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"C'est du cinéma sur petit écran": Mayamystic, la Française numéro 1 sur Youtube, qui cartonne auprès des Américains

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Mayamystic cumule plus de 11,3 millions d'abonnés sur Youtube, ce qui la classe dans le panthéon des youtubeurs français les plus suivis. Pourtant, la cosplayeuse reste relativement méconnue du grand public... pour son plus grand plaisir.

"Je suis complètement incognito en France", plaisante Mayamystic. "C’est rare qu’on me demande des photos ou qu’on me reconnaisse dans la rue." Pourtant, la jeune femme, ancienne accompagnante éducative et sociale, est loin d’être une inconnue. La Bordelaise cumule plus de 11,3 millions abonnés sur Youtube. Un chiffre impressionnant, qui la classe directement parmi les cinq vidéastes français les plus suivis de la plateforme.

Mais Mayamystic l’assure: elle n’a rien à voir avec ces gros créateurs de contenus. Son truc à elle, c’est le cosplay, une pratique qui consiste à incarner un personnage de son choix, des pieds à la tête, mais aussi dans l’attitude.

Bob l’éponge, Garfield et Marge Simpson

"J’ai commencé le cosplay en 2016. Je n’avais pas les moyens de m’acheter des tenues donc je fais avec ce que j’ai déjà chez moi", se remémore-t-elle à Tech&Co.

"Je ne suis pas une grande couturière", assure Mayamystic. "Alors je fais surtout de la personnalisation." Pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, la créatrice de contenus imagine un costume, chine les pièces, coud, imprime, découpe pour donner vie à ses héros de cartoons préférés.

Au programme, des cosplays de Bob l’éponge, de Tom et Jerry ou encore de Crazy Frog et de Marge Simpson. Pour cela, elle découpe du carton pour créer les yeux blasés de Garfield, détourne des chaussettes pour en faire des pattes de loups et utilise une couette pour reproduire la queue de Sandy l’écureuil (Bob l’éponge). "Sandy, c’est ma préférée. J’adore quand c’est loufoque", s’exclame-t-elle. Au total, la vidéaste a créé plus d’une centaine de costumes. "Je peux les faire interagir entre eux et c’est ce côté 'mise en scène' que j’adore."

Passionnée de cartoons jusqu’au bout des ongles, le salon de la jeune femme est d’ailleurs rempli de peluches en tout genre, elle décide alors de poster quelques-unes de ses réalisations sur les plateformes. "Au début, j’ai commencé à poster des vidéos sur Musical.ly, l’ancêtre de Tiktok. Mais elles n'étaient même pas en public, c’était juste pour moi", détaille la créatrice de contenus.

Les Shorts, une stratégie gagnante

Mais quand en 2021, Youtube lance son format Shorts, des formats courts en vidéo, la jeune femme est intriguée. "Je me suis dit: pourquoi ne pas tenter de poster mes vidéos là-dessus?"

Parfois plusieurs fois par jour, la Bordelaise se présente à la caméra habillée "normalement". Puis, sur une chanson ou un enregistrement connu, elle débarque en cosplay et crée des saynètes amusantes. Le tout, en moins de 30 secondes. "Je ne m'attendais à rien en retour, c’était pour mon plaisir personnel. Et ça a cartonné", pétille-t-elle.

En effet, les Shorts de Mayamystic dépassent régulièrement le million de vues. Certains caracolent même à 93 millions de vues. Au total, ses contenus cumulent plus de 5,8 milliards de vues sur Youtube, selon le site Socialblade. À titre de comparaison, les publications d’Inoxtag (8,85 millions d'abonnés) cumulent 1,2 milliard de vues sur la plateforme. Une ascension fulgurante pour celle qui a commencé l’aventure Youtube il y a trois ans.

"J’ai un peu de mal à réaliser", admet la vidéaste. "Ca s’est fait un peu par hasard. Je n’ai pas vraiment d’objectif pour que ça fonctionne. Je filme purement par plaisir", insiste celle qui souhaitait devenir actrice.

Du cinéma sur petit écran

"Jouer dans un film ou faire de l’acting, c’est un de mes rêves. Mais plutôt à la Jim Carrey ou à la Charlie Chaplin, en passant principalement par le geste", raconte la vidéaste. Elle souffre de dysphasie, un trouble de la parole qui l’empêche de s’exprimer correctement "sans bégayer". Mais pas de quoi miner le moral de la jeune femme qui voit en Youtube une façon de réaliser son rêve.

"Dans mes vidéos, je fais de l’acting avec mes personnages. C’est du cinéma, mais sur petit écran et de chez moi", sourit-elle. "Il y a une multitude de chemins qui mènent à nos rêves. J'avais deux options: poursuivre dans le social ou lâcher mon boulot pour les cosplays. J'ai fait le choix loufoque et ça a payé."

Un moyen d’atteindre ses objectifs donc, et surtout, de grandir sur Youtube. En effet, la totalité des vidéos de la youtubeuse sont donc sans paroles. Seuls des audios musicaux, ou en anglais, sont réutilisés, ce qui lui permet de "se faire comprendre partout dans le monde seulement grâce aux gestes et aux mimiques" et donc, de toucher une audience internationale. Sa communauté est d’ailleurs composée principalement d’Américains, de Brésiliens et de Mexicains. Les Français, eux, n’arrivent qu’en quatrième position.

"C’est Youtube le patron"

"Mais j’évite de trop regarder les statistiques ou les chiffres", note Mayamystic.

"Youtube, c’est mon patron. Mais les audiences, c’est un peu les montagnes russes" confie la youtubeuse. "Quand d'un coup, tu as des chutes de vues car l'algorithme ne te met pas en avant, et tu ne sais même pas pourquoi, ça peut faire mal. (...) Ça m’angoisse."

En effet, malgré des statistiques à faire pâlir les plus grandes têtes d’affiche de la plateforme, la youtubeuse peine en effet à attirer les annonceurs, plus intéressés par les vidéos long format. Pour le moment, elle n’a réalisé que quelques partenariats avec des jeux vidéo, exclusivement sur son compte Tiktok. Elle dépend donc principalement des caprices de l'algorithme de Youtube.

"Mes vidéos durent moins d’une minute. Ça fait une très faible rémunération. Alors pour avoir un revenu correct, je dois publier tous les jours. C’est un boulot où je ne m’arrête jamais", souligne-t-elle.

"Je ne me sens pas à ma place dans le classement"

Et c’est vrai que Mayamystic ne chôme pas. Elle tourne une quarantaine de vidéos pour chaque cosplay qu’elle invente. De la recherche d’idées, à la réalisation du cosplay, en passant par le montage, les photos ou les sous-titres…

"Je fais tout solo", lance-t-elle. "En général, j’ai besoin de 4 à 5 jours pour filmer toutes les vidéos d’un seul cosplay."

Un rythme de vie effréné, qui lui a parfois joué des tours. "J’ai développé un zona et j’ai perdu un peu de vue à cause des lentilles. Depuis, j’ai réduit mes horaires de travail et je me suis imposée un planning et du temps de repos", résume la jeune femme.

D'autant que la popularité n'est pas toujours facile à gérer. "Je ne me sens pas forcément à ma place dans le classement des youtubeurs français", accorde Mayamystic. "En France, on ne connaît pas les youtubeurs Shorts et encore moins le cosplay. Alors j’ai souvent le droit à des commentaires haineux qui me demandent ce que je fais là", s’attriste-t-elle. "Je n'aime pas trop le fait d'être aussi connue", glisse la star. "Moi, je préférerais qu'on me laisse dans ma petite bulle de passionnés."

Mais pas de quoi entamer ses rêves de grandeur. "Ca ne m’arrêtera pas", tranche la vidéaste. La jeune française aimerait se rendre au Comic Con américain pour "rencontrer sa communauté américaine dans la vraie vie". Elle ne ferme pas non plus la porte aux formats longs sur Youtube, qu’elle a déjà commencé à tester, ou à une aventure sur Twitch. "J’y réfléchis. Mais encore une fois, ça me prend encore une fois beaucoup de temps."

Salomé Ferraris