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Hautes-Alpes: des menaces sur la liaison entre Vars et Risoul provoquent de vives tensions

La station de Risoul dans les Hautes-Alpes.

La station de Risoul dans les Hautes-Alpes. - BFM DICI

L'ancien président de Vars Tour, Marc Gueydon, a quitté son poste de conseiller municipal de Vars alors que le maire de la commune pourrait mettre fin aux liaisons avec Risoul l'hiver prochain.

À cinq mois du début de la saison hivernale, cette décision pourrait faire l’effet d’une bombe. La liaison qui permet aux skieurs de profiter des deux domaines de Vars et Risoul serait menacée. C’est en tout cas ce que croit savoir le conseiller municipal de Vars, Marc Gueydon, dans des propos rapportés par BFM DICI.

"C’est un retour en arrière dramatique. Se priver de Risoul serait complètement aberrant", s’emporte l’intéressé, ancien président de Vars Tour et jusqu’à mardi conseiller municipal de la commune.

"Il est pour moi impossible de rester avec cette équipe. Je ne peux accepter de telles décisions. Le maire veut fermer la liaison sous-prétexte que Risoul n’indemnise pas assez Vars sur les forfaits. Il réclame entre 1 et 1,5 million d'euros. D’autant que sur ces cinq dernières années, Vars a perdu l’équivalent de 200.000 journées ski. On n’est pas en mesure de réclamer plus au voisin. C’est de la folie", s’étrangle Marc Gueydon.

Il a donc décidé de claquer la porte du conseil municipal à cause de la liaison qui pourrait être menacée, mais pas seulement. "Les forfaits vont augmenter de 10% pour tenter de remettre les finances des remontées mécaniques à flot. Et le chèque de 173.000 euros? Une somme astronomique versée par la Sedev sans aucun filtre. C’est du jamais vu!", conclut Marc Gueydon.

Le maire victime d'une escroquerie

Le "chèque" évoqué par Marc Gueydon relève en réalité d’une escroquerie qu’a subie la société d'économie mixte Sedev. En juin dernier, le cabinet d’audit Mazars a été victime d’une usurpation d’identité. Plusieurs stations, dont Puy-Saint-Vincent et Vars, ont reçu des mails et des appels frauduleux d’individus se présentant comme des chargés de missions spécifiques. Des sommes d’argent conséquentes ont été demandées.

Si Puy-Saint-Vincent n’est pas tombée pas dans le piège, la Sedev à Vars, elle, a bien fait un virement important. "Une plainte a été déposée pour escroquerie", confirme Dominique Laudré, le maire de Vars.

"C’est environ 125.000 euros, subtilisés habilement par des professionnels de l’escroquerie. Ma signature a été utilisée frauduleusement. Certains salariés étaient sous pression à cause des mails et des appels et l’erreur est arrivée. Nous aurions pu être plus vigilants mais que dois-je faire, clouer au pilori la personne qui fait l’erreur? Ce n’est pas mon truc", se défend le maire.

Dominique Laudré se félicite d’avoir prévenu tous les autres domaines skiables dès que l’escroquerie a été relevée. "Cela a évité des catastrophes ailleurs." Mais à Vars, la pilule ne passe pas chez les opposants du maire actuel: "Il existe un proverbe à Vars qui dit 'Soit tu ne fais rien et tu es un fainéant. Soit tu fais et tu es un loup'. Je ne suis pas parfait, mais qui l’est? Depuis 2017, j’ai fait mon maximum pour que Vars soit à la hauteur. Je fais ce que je peux avec les cartes que j’ai en main et les résultats sont là", plaide le maire.

"Le sujet n'est pas nouveau"

Quid de la démission de Marc Gueydon? "Nous respectons sa décision. Il n’est plus en phase avec l’équipe, il part. Mais il ne devrait pas parler de sujets qu’il ne maîtrise pas puisqu’il n’est pas au cœur des discussions entre Vars et Risoul", peste Dominique Laudré. La liaison entre Vars et Risoul est-elle menacée?

"Franchement, Marc Gueydon s’emballe. Les discussions n’ont pas encore débuté avec Labellemontagne, mais le sujet n’est pas nouveau. Il est logique que nous nous voyions avec Jean-Yves Rémy pour arrêter et définir une répartition cohérente entre nos deux domaines. Ni Vars, ni Risoul ne souhaite cesser cette liaison. À l’heure où les prix flambent et après deux années de Covid, il ne faut pas rajouter de complication à la complication. Jusqu’à preuve du contraire, personne n’est opposé au maintien de cette liaison. Reste à définir les modalités puisque nous avons entrepris de gros investissements ces dernières années, ce qui pousse les skieurs de Risoul à venir chez nous. Demain, ça sera peut-être l’inverse. C’est ça un mariage", sourit Dominique Laudré.

S’il ne veut pas dévoiler les montants reversés jusqu’à présent par Risoul à Vars, le maire confirme néanmoins "qu’une réunion doit se tenir dans les quinze jours". Avant de conclure: "la Forêt blanche est un acteur essentiel du territoire. Cette union nous permet de rivaliser avec Les Orres, Orcières ou d’autres".

"L'heure des négociations"

Même son de cloche du côté de Labellemontagne. "Nous sommes obligés de nous mettre d’accord", indique le PDG, Jean-Yves Rémy. "En 2014, nous avons passé un accord de réciprocité avec Vars. Une convention qui stipule et encadre les droits de réversions. C’est basé sur la consommation, c’est-à-dire le nombre de skieurs qui vont de Risoul à Vars et inversement. Le solde final est redistribué. Sachant que depuis notre arrivée, plus de skieurs de Risoul vont à Vars que l’inverse", développe l’exploitant des remontées mécaniques de Risoul.

Selon nos informations, Risoul a ainsi reversé entre 50.000 et 400.000 euros à Vars par saison depuis 2014. "Nous avons entrepris un chantier important afin de revoir exactement où nous en sommes. Petit à petit, les techniciens en charges des études nous remettent leurs conclusions. L’heure des négociations va donc arriver. Le juge de paix, c’est le client et pas forcément les investissements d’une station. En tout cas, nous avons et nous aurons une attitude positive tant que les critères sont acceptables", affirme Jean-Yves Rémy.

Une baisse du chiffre d'affaires

Mais alors, quel serait l’impact direct en cas de fermeture de la liaison? "Cette liaison fermée serait une catastrophe. Un retour en arrière dramatique. Tant pour les skieurs que pour les commerçants. Pour Vars, comme pour Risoul, cette liaison fermée représenterait une baisse de 20 à 25% du chiffre d’affaires", confirme, fataliste, le maire de Risoul.

À l’inverse de son homologue de Vars, Régis Simond, lui, ne cumule pas les casquettes. "L’exploitation des remontées mécaniques ici est une délégation de service public. Les discussions sont donc entre Vars et Labellemontagne. Labellemontagne qui reverse chaque année une somme ce qui, par le passé, n’était pas le cas."

Alors, le maire de Vars peut-il demander plus? "Dominique Laudré estime que la somme est insuffisante puisque Vars a fait de gros investissements. C’est compréhensible mais Labellemontagne investit aussi. C’est du gagnant-gagnant. Quand on est marié, c’est pour le meilleur et pour le pire", sourit Régis Simond, avant de conclure: "Labellemontagne a fait faire un audit pour entamer de nouvelles discussions avec Vars. Quand le rapport sera connu et que nous serons conviés à la table, nous irons volontiers pour nous exprimer".

Par Valentin Doyen