Droits de douane: le Japon salue des "discussions franches et constructives" avec les États-Unis

Le négociateur japonais chargé de trouver une issue sur les droits de douane américains a affirmé avoir eu jeudi "des discussions franches et constructives" avec l'administration Trump à Washington, à l'heure où Tokyo prépare d'éventuelles concessions et évoque l'arme des bons du Trésor.
"Nous avons pu progresser sur des discussions concrètes concernant le développement des échanges commerciaux bilatéraux, les mesures non tarifaires, la coopération économique et sécuritaire", a indiqué à la presse le ministre de la Revitalisation économique Ryosei Akazawa.
Ce dernier s'est entretenu avec le secrétaire américain au Trésor Scott Bessent, qu'il avait déjà rencontré mi-avril en compagnie du président américain Donald Trump.
Proche allié de Washington et première source d'investissements étrangers aux Etats-Unis, le Japon est visé depuis début avril par des surtaxes douanières américaines de 25% sur l'automobile et l'acier. Or, l'automobile représente presque 30% des exportations japonaises à destination des États-Unis. Le Japon est également menacé d'une surtaxe "réciproque" de 24% sur toutes ses exportations, en pause jusqu'à début juillet. Une taxe-plancher de 10% s'applique déjà.
"Accord d'ensemble"
Un prochain cycle de "négociations ministérielles intensives" est prévu à partir de mi-mai, a précisé Ryosei Akazawa, qui espère conclure en juin un "accord d'ensemble" couvrant tous les sujets. "Nous n'avons pas encore atteint le stade où nous pouvons trouver des terrains d'entente", a tempéré vendredi le Premier ministre, Shigeru Ishiba, tout en saluant des discussions "positives et constructives".
Pour échapper aux droits de douane prohibitifs, le Japon pourrait proposer d'acheter davantage de maïs et de soja américains, d'assouplir les règles sur les voitures américaines importées, et de poursuivre les discussions sur le développement de gisements de gaz naturel liquéfié (GNL) en Alaska. Et ce afin de "rééquilibrer" son colossal excédent commercial de 68,5 milliards de dollars avec les Etats-Unis.
Selon les médias japonais, les futures discussions pourraient se concentrer sur l'automobile et les produits agricoles. Mais "nous n'avons aucune intention de négocier d'une manière qui porterait atteinte à l'intérêt national", a insisté Ryosei Akazawa. Il a par ailleurs assuré que la question des relations commerciales Japon-Chine n'avait pas été abordée jeudi. Pékin a récemment mis en garde les pays jouant "l'apaisement" avec les Etats-Unis contre tout accord commercial qui compromettrait ses propres intérêts.
"Nous entretenons des relations commerciales très solides avec la Chine" tout comme avec les États-Unis, "et nous continuerons de suivre avec grand intérêt l'évolution des relations sino-américaines", a simplement commenté Ryosei Akazawa. Par ailleurs, a-t-il affirmé, les négociations n'ont pas non plus touché aux questions de sécurité, alors que Donald Trump pointe souvent le coût de l'appui militaire des Etats-Unis au Japon, ni à la valeur de la devise nippone.
L'administration Trump accuse volontiers Tokyo de tirer indûment avantage d'un yen affaibli pour doper ses exportations. Après des prévisions économiques moroses de la Banque du Japon, la devise japonaise a fortement rechuté ces dernières heures, approchant 146 yens pour un dollar --mais restant bien plus forte qu'en janvier.
Bons du Trésor
Faute d'avancées, Tokyo pourrait durcir le ton: le ministre des Finances, Katsunobu Kato, a déclaré vendredi à la chaîne TV Tokyo que les avoirs du Japon en bons du Trésor américains - dont le montant n'est pas rendu public - pourraient constituer "un atout". "Il est naturel de discuter des atouts que nous avons en main. Que nous y recourrions ou non" en en vendant une partie pour faire pression sur Washington, "c'est une autre question", a-t-il indiqué.
"Nous ne conservons pas (ces avoirs) pour soutenir les États-Unis. Nous interviendrons si notre pays est en difficulté", a-t-il averti.
Selon des calculs de l'agence Bloomberg, environ la moitié des 943 milliards de dollars de devises étrangères que revendiquaient le Japon fin mars pourraient être constitués de dette américaine. Un volume si important de bons du Trésor que toute cession potentielle devrait être graduelle pour ne pas menacer la valeur des titres conservés.
Des ventes massives d'investisseurs inquiets avait d'ailleurs provoqué en avril une débâcle du marché obligataire américain, avec une envolée des taux qui avait contraint l'administration Trump à faire volte-face et à mettre sur pause ses surtaxes "réciproques". Autre grand créancier des Etats-Unis, Pékin dispose lui aussi d'importantes réserves en dollars susceptibles de constituer un levier dans de futurs pourparlers commerciaux.