Retraite à 65 ans, allocations chômage, 100 milliards d'économie… Le programme pas très "RN compatible" d'Eric Ciotti

"Les Français ne voient pas le cordon sanitaire, ils veulent des réponses." Ce mardi, le président des Républicains (LR) Eric Ciotti a ainsi justifié son accord électoral avec le Rassemblement National (RN) en vue des élections législatives du 30 juin prochain.
Reste à savoir quelles peuvent être ces réponses sur le plan économique tant le logiciel du président de LR semble aux antipodes de celui qui inspirait le programme de Marine Le Pen en 2022.
Pour rappel, Eric Ciotti était candidat en 2021 pour l'investiture LR à la présidentielle. Son programme baptisé "Pour que la France reste la France" détaille un certain nombre de mesures économiques d'inspiration libérale qui pourrait rappeler celui de François Fillon en 2017.
L'ex-candidat se prévalait de son sérieux budgétaire ironisant sur le bilan d'Emmanuel Macron, ce "Mozart de l’économie" comme il le qualifiait, avec ses "3000 milliards d'euros de dette" et son "record de dépenses publique à 60% du PIB".
Pour le président de LR, le redressement de la France passait donc par une réduction de 100 milliards d'euros de dépenses publiques en cinq ans. Pour y parvenir il envisageait de réduire de 250.000 le nombre de postes de fonctionnaires (hors fonction publique hospitalière et régalienne) et de "faire revenir les fonctionnaires aux 39 heures, payées 38 heures".
Rien de tel dans le programme du RN en 2022, bien au contraire. Marine Le Pen envisageait au contraire de sortir le carnet de chèques avec 68,3 milliards d'euros de dépenses supplémentaires annuelles selon ses calculs (mais plus proche des 120 milliards selon l'Institut Montaigne).
Aux antipodes sur les retraites
Hormis le programme de Jean-Luc Mélenchon, celui de la candidate RN était le plus éloigné des propositions d'Eric Ciotti sur le plan budgétaire.
En particulier à cause de la réforme des retraites. Là où le candidate souhaitait réinstaurer un âge de départ à 60 ans pour les carrières longues et conserver les "62 ans" pour les Français entrés dans la vie active après 25 ans, le patron de LR souhaitait une réforme plus radicale que celle entrée en vigueur l'année dernière.
Son projet contenait un relèvement de l'âge de départ à 65 ans en 2027 (contre 64 ans aujourd’hui), un dispositif carrière longue ne donnant pas accès à un départ avant l'âge de 63 ans, l'alignement des retraites du public sur ceux du privé et la suppression des régimes spéciaux. Hormis l'indexation des retraites sur le coût de la vie comme chez Marine Le Pen, les deux projets étaient à l'opposé l'un de l'autre.
Concernant les questions de travail et d'emploi, deux philosophies très différentes s'opposent. Marine Le Pen s'est par exemple opposée à deux réformes clés de l'actuelle majorité, à savoir le durcissement des règles de l'assurance-chômage ou encore celle de France Travail avec le conditionnement du versement du RSA. Le RN dénonçant même une culpabilisation des allocataires ou craignant qu'"une cohorte de cinquantenaires au RSA [arrive] sur le marché" selon les mots de Marine Le Pen le 30 mai dernier sur FranceInfo.
Deux visions opposées
Des propos que n'a guère du goûter l'ex-candidat à l'investiture LR. Dans son programme de 2021, Eric Ciotti "pour encourager le travail" souhaitait mettre fin au "totem des 35 heures", "réduire de 20% les allocations chômages au bout de 12 mois, puis de nouveau de 20% au bout de 18 mois" ou encore "imposer des contreparties au RSA en travail d’utilité collective". Difficile de faire plus différent du RN.
Sur la fiscalité, si les deux ex-candidats étaient globalement en accord pour réduire la pression fiscale notamment sur les droits de succession et les donations ou encore les impôts de production des sociétés, on peut relever quelques différences.
Alors que Marine Le Pen souhaitait "exonérer d'impôt sur le revenu les jeunes jusqu'à 30 ans", Eric Ciotti plaidait pour un élargissement de la base imposable (les seuls revenus inférieurs au Smic ne seraient pas imposés) et l'instauration d'un taux unique d'imposition de 15% pour tous.
Finalement, si les deux programmes économiques se retrouvent sur quelques points comme la baisse de la fiscalité sur les carburants ou certains allègements de charges, ils traduisent toutefois deux visions économiques antinomiques: l'une très interventionniste fondée sur la relance par la consommation (celle du RN), l'autre axée sur la baisse de la dépense publique et le désengagement de l'Etat (celle de LR).
