Giorgia Meloni VRP crédible de l'Europe face à Donald Trump? Comment l'Italie a redressé ses comptes publics de manière spectaculaire

Giorgia Meloni se pose en interlocutrice privilégiée de Donald Trump. Première dirigeante européenne à se rendre à la Maison Blanche depuis le début de la guerre commerciale, la présidente du Conseil italien a plaidé jeudi au nom de l'UE pour un accord commercial avec les États-Unis.
Face à l'ex-homme d'affaires milliardaire avec qui elle partage un large socle idéologique et entretient de bonnes relations, elle n'a pas hésité à enfiler le costume de VRP de l'Italie, ventant les résultats obtenus en matière migratoire et économique depuis son arrivée à la tête du pays.
"L'Italie est aujourd'hui dans une très bonne situation malgré les difficultés. Nous sommes un pays stable", a-t-elle déclaré.
"Stable", comme la perspective adossée à la note de la dette publique italienne relevée la semaine dernière de BBB à BBB+ par l'agence de notation S&P. "Le relèvement reflète l'amélioration des amortisseurs économiques, externes et monétaires de l'Italie dans un contexte de vents contraires mondiaux croissants, ainsi que les progrès graduels réalisés dans la stabilisation des finances publiques depuis le début de la pandémie", a déclaré S&P dans son évaluation.
Ces derniers mois, l'Italie a en effet réussi à assainir ses finances publiques de façon spectaculaire. En témoigne son déficit passé de 7,2% du PIB en 2023 à 3,4% en 2024. Un niveau encore plus faible que celui sur lequel tablait le gouvernement (3,8%). Au quatrième trimestre, le pays enregistrait même un excédent (+0,4%) pour la première fois depuis 2019.
Des entreprises exportatrices en grande forme
Cette embellie intervient à point nommé alors que Rome, visé par une procédure européenne pour déficit public excessif (comme la France), est sous forte pression pour redresser ses comptes et réduire sa dette publique qui frôle les 3.000 milliards d'euros (135,3% du PIB).
Plusieurs mesures ont été mises en place ces deux dernières années pour permettre à la péninsule de revenir sur la voie du sérieux budgétaire: suppression du "Superbonus" (un avantage fiscal mis en place par le gouvernement précédent pour inciter à la rénovation des bâtiments et à l'amélioration de l'efficacité énergétique), baisse des coûts liés à l'énergie via un plan de diversification des sources d'approvisionnement pour réduire la dépendance au gaz russe, doublement de l'impôt sur les revenus engendrés à l'étranger par les super-riches...
Au final, les dépenses publiques italiennes ont baissé de 3,6% en 2024 tandis que les recettes fiscales ont progressé de 3,7% notamment grâce à une consommation dynamique et aux résultats des entreprises exportatrices en très grande forme. Grâce à ses nombreuses PME et ETI industrielles ainsi qu'à leur produits de qualité mais compétitifs en termes de prix, l'Italie est en effet devenue le 4e exportateur mondial l'an passé.
"Cette puissance industrielle confère à l'Italie une capacité à exporter hors norme", expliquait fin 2024 Anthony Morlet-Lavidalie, économiste chez Rexecode.
L'Italie affaiblie par la guerre commerciale?
La guerre commerciale pourrait-elle enrayer la dynamique italienne? Probablement. L'Italie réalise aujourd'hui plus de 10% de ses exportations vers les États-Unis, ce qui en fait le troisième partenaire commercial de la péninsule. Pour l'heure, "la décision du gouvernement américain de suspendre les droits de douane de 20% annoncés contre les produits européens pour trois mois et de se limiter à 10% signifie que le choc pour l'économie italienne sera gérable, de notre point de vue", juge S&P.
L'agence de notation prévient néanmoins qu'elle pourrait être amenée à abaisser de nouveau la note italienne si "le choc commercial provoqué par les droits de douane américains plombait significativement la confiance des consommateurs et des entreprises ainsi que la balance de paiement de l'Italie". D'autant que si l'Italie est parvenue à réduire son déficit, sa dette reste encore très élevée et celle-ci ne devrait pas se stabiliser avant 2028.
Face aux incertitudes liées à la guerre commerciale, Rome a d'ailleurs revu à la baisse sa prévision de croissance pour 2025, à 0,6% contre 1,2% auparavant, laissant présager une activité au ralenti. Le gouvernement prévoit également 0,8% pour 2026, contre 1,1% espérés jusqu'ici. Les prévisions de déficit ont en revanche été maintenues, à 3,3% du PIB en 2025 et 2,8% en 2026 et 2027. Soit sous le fameux seuil de 3% fixé par les règles européennes.