"10 offres sur le Vieux-Port": Emmanuel Macron dit-il vrai sur le nombre d'emplois vacants?

Interpellé par une mère de famille marseillaise, le chef de l'Etat a assuré que les offres d'emploi ne manquaient pas à Marseille. Une affirmation qui se révèle exacte, mais qui pose la question de la réinsertion de jeunes très éloignés de l'emploi et sans formation.

Il fallait traverser la rue, maintenant il suffit de se rendre sur le Vieux-Port à Marseille pour trouver un emploi. Le chef de l’Etat en visite dans la cité phocéenne persiste et signe: on trouve facilement du travail aujourd’hui en France.

Interpellé ce lundi par une passante, mère d'un homme de 33 ans sans emploi, Emmanuel Macron lui a assuré qu'en faisant "le tour du Vieux-Port ce soir avec vous, je suis sûr qu’il y a 10 offres d’emploi pour votre fils." Alors 10 offres d’emploi sur le Vieux Port, vraiment ?

Quand on fait une recherche sur Google recherche d'emplois, on dénombre effectivement un certain nombre d'emplois immédiatement disponible sur la zone concernée. Une grosse vingtaine précisément, qui vont d'équipier chez Burger King, manager aux halles alimentaires, chef de rang au restaurant de l'hôtel Sofitel, serveur au restaurant La Résidence du Vieux Port ou encore réceptionniste à l'Hôtel Montgrand. Certains des emplois de saisonniers, mais la plupart sont des CDI.

Peut-on trouver "10 offres d'emploi sur le Vieux-Port", comme l'affirme Emmanuel Macron ?

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Une journaliste du quotidien La Provence s'est rendue sur le Vieux Port et a fait le tour des commerces. En à peine une heure, elle a déniché 13 offres d’emploi. Des postes là aussi dans l’hôtellerie ou la restauration. Certes, ce ne sont pas des postes d’ingénieurs mais des emplois au Smic hôtelier payés 1966 euros brut par mois.

Même constat du côté de BFMTV qui a recensé 11 offres d’emploi non pourvues dans les restaurants du Vieux Port en un peu plus de 2 heures. Des jobs de serveurs en salle surtout et de commis de cuisine. Rien qu’aux Grandes Halles du Vieux Port, huit offres d’emploi sont actuellement non pourvues.

"La restauration est un métier"

Le patron d’une brasserie marseillaise explique avoir signé 11 contrats de travail ces derniers mois, neuf sont partis.

"Nous, on en a du boulot, explique Bernard Marty, le président de l'Umih Paca sur BFM Marseille. La restauration est un métier, on ne peut pas sous-entendre que quelqu'un puisse venir dans nos restaurants du jour au lendemain."

Le phénomène ne concerne pas que Marseille. Malgré un taux de chômage de 7%, la Dares dénombrait au premier trimestre 2023 quelque 380.000 emplois vacants dans le pays. Il y a toujours eu des postes non pourvus mais là on atteint des niveaux jamais vu dans le pays. C’est 73% de plus qu’avant le Covid en 2019 par exemple.

62.300 postes non pourvus dans l’action sociale (aides à domicile, assistants maternels…), 57.000 dans l’industrie, 47.600 dans le commerce, 29.000 dans la communication, 28.000 dans la construction... Les secteurs concernés sont nombreux.

Jamais autant de Français en emploi depuis 1975

Est-ce à dire que les Français ne veulent plus travailler? Ce n'est pas ce que montrent les données de l'Insee sur l'emploi. Avec un taux d'emploi (part de la population totale en emploi) qui frôle les 69% en 2023, jamais depuis que l'institut le mesure en 1975 ce taux n'avait été aussi élevé. Il était ainsi de 64% seulement en 2011. On peut difficilement parler de désaffection pour le travail.

En revanche avec un taux de chômage de 7%, au plus bas depuis 40 ans, le pays arrive au noyau dur en matière d'insertion. Il s'agit d'aller chercher des personnes très éloignées de l'emploi, notamment des jeunes en rupture.

C’est ce qu’on appelle les "Neets" dans la nomenclature sociale. Un acronyme qui signifie "Not in education, employment or training". Ce sont des jeunes qui ne sont plus à l’école, pas en emploi et qui n’ont aucune formation. Ils sont en rupture complète avec le monde du travail, ont des difficultés de transport, sont désocialisés et pour qui même répondre à une annonce d’emploi sur le Vieux Port peut-être une épreuve.

L’Insee estime que ces jeunes "Neets" représentent 12% des 15-29 ans, mais plus de 18% si on resserre sur la classe d'âge 20-24 ans, soit un total de près de 1,5 million de personnes. C’est pour remettre le pied à l’étrier à ces décrocheurs ainsi qu’aux bénéficiaires du RSA -dont plus de la moitié n’est pas inscrite à Pôle Emploi- que le gouvernement va créer France Travail. Et comme sur le Vieux Port, il y a du boulot… Avant d’atteindre le plein emploi.

https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco