"Homme de dialogue", "première victoire": les syndicats réagissent à la démission de Jean-Paul Delevoye

Jean-Paul Delevoye - DOMINIQUE FAGET / AFP
Affaibli après une semaine de révélations sur ses activités et mandats non déclarés, le haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, a été contraint de démissionner du gouvernement ce lundi. Invités à réagir sur ce retrait, plusieurs leaders syndicaux ont réaffirmé leur désaccord avec le projet porté par l’exécutif tout en saluant les qualités de "dialogue" de celui qui a mené les discussions avec les partenaires sociaux depuis deux ans.
"C’est un choix qui lui appartient […]. C’est vrai que cette démission tombe à un mauvais moment", a déclaré sur notre antenne Laurent Escure, secrétaire général de l’Unsa. Surtout, il a dit "espérer que le 'Monsieur Retraites', ou 'Madame Retraites', qui pourra être nommé(e) par la suite gardera à la fois une fibre de respect pour les partenaires sociaux et une grande connaissance technique du dossier".
Car si les syndicats savent ce qu’ils perdent, certains se méfient de ce qu’ils vont gagner. "On aura besoin d’un interlocuteur qui soit à la fois crédible, respectueux des organisations syndicales et fin connaisseur du dossier des retraites", a martelé Laurent Escure.
"Homme de dialogue"
Même réaction du côté d’Yves Verrier, secrétaire général de Force ouvrière. Lui craint que "personne ne connaisse vraiment bien le dossier" pour pouvoir remplacer Jean-Paul Delevoye. S’il a rappelé être "en profond désaccord" avec lui sur le projet de réforme, il a reconnu que l’ancien haut-commissaire était un "homme de dialogue" qui "portait sans aucun doute avec beaucoup de conviction ce projet" bien qu’il s’agisse de "la pire idée que le gouvernement ait eue".
"C’est difficile ce qui arrive à Jean-Paul Delevoye, la personne elle-même, qui est, je pense, quelqu’un d’engagé", a ajouté Yves Verrier, décrivant par ailleurs un homme "républicain" et "démocrate". Pour autant, "ce n’est pas une question de personne. Mon souci aujourd’hui, c’est bien les retraites", a-t-il indiqué.
Avant l'annonce de la démission de Jean-Paul Delevoye, le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger avait lui aussi loué la "loyauté" du haut-commissaire. Tout en se disant "ébahi" et "abasourdi" par les révélations sur les mandats non déclarés du "Monsieur Retraites" du gouvernement, Laurent Berger a souligné que "la concertation avec lui a été loyale, il y a eu une confrontation d'idées intelligente, pour essayer de faire avancer les choses". "Il ne nous a jamais pris en traîtres", a-t-il dit sur France Info.
La polémique sur les mandats non déclarés nuit "évidemment" à sa "crédibilité", mais "sur le fond, [...] il connaît très bien le sujet, il est celui qui connaît le mieux les positions des différents interlocuteurs", a jugé Laurent Berger.
"Qu'il parte avec sa réforme"
D’autres organisations se montrent beaucoup plus critiques envers Jean-Paul Delevoye et espère que cet épisode aidera à l’abandon du projet de réforme:
"Il y avait un conflit d’intérêt qui était évident, il n’avait pas d’autre choix", a estimé Benjamin Amar, porte-parole de la CGT Val-de-Marne. "C’est une mauvaise nouvelle pour le gouvernement. Monsieur Delevoye était à la tête de gondole de ce projet. Le gouvernement est aujourd’hui complètement fragilisé", a-t-il encore déclaré.
"Qu’il parte, c’est bien. Et qu’il parte avec sa réforme. Puisque de toute manière, que ce soit avec lui ou un autre, on ne discutera jamais de l’application de cette réforme de retraites par points", a réagi de son côté Céline Verzeletti, secrétaire confédérale de la CGT.
Secrétaire fédéral de Sud Rail, Fabien Villedieu voit même en la démission de Jean-Paul Delevoye "une première victoire" syndicale.
"Aujourd’hui l’architecte de la réforme de retraites à points vient de démissionner. Ça remet, de fait, cause le projet même de la retraite à points. Il faut revenir à la raison", a-t-il dit.