Records d'audience, polémiques, défis loufoques... Quand le succès de Beast Games bouleverse l'industrie du streaming

Malgré les nombreuses polémiques, Beast Games, la téléréalité de MrBeast dont le dernier épisode a été diffusé ce 13 février sur Amazon Prime, captive les internautes. Un succès qui aiguise l'appétit des acteurs du streaming.

Clap de fin pour Beast Games, la nouvelle téléréalité de tous les superlatifs lancée par le youtubeur numéro un MrBeast. Depuis ce jeudi 13 février, le dixième et dernier épisode du show est disponible sur Amazon Prime Vidéo.

Dans l'émission, 1.000 participants se sont affrontés dans une série d’épreuves, toutes plus folles les unes que les autres, pour remporter la coquette somme de 5 millions de dollars. Et, après avoir tiré à bout de bras un quad, s'être fait enfermer dans une cellule ou s'être fait traquer par la marine américaine, c'est finalement Jeffrey, alias joueur 831, qui a remporté le jeu. L'Américain, à la tête de deux entreprises d'aide à la personne, a empoché plus de 10 millions de dollars, la somme finale ayant été doublée lors du dernier épisode.

Des records d'audience...

Un gain record pour un jeu télévisé. Rien d'étonnant, puisque le youtubeur a vu les choses en grand pour son émission.

"Ça sera le plus grand jeu télévisé de l'histoire", prophétisait déjà MrBeast en mai dernier sur X, ex-Twitter. "L'un des épisodes devrait être aussi épique que l'intégralité de la série Squid Game."

Au total, la production du jeu a battu 40 records du monde. L'organisation du jeu lui aurait d'ailleurs coûté plus de 100 millions de dollars. "On a dépensé 14 millions de dollars pour construire une ville dans un champ pour que les participants y vivent et s’y affrontent", chiffre MrBeast.

Un investissement colossal, donc, qui a porté ses fruits. Dès le premier épisode, Beast Games s'est classé numéro un des tendances sur Amazon Prime Vidéo dans pas moins de 87 pays.

Comme le rapporte The Wrap, la téléréalité a attiré 50 millions de téléspectateurs au cours de ses 25 premiers jours, devenant ainsi la deuxième série la plus regardée d'Amazon en 2024 après Fallout.

... qui aiguisent l'appétit des plateformes

Ce succès a aiguisé l'appétit des acteurs du streaming. Selon Business Insider, plateformes et studios sont de plus en plus nombreux à courtiser les créateurs de contenu.

"Ils se sont rendus compte que leur public se recoupe largement avec celui qui regarde Youtube et ingère tout le contenu de Tiktok et d'Instagram", note un professionnel du secteur auprès du média américain.

Les agents recherchent des vidéastes pour incarner des émissions "non scénarisées" de sport, de voyage ou encore des spectacles en direct. Avec un objectif: miser sur l'authenticité et le succès des vidéastes pour attirer une cible plus jeune. "Les créateurs vont avoir de plus en plus l'occasion de collaborer avec des grandes plateformes de streaming", analyse Jon Skogmo, PDG de Lost iN, une société de médias. "Je sais que les producteurs indépendants leur proposent des émissions."

Pour le moment, les émissions portées par des youtubeurs ne représentent qu'une petite partie des commandes. Selon Adam Wescott, producteur, Hollywood privilégie pour le moment des "tests ponctuels, plutôt que des accords globaux entre diffuseurs et créateurs".

Mais l'industrie est déjà en ordre de marche. Pour preuve, en janvier dernier, Netflix a annoncé avoir racheté les droits de diffusion de certaines vidéos de Ms Rachel, suivie par 13,3 millions d'abonnés sur Youtube. La créatrice de contenus propose des chansons et des leçons pour aider les enfants à améliorer leur diction. La plateforme a également diffusé le combat du youtubeur Jack Paul VS Mike Tyson. Un véritable succès. Le direct a été suivi par 65 millions de foyers.

"Je trouve que les contenus de courte durée sont également un excellent vivier", expliquait ainsi Ted Sarandos, le PDG de Netflix, lors de l'annonce des résultats du quatrième trimestre de l'entreprise.

Selon un expert du secteur interrogé par le média américain, Amazon, encouragé par les audiences des Beast Games, envisage également de miser davantage sur les créateurs à grosse audience. "Lorsqu'ils se lancent, ils veulent se lancer à fond", note-t-il. La plateforme avait ainsi déboursé 100 millions de dollars pour avoir l'exclusivité des Beast Games.

De nombreuses polémiques

Mais miser sur une célébrité est un pari risqué. Le lancement des Beast Games a suscité tout un lot de polémiques. Avant même le début de la diffusion, plusieurs candidats anonymes ont notamment décidé de porter plainte au nom de tous les participants le 16 septembre pour "mauvais traitement chronique et harcèlement sexuel". Ils affirment avoir été "exploités sans vergogne", ne pas avoir été payés et avoir été soumis à des conditions dangereuses.

La sortie des différents épisodes a également suscité des critiques acerbes. Certains voient dans ces jeux une façon de créer du divertissement en utilisant la misère des gens.

"Cette nouvelle émission de MrBeast est une sorte de connerie dystopique à la Hunger Games", fustige un utilisateur sur X. "La moitié des ‘challenges’ sont des expériences sociales et psychologiques. Le 'divertissement' consiste uniquement à regarder des personnes pauvres souffrir."

De son côté, le média britannique The Guardian qualifie l’émission de "cauchemar dystopique parfait pour l’Amérique de 2025", rappelant le caractère humiliant de certaines épreuves et le manque d’empathie de l’animateur. Les candidats éliminés voient en effet leur rêve s’effondrer sous les rires de MrBeast.

Mais pas de quoi entacher les statistiques du programme et l'enthousiasme de ses producteurs. Le show récolte l'excellente note de 89% de la part du public sur Rotten Tomatoes. L'influenceur aux 361 millions d'abonnés a d'ores et déjà évoqué une potentielle saison 2.

"On m’a dit de ne pas parler de [la saison 2 et la saison 3]", a ainsi plaisanté le vidéaste lors d’une interview sur la chaîne Colin and Samir. "J’adore ce qu’on a fait avec Beast Games. Je vais le refaire. J’ai adoré travailler avec Prime Video, donc je suis certain qu’on va le faire avec eux. À 100 %. Il n’y a pas moyen que ça ne se fasse pas."

Salomé Ferraris