Comment les soutiens d'Éric Zemmour collectent les données personnelles des internautes

Eric Zemmour le 24 septembre 2021 à Budapest - Attila KISBENEDEK © 2019 AFP
"Arrêtons ce racket organisé des Français! Vous aussi signez pour la suppression du permis à points". Ce 27 octobre, Eric Zemmour faisait la promotion d'une pétition en faveur de la suppression du permis à points, revenant sur l'une de ses propositions pour la présidentielle de 2022, à laquelle il n'est pas encore officiellement candidat.
L'ancien journaliste renvoie alors vers un site Web mis en ligne par Les Amis d'Eric Zemmour, association en charge du financement et de l'organisation de sa campagne.

Aucune case à cocher
Sur la plateforme, les internautes sont invités à renseigner leurs nom, prénom, adresse mail et code postal. Problème: contrairement à ce qu'exige le RGPD (réglement sur la protection des données), le formulaire n'apporte aucune précision quant à l'utilisation ultérieure des données personnelles des internautes, par exemple en affichant une case à cocher.

Selon l'article 6 du RGPD, la finalité du traitement des données doit en effet être clairement précisée au moment de la collecte. La demande de consentement doit par ailleurs être affichée "sous une forme qui la distingue clairement de ces autres questions, sous une forme compréhensible et aisément accessible, et formulée en des termes clairs et simples" selon le texte.
"Pour que le consentement soit légalement reccueilli, il faut au moins un autre acte positif que le simple fait de renseigner son adresse email", rappelle Alexandre Archambault, avocat spécialisé en droit du numérique, à BFMTV.
Plus problématique encore, l'envoi de mail de la part de l'équipe de campagne d'Eric Zemmour, qui constitue une autre finalité, et qui nécessiterait de fait un second consentement. Une pratique constatée par le journaliste Vincent Glad.
"C’est un détournement de finalité, car consentir à communiquer ses données pour une pétition ne signifie nullement consentir à être dans un fichier de soutiens d’une éventuelle candidature présidentielle", précise Alexandre Archambault, qui rappelle les sanctions encourues par une collecte déloyale des données personnelles: cinq ans d'emprisonnement et 300.000 euros d'amende.
Pétitions et modèles de plaintes
La pétition concernant la suppression du permis à point est loin d'être la seule source de collecte potentielle de données personnelles par l'équipe d'Eric Zemmour. A ce jour, ce sont au moins 44 noms de domaines qui ont été achetés par l'association, certains renvoyant vers un modèle de plainte adressé au CSA, ou encore vers un site dédié "aux jeunes LR" avec Zemmour.
Avec à chaque fois des formulaires à compléter, sans aucune case à cocher pour récolter le consentement des internautes.

Les équipes d'Eric Zemmour ne sont pas les premières à commettre des impairs lors de la collecte de données personnelles. En novembre 2020, le site dédié à la candidature Jean-Luc Mélenchon avait invité les internautes à partager leurs informations personnelles pour soutenir le chef de file de La France insoumise, en rendant impossible le refus de s'incrire aux newsletters du parti.
Après avoir ainsi collecté les données de quelque 120.000 internautes, les équipes en charge de la plateforme avaient finalement ajouté une seconde case à cocher, spécifique à l'envoi de la newsletter.
Contacté par BFMTV, Samuel Lafont, membre de l'équipe numérique de la campagne d'Eric Zemmour, refuse de détailler l'usage des données personnelles des internautes qui pourra être fait par la suite.