La TVA à 0% sur l'alimentaire de Marine Le Pen rapporterait 13 euros par an aux ménages

La candidate du RN à la présidentielle Marine Le Pen s'adresse à ses supporteurs après l'annonce des résultats du 1er tour, le 10 avril 2022 à Paris - Thomas SAMSON © 2019 AFP
La baisse de la TVA est une des mesures phares du programme de Marine Le Pen pour le pouvoir d'achat. La candidate du Rassemblement National, si elle était élue, réduirait immédiatement la TVA sur une centaine de produits de première nécessité (sel, pâtes, huile, couches-culottes...).
"J'enlève la TVA tant que l'inflation est supérieure de 1 point à la croissance, a-t-elle détaillé sur BFMTV en ciblant les produits touchés par "une inflation très importante".
Une mesure qui serait combinée avec une autre baisse de la TVA sur l'énergie cette fois que la candidate souhaite abaisser à 5,5% au lieu des 20% actuellement. Marine Le Pen souhaitant faire passer carburant, gaz, fioul et électricité dans la catégorie des produits de première nécessité.
Quel serait l'impact sur les porte-monnaies d'une supression de la TVA sur cette centaines de produits alimentaires? Dans une note, le cabinet Asterès estime qu'elle serait plus faible que les estimations faites par la candidate
Les restaurateurs ont capté la baisse
"Si le passage de la TVA de 5,5% à 0% se répercutait intégralement sur les prix, il en résulterait un gain de 133 euros pour les ménages français, soit une progression du pouvoir d’achat de 0,3%, reconnaît le cabinet d'études économiques. Cependant, des expériences historiques montrent qu’une petite part des baisses de TVA se répercute sur les prix, la plus grande part étant captée par les entreprises ou leurs salariés. À partir d’une étude sur la baisse de la TVA sur la restauration en 2009, Asterès estime que 10 % de cette baisse bénéficiera effectivement aux consommateurs, soit un gain de pouvoir d’achat de 13 euros, soit 0,03% par ménage."
Le cabinet fait ici référence à la baisse à 5,5% de la TVA sur la restauration décidée en 2009. Selon une étude de l'Institut des politiques publiques (IPP), les prix dans la restauration avaient baissé de 1,4% dans un premier temps avant d'atteindre 1,9% trente mois après la réforme et un rappel à l'ordre de l'Etat. Autrement dit plus de 90% de la baisse de la TVA n'a pas été répercuté sur les prix. Les grands gagnants de cette réforme ont été les patrons de restaurant, qui ont récupéré 56% des gains.
Un gain de 13 euros par an serait donc modeste au regard des sommes engagées. Le cabinet Asterès l'estime à 3,8 milliards d'euros. Une somme que la candidate compterait financer avec notamment une taxe de 33% sur les transactions financières.
Cette mesure surtout viserait l'ensemble des Français: les modestes qui souffrent du retour de l'inflation comme les aisés qui peuvent se permettre de payer leurs courses un peu plus cher. Et si en pourcentage le gain serait plus fort pour les plus modestes (entre +0,07% et +0,05% de pouvoir d'achat pour les trois premiers déciles), en valeur ce sont les ménages aisés qui gagneraient le plus car ce sont eux qui dépensent le plus.
Ainsi Asterès estime à 10 euros par an en moyenne le gain pour les 30% de Français les plus modestes contre 17 euros pour les plus aisés.

"Des aides directes aux ménages modestes seraient plus pertinentes qu’une baisse de TVA, estime le cabinet. Si cette somme [de 3,8 milliards d'euros) était directement versée aux 10% des ménages les plus modestes, il en résulterait pour ces ménages un gain de pouvoir d’achat de plus de 10%."
Qu'en est-il de la baisse de la TVA de 20 à 5,5% sur l'énergie? Au-delà de la faisabilité d'une telle mesure au regard des règles européennes, quel serait le gain de pouvoir d'achat?
28 euros dans le meilleur des cas
Selon une étude de Terra Nova, cette mesure qui coûterait 10 milliards d'euros aux finances publiques rapporterait déjà plus que la baisse de la TVA sur les produits de première nécessité. De l'ordre de 28 euros par mois selon le think tank.
"Les ménages français dépensent en moyenne chaque année 1.540 euros en carburants pour se déplacer (dont 246 euros de TVA) et 1.602 euros pour leur logement (dont 224 euros de TVA), rappelle Terra Nova en citant les chiffres du Ministère de la Transition écologique. Au niveau de consommation et de prix de 2019, une baisse de 20% à 5,5% de la TVA devrait donc se traduire par une économie de 341 euros par an par ménage (soit 28 euros par mois)."
Sauf que comme pour la TVA sur les produits alimentaires, ce calcul fait l'hypothèse que 100% de la baisse de la TVA serait répercutée sur les prix finaux. Si les entreprises du secteur ne répercutait que 50% de la baisse (soit déjà cinq fois plus que le secteur de la restauration en 2009), le gain serait en moyenne de 14 euros par mois. Une somme qui serait évidemment bien plus importantes pour les possesseurs de SUV et de grands logements et plus faible pour les Français modestes.
Une mesure coûteuse aux effets modestes et qui priverait l'Etat de ressources pour investir dans la transition énergétique en subventionnant qui plus des énergies fossiles.
"Le passage de la TVA de 20% à 5,5% sur l’énergie se traduirait néanmoins par une hausse de la consommation des ménages, en raison de leurs déplacements individuels ou de leur chauffage, estime l'Institut Montaigne dans son chiffrage des coûts des mesures des candidats. On peut estimer que cette mesure, isolée des autres, viendrait retarder d’environ deux ans l’atteinte des budgets carbone de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) des secteurs transport et bâtiment, tout en privant le budget de l’Etat de capacité de financement alors qu’il doit augmenter les investissements climat de 14 milliards d'euros par an pour respecter les objectifs de la SNBC."
*Edit. Dans une version initiale de l'article, la somme de 13 euros avait été indiquée par mois par erreur alors qu'il s'agit de 13 euros par an.
