Effondrements de la rue d'Aubagne: jusqu'à trois ans de prison ferme requis au procès

Le site où deux immeubles se sont effondrés en 2018, rue d'Aubagne à Marseille, le 16 octobre 2019 - GERARD JULIEN © 2019 AFP
Trois ans de prison ferme ont été requis jeudi 12 décembre contre Julien Ruas, adjoint au maire de Marseille Jean-Claude Gaudin au moment de l'effondrement mortel d'immeubles rue d'Aubagne en 2018, que le procureur estime être un "auteur indirect" du drame.
Julien Ruas, alors en charge de la police des immeubles en péril, est pour le vice-procureur Michel Sastre "un auteur indirect du drame par son comportement blâmable, inadmissible": "C'est quoi la proactivité? Ces 40.000 logements insalubres (dans Marseille) il fallait les chercher, on ne l'a pas fait".
Cinq ans de prison, dont deux avec sursis ont également été requis contre Xavier Cachard, alors vice-président LR du conseil régional et propriétaire qui détenait la majorité des parts de la société Soroyem propriétaire d’un logement au 65 rue D’aubagne.
Un drame qui "ne doit rien au hasard"
Fait surprenant, les réquisitions ont été faites à deux voix puisque le procureur de la République de Marseille, Nicolas Bessone, s'est chargé en personne de l'introduction, tandis que le vice-procureur Michel Sastre a prononcé les réquisitions.
"Ces effondrements ne doivent rien à la fatalité, au hasard et encore moins à la pluie", a insisté Nicolas Bessone. "Cette catastrophe est venue apporter un terrible éclairage sur l'habitat indigne dans la cité phocéenne, d'un chaos silencieux à une réalité criante", a-t-il ajouté.
Trois ans de prison dont un avec sursis et 45.000 euros d'amende ont par ailleurs été requis contre Richard Carta, l'architecte qui avait expertisé l'immeuble moins de trois semaines avant son effondrement et bouclé sa visite en une heure. Il "a été ce soir-là un expert pressé, un expert qui a failli à la rigueur professionnelle de la réalisation de sa mission, commettant de graves manquements", selon Michel Sastre. Une interdiction de réaliser des expertises a également été requise contre Richard Carta.
Sur les copropriétaires, cités à comparaître directement par les parties civiles, Michel Sastre s'est dit "face à une situation inédite: requérir contre des personnes que le parquet n'a pas poursuivies". Pour autant, "ils avaient tous connaissance des problèmes structurels de leur immeuble, ils avaient pour objectif de jouer la montre, dépenser le plus tard possible et le moins possible", a regretté Michel Sastre, pour qui ils sont coupables de "manquements graves". 100.000 euros d'amende ont ainsi été requis à l'encontre du syndic Liautard.
Pour rappel, seules deux personnes physiques et deux morales ont été poursuivies dans cette affaire avant la tenue du procès.
"Il a été bon que les personnes physiques derrière les personnes morales soient citées par les parties civiles", souligne le procureur, prenant l’exemple de l’ancien conseiller régional Xavier Cachard. Le procureur a terminé avec une comparaison du livre Le Crime de l'Orient Express d'Agatha Christie, dans lequel chacun des suspects "a porté le coup de couteau mortel".