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Un mois après la disparition de Lina à Plaine, où en est l'enquête?

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Pleinement consacrés à cette affaire, des gendarmes épluchent les données téléphoniques, mènent des fouilles et recoupent les témoignages pour retrouver l'adolescente alsacienne.

Un mois que l'adolescente n'a pas donné signe de vie. Lina, 15 ans, a disparu le samedi 23 septembre, dans la vallée de Bruche, dans le département du Bas-Rhin. Ce matin-là, elle quitte son domicile de Plaine et marche en direction de la gare de Saint-Blaise-la-Roche via une zone boisée. Elle devait prendre un train et rejoindre son petit ami à Strasbourg. Mais cette gare, l'adolescente ne l'a jamais atteinte et son téléphone s'est arrêté de borner à 11h22.

Depuis, une enquête pour disparition inquiétante a été ouverte. Puis, au bout de sept jours, une information judiciaire des chefs "d'enlèvement" et de "séquestration", donnant à cette affaire un possible tournant criminel. Si aucune piste n'a été confirmée ni écartée par les enquêteurs, les investigations se poursuivent à l'abri des regards.

Où est passée Lina? L'inquiétante disparition d'une ado de 15 ans
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• Une enquête pour "enlèvement" et "séquestration"

D'abord confiée à la procureure de Saverne, cette enquête est aujourd'hui pilotée par deux juges d'instruction depuis Strasbourg.

"Ce changement de cadre procédural marque une nouvelle phase de l'enquête, qui s'oriente vers des investigations de longue haleine", prévient Yolande Renzi, la procureure de la République de Strasbourg, désormais compétente dans cette affaire.

Avec la qualification d'infraction, les deux magistrats strasbourgeois ne seront "pas limités dans les moyens et dans le temps." Elle leur permet "d'aller plus loin avec les commissions rogatoires", indique Me Olivier Pardo, avocat pénaliste au barreau de Paris et ancien juge d'instruction à BFMTV.com. Cela permet aussi aux enquêteurs d'élargir leurs recherches à l'étranger.

• Les gendarmes se concentrent sur la téléphonie

Dans la commune de Plaine, où vit l'adolescente, les enquêtes opérationnelles de terrain se sont arrêtées. Dès les premières heures après le signalement de la disparition, plusieurs cours d'eau ont été sondés, des véhicules et des maisons fouillées et des kilomètres de terrain ratissés. Pourtant, toujours aucune trace de Lina.

L'enquête est aujourd'hui menée par 19 gendarmes d'une cellule d'enquête régionale, qui s'y consacrent pleinement. "Il y a la prise en compte de l'ensemble des bornages téléphoniques, le jour même, dans le créneau horaire", indique François Daoust, ancien directeur de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN).

Ces analyses poussées ont pour but de recouper les passages dans la zone de recherche en question, à savoir le secteur de la route D350. C'est autour de cet axe que Lina s'est volatilisée.

Les enquêteurs se concentrent également sur les bornages "les jours d'avant et les jours d'après, pour voir si certaines personnes, qui avaient l'habitude de passer, ne passent plus", précise l'ancien directeur de l'IRCGN. L'objectif est "d'interroger pour susciter des témoignages, afin de savoir s'ils ont vu quelque chose, quelqu'un, un véhicule ou la petite Lina".

• Les enquêteurs recoupent les témoignages

Les enquêteurs s'affairent aussi à étudier la cohérence des témoignages recueillis. Depuis la disparition de l'adolescente, le 23 septembre dernier, plusieurs sont arrivés sur la table des gendarmes.

"Deux témoins ont vu Lina sur le trajet de la gare entre 11h15 et 11h30", a indiqué la procureure de Saverne, Aline Clérot.

Un témoin évoque la présence d'un homme dans une voiture grise, quelques jours avant la disparition de Lina, qui aurait tenté d'approcher l'adolescente. "Je l'ai vue passer, là, dans une voiture bleue", a témoigné un autre homme auprès de différents médias.

"Elle avait l'air normale, elle n'avait pas l'air soucieuse ou quoi", poursuit-il, ajoutant qu'elle lui avait fait coucou. Selon lui, c'est un homme qui conduisait le véhicule qui a pris la direction opposée à celle de la gare.

C'est avec ces témoignages en tête que les enquêteurs se sont tournés vers un modèle de véhicule en particulier: une Renault Clio de couleur sombre, bleue ou grise. Sur le terrain, des techniciens en identification criminelle ont réalisé des relevés de traces ADN sur une demi-douzaine de ces voitures.

Un élément à prendre en compte d'autant plus que le témoignage est en partie corroboré par les images de vidéosurveillance, sans pour autant que la plaque d'immatriculation ne soit visible. D'où la multiplication des vérifications.

Les enquêteurs ont enfin fouillé minutieusement une maison à Diespach, devant laquelle stationnait une Renault Clio. À ce stade, son propriétaire, qui a été interrogé, n'est pas considéré comme un suspect.

• À Plaine, "la vie continue" malgré tout

Dans la commune de Plaine, le retour à la normale se fait progressivement malgré l'absence d'avancées concrètes dans l'enquête.

"C'est malheureux, mais la vie continue", répond, l'air grave, un chauffeur de bus scolaire, qui connaît bien la famille de Lina, auprès de BFM Alsace.

Par solidarité avec la mère de la disparue, qui a décidé de ne plus s'exprimer dans les médias, il ne commentera pas plus la situation. Ils sont nombreux à ne plus vouloir s'exprimer au micro. Certains disent que consigne a été donnée par les gendarmes de ne plus s'adresser à la presse afin de ne pas nuire à l'enquête.

Beaucoup de ceux qui se sont exprimés le regrettent. Notamment Zoé, la collègue de Lina, qui n'accepte plus aucune interview depuis son passage dans l'émission Touche pas à mon poste. Celui-ci lui aurait valu des remontrances du cercle proche de Lina.

Dans la vallée, certains vivent désormais dans l'angoisse. D'autant que les événements comme cela ne s'y produisent quasiment jamais.

"Le matin, à l'entrée de l'école, s'il y a un visage inconnu, une plaque d'immatriculation inconnue, il y a des regards suspicieux", précise Matthieu Chanvillard, journaliste pour BFM Alsace, qui a suivi l'affaire depuis le départ.

"Ici, on nous dit qu'on vit dans la crainte. On emmène les enfants à l'école là où on les laissait y aller à pied."

Selon un armurier basé à Schirmeck, les ventes de bombes anti-agression ont bondi depuis la disparition de Lina. L'illustration, selon lui, du stress qui s'est emparé de la commune de Plaine.

Martin Regley Journaliste