EDITO. Suppression d’un tiers des agences de l’État: une promesse crédible?

La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a annoncé dimanche 27 avril sur CNews la suppression ou la fusion d’un tiers des agences de l’État dès l’an prochain et deux à trois milliards d'économies. Cette annonce spectaculaire soulève cependant une question essentielle: est-elle réellement crédible?
Un programme ambitieux... sur le papier
Il faut dire qu'il y a de quoi faire. L’État français compte 103 agences autonomes (Ademe, AFD…) et 434 opérateurs chargés de mettre en œuvre les politiques publiques définies par l’État (France Travail, CEA, CNRS…), auxquels on pourrait ajouter 317 organismes consultatifs qui se limitent à donner un avis, les fameux comités Théodule.
Il est évident que dans le maquis administratif français, il existe des marges de manœuvre pour simplifier à tous les étages.
Les freins d’une réforme d’envergure
Mais... il y a un "mais". Il y en a même deux !
D’abord, fusionner des agences a toujours un coût financier. Les fusions prennent souvent plusieurs années pour devenir pleinement opérationnelles. On aligne toujours les salaires sur le haut de la fourchette et les audits, migrations informatiques et autres déménagements souvent nécessaires sont autant de frais supplémentaires.
Bref, aucune économie de court terme du côté des fusions, sauf à supprimer purement et simplement certaines agences, à la manière d'un Javier Milei ou d'un Elon Musk. Et là, le coût n’est plus financier, mais politique.
Or, sans majorité à l’Assemblée nationale et à deux ans de la présidentielle, on a du mal à voir comment le gouvernement compte s'y prendre.
Une prudence justifiée
Je salue l’enthousiasme et le volontarisme de la ministre, mais j’ai effectivement quelques doutes sur l’atterrissage final. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut rien faire!
Il faut fusionner quand cela a du sens et avoir le courage de tailler dans les dépenses non indispensables.
Mais quand je vois qu’en janvier, le gouvernement n’a même pas eu le courage de fermer l’Agence Bio, qui est la plus petite des agences de l’État, je préfère rester prudent face aux annonces de grand soir.
Une promesse qui s’éloigne déjà
D’ailleurs, hier soir, l’entourage de la ministre nuançait déjà son propos. Le "quantum" d’économies est visé pour l'horizon 2027. Il ne s’agira pas d’un tiers d’agences supprimées, mais d’agences qui "fonctionneront différemment" dès l’année prochaine. Et aucun objectif chiffré en termes de suppression d’emplois n’a été fixé.
Il va bien falloir faire des efforts quelque part quand même. Nous n’avons plus le choix. Matignon et Bercy sont à la manœuvre: ils épluchent actuellement tous les rapports de mission demandés aux directeurs d’administration pour faire le tri entre l'essentiel et le superflu. Ces documents ont également été transmis aux parlementaires.
Matignon promet de mobiliser "l’ensemble des leviers de transformation: mutualisation, rationalisation, remembrement, abandon d’activités et déconcentration". De grandes ambitions... Mais, pour l’instant, on demande encore à voir.