"Je suis partie pour mon enfant": le témoignage des mères de famille ukrainiennes accueillies au Cannet

Quasiment chaque seconde, un enfant ukrainien devient réfugié. Près d'un million et demi d'entre eux ont d'ores et déjà été forcés à quitter leur pays. Voilà le constat glaçant tiré par l'Unicef ce mardi, 20 jours après le début de l'offensive russe sur le sol de son voisin.
Vingt-trois de ces enfants, ainsi qu'une quarantaine de femmes, ont posé leurs bagages lundi dans la commune du Cannet, dans les Alpes-Maritimes. La fin d'un périple d'un jour et demi pour ces 18 familles originaires de l'ouest de Kiev, rythmé par la traversée de quatre pays.
À leur arrivée, les rescapés ont été accueillis par les applaudissements des élus et des bénévoles du Cannet. Les mamans et les enfants se sont vu remettre une rose.
Un sourire et quelques mots de français
Avec leur bonnet visé sur la tête, ces réfugiés ont esquissé un sourire et fait les présentations. Certains se sont même essayés à quelques mots de français.
Puis est venu le moment de souffler, de savourer un café ou un chocolat chaud avant de se restaurer. Les enfants jouent avec un ballon de foot ou s'occupent en complétant un coloriage du dessin animé "Bob l'éponge".
La voix saccadée par l'émotion, une mère tente d'expliquer comment elle raconte l'exil à son fils, assis à ses côtés, la mine fatiguée.
"Il faut lui dire que tout va bien se passer"
"Il faut lui dire que tout va bien se passer, que tout va bientôt s'arrêter. Évidemment, il a eu très peur quand les avions sont passés au-dessus de la maison", se souvient-elle.
Si des rires se distinguent sur certains visages, ce sont bien les larmes qui prédominent chez les réfugiés. Des perles salées coulent sur les joues d'une femme aux cheveux blonds et à la doudoune bleue, comme une référence aux couleurs de son pays. Elle se souvient du ciel assombri par l'aviation russe.
"Dès le début, j'entendais les bombes près de chez moi, rembobine-t-elle. Trois bombes ont explosé à 500 mètres de ma maison. Les fenêtres et le toit ont été soufflés. J'ai eu peur mais ce n'est pas cela qui m'a aidé à quitter le pays. Je suis partie pour mon enfant. Il a déjà perdu son père à la guerre."
"J'avais un beau mari, une belle maison"
Au tour d'une autre femme, plus âgée, de raconter une histoire déchirante: "Je suis dévastée car mon mari est mort. Il voulait protéger notre maison. Je suis triste car je quitte cette maison qu'il voulait sauver. Ce sont mes enfants qui ont insisté pour que je parte car je passais mon temps à pleurer".
Et cette femme de contempler ce qu'elle et les siens ont perdu: "J'avais un beau mari, une belle maison et des enfants. On avait tout et maintenant, on n'a plus rien".
Un prochain convoi en préparation
Sur les 18 familles accueillies au Cannet, sept seront hébergées par la municipalité. Les onze autres seront réparties chez les Cannettans volontaires. Philippe et Françoise prendront en charge Svetlana et son fils.
"C'est très émouvant quand même", réalise Françoise dans un sourire. Philippe poursuit: "Son mari est décédé. On se sent d'autant plus contents de pouvoir leur accorder un peu de réconfort si possible".
Ce mardi, la ville du Cannet prévoit d'aider les réfugiés à réaliser les démarches administratives nécessaires à leur hébergement en France et à l'inscription des enfants à l'école. Mais la mairie ne compte pas s'arrêter là. Elle réfléchit déjà l'organisation d'un prochain convoi.
À ce jour, environ 15.000 réfugiés ukrainiens ont été accueillis en France. Lundi, Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur, a laissé entendre que la France se préparait à en prendre en charge plus de 100.000.