé que son confrère FO: "jamais je ne vous dirai que c'est la dernière" mobilisation, a-t-il dit.
Grèves reconductibles, jeunesse, colère...
Entre janvier et mars, la mobilisation qui a connu des hauts et des bas mais a bien tenu, a changé de forme: avec les grèves reconductibles d'abord puis l'arrivée de la jeunesse et l'émergence de tensions et violences maintenant récurrentes. Pour la mobilisation de ce mardi d'ailleurs, un dispositif de sécurité massif est prévu pour désamorcer de possibles débordements.
Côté grèves, les secteurs des transports, de l'énergie et de la collecte des déchets sont toujours perturbés par des débrayages qui durent parfois depuis plus de 20 jours. Dans les rues de Paris et d'autres villes de France encore jonchées de poubelles, les habitants trouvent sûrement le temps de la grève long bien que l'opinion soutienne majoritairement le mouvement. Pour autant, par le passé, certains mouvements notamment dans les transports ont duré bien plus longtemps, note Stéphane Sirot, qui rajoute que les grèves actuelles ne semblent pas avoir un impact significatif sur l'économie.
Et puis il y a eu l'arrivée remarquée des lycéens et des étudiants dans le mouvement depuis le 49.3. Ils sont venus rajeunir les rangs des cortèges et protestent également en bloquant universités et lycées.
"Quand ça commence, on a toujours du mal à savoir quand et comment ça va se terminer," dit Stéphane Sirot à propos de la mobilisation des jeunes.