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L Edito de Raphael Legendre

EDITO. Agences de l’Etat: quelles économies possibles?

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L'EDITO DE RAPHAËL LEGENDRE. La commission d’enquête sénatoriale sur les missions des agences, opérateurs et organismes consultatifs de l’État, a auditionné hier plusieurs agences ... Faire le ménage est important mais ce ne sera pas la martingale budgétaire dites-vous ce matin.

C’est une vieille et mauvaise habitude de la haute fonction publique en général et des budgétaires en particulier. Au sommet de l’Etat, on cherche souvent la martingale, le coup de génie qui résoudra tous les problèmes d’un coup. La rationalisation des agences de l’Etat, c’est un peu ça. C’est l’Arlésienne de la République.

Chaque année, on se dit qu’il y a du gras à tailler et qu’on va pouvoir réaliser des milliards d’économies. En plus, c’est plutôt populaire auprès de l’opinion publique, alors pourquoi se gêner?

D’ailleurs, il n’y a pas qu’au gouvernement qu’on lorgne du côté des agences. Le RN propose la suppression ou la fusion de près de 80 agences et opérateurs pour faire huit milliards d’économies. Chez Les Républicains, on défend un plan de 50 milliards d'euros d'économies, incluant la réduction administrative et la lutte contre "l’assistanat".

Sauf qu'en réalité, c’est un peu comme la lutte contre la fraude à gauche, une solution de facilité mis à toutes les sauces, mais pas vraiment crédible.

N'y a-t-il pas d’économies à faire pour autant?

Très probablement, oui. Et des contrôles à opérer. La France compte environ 1.200 agences, opérateurs et autres organismes d'administration centrale, c’est énorme. Coût total: 81 milliards d'euros. Mais soyons sérieux, ce n’est pas avec ça qu'on va dresser les comptes publics.

Pourquoi?

France Travail, France Compétences, et les Universités: c’est déjà 40% du budget. Ajoutez le CNRS et le CEA, deuxième et troisième plus grosses agences de l’Etat avec respectivement 25.000 et 17.000 employés, c'est 10% de plus. On ne va pas tailler dans la recherche ou les universités.

C’est de l’investissement pour l’avenir. Et nous ne sommes pas spécialement dispendieux en la matière par rapport à nos voisins européens.

Sous ces colosses de l'action publique se déploient des centaines de petits opérateurs dont les budgets ne dépassent pas quelques millions parfois. Et pas mal se sont fait tailler les subventions ces dernières années.

On pourrait quand même réduire un peu la masse salariale?

Elle ne représente que 400.000 personnes au total, soit 7% des effectifs de la fonction publique. En ne remplaçant aucun départ en retraite pendant cinq ans dans toutes ces agences, le spécialiste des comptes publics, François Ecalle, avait calculé que le nombre d’agents pourrait être réduit de 10% ce qui ferait une économie sur la masse salariale d’environ trois milliards d'euros.

En étant très ambitieux, on pourrait viser six milliards d’économies sur les autres dépenses de fonctionnement. Ce qui ferait au total moins de dix milliards d'économies. L’Etat a lui prévu trois milliards d’économies en 2025.

Or, pour simplement stabiliser la dette, c'est 100 milliards d'euros qu'il va falloir trouver dans les prochaines années.

Donc contrôler l’action des agences et des opérateurs de l’Etat oui, trois fois oui... La commission d’enquête menée en ce moment au Sénat est utile en ce sens. Mais il faut trouver bien d’autres économies. Le vrai sujet reste en France la dépense sociale. Près de 900 milliards d'euros de dépenses, dont la moitié pour les retraites.

Sauf qu’aucun politique n’a le courage de s’y atteler.

Raphaël Legendre