BFM Business
Conso

Pourquoi le patron d'Intermarché estime que les industriels vont être contraints de baisser les prix

placeholder video
Sur RMC et BFMTV, Thierry Cotillard, président du groupement Les Mousquetaires, estime que les industriels n'auront d'autre choix que de baisser leurs prix dans les prochains mois pour enrayer la chute des ventes en volume.

La tendance se confirme. Face à l'inflation, les Français réduisent significativement le nombre d'articles qu'ils glissent dans leurs caddies. "On observe cette déconsommation. Elle est chiffrée à -2% depuis le début de l'année", affirme ce lundi sur RMC et BFMTV Thierry Cotillard, président du groupement Les Mousquetaires.

Dans ses magasins, les ventes de certaines catégories de produits accusent même des baisses en volume encore plus importantes, allant jusqu'à -8% pour les shampoings et jusqu'à -6% pour la viande et le poisson... Rien de surprenant pour Thierry Cotillard: "On l'a vu venir. On sait que lorsque les prix augmentent trop, il y a une élasticité et la demande baisse".

D'après lui, les grands industriels, qui ont fait passer des hausses de tarifs de "17-18%" lors des dernières négociations commerciales sont les premières victimes de cette chute de la consommation. "Ces marques nationales perdent vraiment la guerre de la part de marché en France" alors que les marques distributeurs "progressent très fortement", de l'ordre de "+20%, et les premiers prix de +30%".

"Certains Français dans l'arbitrage qui est le leur arrêtent de consommer certains produits. (...) Ils se détournent des grandes marques qui coûtent plus cher et vont vers la marque distributeur", observe le président du groupement Les Mousquetaires, constatant que "les PME ont été plus raisonnables" sur les hausses demandées.

Thierry Cotillard promet un "mars vert"

Pour Thierry Cotillard, les "marques nationales sont en train de s'apercevoir que leur politique" de forte augmentation des prix "montre ses limites". C'est pour cette raison qu'elles reviennent aujourd'hui "avec des politiques de promotions très fortes pour le deuxième semestre", même si "la promotion ne comblera pas les volumes perdus par le rejet des consommateurs français", prévient-il.

Dans ces conditions, "il faudra que les multinationales soient raisonnables pour les prochaines négociations" commerciales annuelles qui s'achèveront en mars 2024, poursuit Thierry Cotillard, qui dit espérer "un mars vert, c'est-à-dire un mars qui permettra d'obtenir des baisses significatives de tarifs" sur les produits de marques nationales afin que "la consommation sur ces produits repartent".

Le dirigeant estime que ces baisses de prix sont inévitables. D'autant qu'elles seront justifiées par la baisse "de la matière première agricole". "Ca a été le cas de la volaille car l'alimentation des poulets est beaucoup moins chère qu'il y a un an, donc on le répercute dans le prix d'achat du poulet". Surtout, "nous allons avoir un prix industriel de production qui va baisser parce que l'électricité coûte moins cher, parce que l'emballage est en train de coûter moins cher... Donc on a bon espoir d'avoir des baisses de 3 à 5, voire 10% sur certains produits dès mars 2024", ajoute-t-il.

Premières baisses de prix en rayons

Certaines baisses de prix sont déjà effectives ou sont en train d'être répercutées en rayons. Thierry Cotillard cite notamment un recul des prix de "3 à 10%" pour les pâtes, de "-15%" pour l'huile de colza, de "-3%" sur l'huile de tournesol ainsi que sur la volaille. Un reflux dû aux efforts consentis par certains industriels et aux plans anti-inflation mis en place par la plupart des enseignes de grande distribution.

Le patron du groupement Les Mousquetaires affirme à ce titre que 800 baisses de prix ont déjà été appliquées depuis le 1er juillet dans les magasins Intermarché et Netto. Et la reconduction des plans anti-inflation va permettre de nouvelles baisses sur "plusieurs centaines de produits" dès le mois de septembre. "Le distributeur va faire des efforts de marge", assure Thierry Cotillard.

"Certains industriels refusent toujours de renégocier"

Thierry Cotillard déplore en revanche que certains industriels rechignent toujours à prendre leur part de l'effort. Selon lui, ces derniers ont pour l'heure accepté des baisses sur seulement 5% des produits environ, ce qui "ne va pas satisfaire le consommateur". "Certains (industriels) refusent toujours de renégocier. (...) Il y a des entreprises qui refusent catégoriquement de revenir à la négociation", affirme-t-il.

Une situation qui va pousser les distributeurs à "faire des choix drastiques de gammes". "Nous pourrions décider comme d'autres distributeurs de limiter certaines gammes de grandes multinationales au profit de la marque distributeur qui a trouvé son public", met-il en garde, préférant "ne pas vendre" un produit de marque nationale quand "notre marque propre propose la même chose deux fois moins cher".

Mais à terme, les grands industriels n'auront pas le choix, à en croire Thierry Cotillard: "Ils vont revenir à la négociation avrec l'idée de sauver les volumes. On est dans une position en mars 2024 de renégocier parce que les industriels vont redevenir raisonnables", martèle-t-il.

https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis Journaliste BFM Eco