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Fusillades aux États-Unis: les jeux vidéo en ligne de mire des Républicains

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- - Mark RALSTON / AFP

À la suite des tueries survenues à El Paso et Dayton, des élus républicains ont pointé du doigt la responsabilité des jeux vidéo. À ce jour, aucune étude ne prouve le lien entre goût pour ces jeux et comportements violents.

En l’espace de 13 heures, 29 personnes ont perdu la vie dans des fusillades à El Paso, au Texas, et à Dayton, dans l’Ohio. Et comme bien souvent aux États-Unis, un débat est revenu sur la table: celui du rôle des jeux vidéo dans l'explication de comportements violents. 

Interviewé sur Fox News le 4 août, Kevin McCarthy, le chef de file des représentants républicains à la Chambre, a fait un parallèle entre le mode opératoire des tireurs et les jeux vidéo, jugeant que ces derniers familiariseraient les joueurs à l'utilisation d'armes à feu.

Un "dénominateur commun"

D'autres élus républicains ont tenu un discours similaire. Ainsi de Dan Patrick, vice-gouverneur du Texas. "Je vois une industrie du jeu vidéo qui apprend aux jeunes à tuer”, a-t-il déclaré, toujours auprès de Fox News, ajoutant que le “jeu vidéo” était le "dénominateur commun" des fusillades. En février 2018 déjà, alors qu'une fusillade avait fait 17 morts dans un lycée de Floride, Donald Trump lui-même avait fustigé ces jeux, avant d'organiser à la Maison-Blanche une table ronde sur la violence dans l'industrie du jeu vidéo.

Pour de nombreux élus démocrates, pointer du doigt les jeux vidéo constitue une simple parade pour masquer d'autres problèmes bien plus ancrés dans la société américaine. "Les jeux vidéo ne causent pas de tueries de masse, le suprémacisme blanc, si", recadre Alexandria Ocasio-Cortez, représentante démocrate du 14ᵉ district de New York à la Chambre des représentants des États-Unis, en critiquant le fait que les Républicains ne veuillent pas froisser une partie de leur base électorale.

"Si l’État islamique avait revendiqué les trois tueries de masse de cette dernière semaine, les troupes américaines seraient déjà en chemin pour la Syrie", juge de son côté Daniel Pfeiffer, ancien directeur de la communication de la Maison-Blanche, sous l’administration Obama. Pour ce genre de tueries, "les Républicains se contentent de parler de jeux vidéos violents", complète-t-il. 

En février, une étude de l'Oxford Internet Institute avait démenti l'existence de tout lien entre jeux vidéo et comportements violents chez les adolescents. Par ailleurs, et bien que d'autres éléments d'enquête soient encore attendus, rien ne prouve à ce jour que les deux tueurs aient eu un penchant particulier pour ces jeux. Le tireur d'El Paso, Patrick Crusius, 21 ans, avait en revanche publié sur 8chan un manifeste mentionnant une "invasion hispanique au Texas" avant de passer à l'acte, notent les autorités.

Le forum 8chan pointé du doigt

Ce forum, créé par des joueurs de jeux vidéo, est très rapidement devenu le point de ralliement du suprémacisme blanc en ligne et de courants masculinistes, antisémite, anti-immigration et anti-islam. 8chan s'avère également être un terreau de théories conspirationnistes. Il est l'un des rares forums de discussion à prôner une totale liberté d'expression, sans modération aucune. 

Y ont germé une complexe théorie du complot, QAnon, qui prédit une imminente arrestation de toute l'intelligentsia de gauche aux Etats-Unis, ou encore le "Pizzagate". Cette autre théorie, qui a pris une ampleur considérable lors de la dernière élection présidentielle américaine, faisait valoir l'existence d'un réseau pédophile organisé autour de John Podesta, l'ancien directeur de campagne d'Hillary Clinton. 

Le 15 mars, avant de fusiller 51 personnes à Christchurch (Nouvelle-Zélande), Brenton Tarrant avait publié sur 8chan un manifeste de plus de 70 pages évoquant un "génocide blanc". Un lien menait vers la vidéo en direct de son attaque. En raison de l'abandon de l'un de ses prestataires, Cloudflare, le site a été rendu inaccessible pendant quelques heures avant de réapparaître ce 5 août.

https://twitter.com/Elsa_Trujillo_?s=09 Elsa Trujillo Journaliste BFM Tech