"Préoccupant et problématique": le directeur de Sciences Po Strasbourg revient sur plusieurs mois de tensions

C'est une guerre larvée, qui déchire depuis six mois Sciences Po Strasbourg. En cause, le renouvellement du partenariat liant le campus à l'université Reichman de Herzliya en Israël, suspendu quelques mois auparavant dans un contexte de conflit à Gaza. Les étudiants qui y sont défavorables déplorent la position "pro-guerre" de l'établissement et ses liens avec l'armée israélienne.
Après cette décision controversée, cinq enseignants-chercheurs avaient annoncé démissionner du conseil d'administration. Depuis, des blocages intermittents et même les interventions des forces de l'ordre se succèdent régulièrement au sein de l'institut de sciences politiques strasbourgeois.
Une "image de Sciences Po qui ne correspond ni à ses valeurs ni à sa tradition d'ouverture"
Alors que le dialogue semble pour l'heure rompu entre direction et étudiants, Jean-Philippe Heurtin, le directeur de l'établissement, s'exprime pour la première fois face caméra, dans un entretien accordé à BFM Alsace, et diffusé ce jeudi 6 mars. Le chef de Sciences Po Strasbourg continue d'y défendre le partenariat avec l'université israélienne.
"L'université Reichman, qui est une université privée, a été, pendant quelques années spécialisée dans les questions de sécurité. Je considère qu'à Sciences Po Strasbourg il y a autant de généraux, de membres de renseignements qui sont passés dans nos murs qu'à Reichman", justifie-t-il.
"Le nombre de délits ou de crimes antisémites en France et en Europe a augmenté d'une manière très significative. Je ne vois pas le problème que des élèves qui vont se consacrer à la diplomatie israélienne se préoccupent de défendre l'image d'Israël et l'image des juifs de la diaspora partout où ils sont", déclare-t-il.
"Depuis le 6 janvier, nous subissons des blocages intermittents", fustige-t-il, regrettant une "image de Sciences Po qui ne correspond ni à ses valeurs ni à sa tradition d'ouverture, d'exigence intellectuelle, de solidarité". "Je trouve ça très préoccupant, très problématique pour l'école dans son entier", ajoute-t-il.
Vers une sortie de crise?
Quant aux interventions des forces de l'ordre, Jean-Philippe Heurtin assure ne pas y être "favorable", "surtout dans les enceintes universitaires", soulignant avoir demandé "personnellement à la présidence de l'université et à la secrétaire générale" de ne pas les faire intervenir.
Quid de l'avenir? "Il faudra bien, une fois la page tournée, que l'on puisse à nouveau rediscuter et travailler ensemble", espère-t-il.
Après plusieurs mois de tractations, une porte de sortie semble bien se dessiner à Sciences Po Strasbourg. Une commission paritaire entre étudiants et professeurs doit voir le jour pour réexaminer le bien-fondé du partenariat avec l'université israélienne. Un dernier vote au Conseil d'administration sera organisé en avril.