"Les escrocs tirent parti des tensions sur le marché du travail": aux États-Unis, les faux recruteurs et fausses offres d'emploi explosent

Près d'un Américain sur trois affirme avoir reçu une fausse offre d'emploi par sms, selon l'entreprise américaine McAfee. - Pexels
Nicole Becker s'est fait avoir. En juillet, une prétendue marque chinoise de vêtements de sport a offert à cette femme de 37 ans vivant dans l'Oregon (nord-ouest), un poste à responsabilité dans la communication. Après un premier entretien en ligne avec quelqu'un se présentant comme responsable des ressources humaines, elle a eu un appel avec un soi-disant directeur du marketing et des ventes.
Au terme d'un processus qui a duré deux semaines et de prime abord crédible, elle signe une proposition d'embauche détaillée accompagnée d'une présentation de ses rôle, budget et objectifs pour les six premiers mois.
Mais rapidement un doute s'installe. L'entreprise lui demande d'acheter elle-même un ordinateur et un téléphone portable chez un revendeur désigné, tout en lui promettant de la rembourser sur sa première paye... Mais comme nombre d'Américains récemment, elle a été victime d'une escroquerie.
"C'est là que mon coeur s'est serré et je me suis dit: 'Oh non, je me suis fait avoir par une fausse offre d'emploi'", explique à l'AFP Nicole Becker, demandant que son vrai nom ne soit pas dévoilé.
"C'est effrayant parce que je me considère comme une personne intelligente et informée, surtout en ce qui concerne l'IA et les escroqueries en général. Si je peux me faire escroquer, ça peut arriver à tout le monde", ajoute-t-elle.
De fausses offres d'emploi à des faux recruteurs, les escroqueries en ligne explosent aux États-Unis. En cause: le recul du marché du travail ainsi que l'essor de l'intelligence artificielle (IA) qui rend ces stratagèmes toujours plus sophistiqués selon les experts.
1.471 dollars par escroquerie en moyenne
Les escroqueries à l'emploi ont bondi de plus de 1.000% entre mai et juillet, période où les jeunes diplômés entrent en général sur le marché du travail, selon l'entreprise américaine McAfee.
Près d'un Américain sur trois affirme avoir reçu une fausse offre d'emploi par sms, soulignant que "ces escroqueries ont dépassé le cadre des e-mails pour s'immiscer dans nos conversations quotidiennes", selon McAfee.
D'après la même source, les victimes font face à des pertes considérables: en moyenne 1.471 dollars par escroquerie pour un total de 12 milliards de dollars l'année dernière, soit une augmentation de 21% par rapport à l'année précédente.
"Les escrocs tirent parti des tensions sur le marché du travail, où davantage de personnes se disputent un nombre réduit d'offres, et parallèlement l'IA générative permet à des personnes malintentionnées de créer plus facilement de faux messages, de faux profils de recruteurs et même de faux entretiens", explique à l'AFP Lisa Plaggemier, directrice de l'organisation National Cybersecurity Alliance.
Faux chèques
L'agence américaine de protection des consommateurs (FTC) a récemment mis en garde contre les "escroqueries aux faux chèques", quand de faux employeurs envoient des chèques falsifiés pour que les victimes achètent du matériel auprès de vendeurs spécifiques. Mais les employeurs peuvent aussi être victimes de ces fraudes.
En juillet, la police fédérale américaine (FBI) a mis en garde contre des escrocs nord-coréens se faisant passer pour des Américains afin "d'être embauchés et avoir accès au réseau d'entreprises américaines". Une enquête récente menée par la société américaine Gartner auprès de 3.000 candidats a montré que 6% d'entre eux se sont déjà fait passer pour quelqu'un d'autre ou ont demandé à un tiers de se faire passer pour eux.
Elle estime que d'ici 2028, un profil de candidat sur quatre dans le monde sera un faux. En conséquence, plusieurs entreprises qui avaient initialement adopté des outils d'IA pour le recrutement reviennent maintenant aux entretiens en présentiel.
"Cela devient plus dur pour les employeurs d'évaluer les véritables compétences des candidats et dans certains cas, leurs identités", explique Jamie Kohn, de la société Gartner.
Selon elle, "les employeurs sont de plus en plus inquiets par ces fraudes" qui créent des "risques de cybersécurité pouvant être bien plus sérieux qu'une erreur de recrutement."