"C'est très compliqué": face aux difficultés de recrutement, la pharmacie de Castellane lance un appel
Face aux difficultés de recrutement, la pharmacie de Castellane lance un appel à l'aide. - BFM DICI
Pendant l'été, le petit village de Castellane (Alpes-de-Haute-Provence), voit sa population décupler. Muriel Chanut, pharmacienne, ne pourra pas dire le contraire. Dans son officine, elle accueille des centaines de clients par jour pour des coups de soleil, piqûres d'insectes ou autres problèmes.
Seul souci, cette dernière est la seule titulaire de la pharmacie et doit donc être constamment présente, malgré la présence de deux préparateurs de commandes, qui sont là pour l'aider. Une situation commence à peser pour cette professionnelle, qui cherche désespérément à embaucher depuis trois ans.
"Je travaille entre 110 et 120 heures par semaine"
Muriel a repris l'officine il y a trois ans maintenant, sans se douter de la charge de travail, bien qu'elle soit dans le métier depuis près de dix ans.
"C'est très compliqué d'embaucher et le problème c'est que si on n'a pas de pharmacien une pharmacie ne peut pas ouvrir. Ça fait trois ans que je cherche à embaucher car le pharmacien qui était avec moi à temps partiel devait partir en retraite", explique-t-elle à BFM DICI.
Le souci, c'est qu'elle a donc récupéré les horaires de son ancien collaborateur depuis plus de six mois. "Avec les gardes, je travaille non-stop: 13 jours sur 14 et je travaille entre 110 et 120 heures par semaine", regrette-t-elle.
Une situation devenue insupportable. "Sur l'année, je suis une semaine sur deux de garde donc ça concerne les nuits, les week-ends et les jours fériés je dois pouvoir ouvrir en cas de besoin et en été c'est garde non-stop, 7 jours sur 7 , 24/24 heures pendant neuf semaines et on ne peut pas s'éloigner à plus de dix minutes de la pharmacie", ajoute la patronne.
"Depuis trois ans je n'ai pas pris plus de trois jours de vacances cumulées. C'est difficile d'avoir une vie à côté", ajoute-t-elle.
Une couverture de quinze villages assurée
Si elle en est là aujourd'hui, c'est aussi dû au fait que la pharmacie de Castellane couvre un gros secteur: à savoir 15 villages sur un rayon de 40 à 50 kilomètres. Alors qu'en moyenne une pharmacie couvre deux à trois villages.
"En 2023 j'ai dû intervenir 315 fois la nuit et 287 fois les dimanches! Ça devient compliqué", précise Muriel Chanut.
Une situation qui n'est pas isolée dans le département comme l'explique Michel Escoffier président du syndicat des pharmaciens des Alpes-de-Haute-Provence.
"C'est dû à plusieurs phénomènes, sur les trois dernières années, sur les 150 étudiants en pharmacie, il n'y en a que 20% qui feront officine. C'est très dur de recruter dans nos départements et du fait qu'il y a beaucoup de pharmaciens qui cherchent des assistants, les prix demandés explosent et une petite pharmacie ne peut pas se payer le luxe d'avoir un assistant qui va leur coûter tous leurs bénéfices", explique-t-il.
Alors face à ce problème, les syndicats n'ont plus beaucoup d'options. "La solution, c'est d'avoir plus de pharmaciens qui sortent de la faculté et de redonner un attrait à la pharmacie d'officine. C'est-à-dire que les pharmacies puissent gagner assez bien leur vie pour payer les assistants de manière décente et tant qu'il n'y aura pas ça le problème perdurera..", ajoute Michel Escoffier.
"Je ne sais pas combien de temps je vais tenir"
De son côté, Muriel Chanut a fait tout ce qu'il était possible pour trouver un assistant. Pourtant aujourd'hui le poste reste toujours vacant.
"Je ne sais pas combien de temps je vais tenir honnêtement", explique la docteure en pharmacie.
Pourtant elle n'a pas vraiment le choix en tant que responsable d'un bassin de population aussi important. Une fermeture est inenvisageable pour plusieurs raisons et notamment par rapport à la distance.
"Ça en arriverait à une situation catastrophique, Saint-André-les-Alpes est la pharmacie la plus proche mais ils sont dans la même situation. C'est très problématique pour ces petites pharmacies de village où ils sont seuls en zone rurale", explique le président du syndicat des pharmaciens des Alpes-de-Haute-Provence.
"On va dégrader notre maillage rural qui fait notre force et si la pharmacie s'éteint c'est tout le système de santé qui va s'effondrer avec", ajoute Michel Escoffier.
À ce jour, le poste de pharmacien est toujours vacant pour tout renseignement ou candidature spontanée. Il est possible d'envoyer un mail à pharmacastellane@gmail.com.