Transports publics: l’abonnement allemand à 49 euros par mois est-il transposable en France?

Depuis lundi, les Allemands peuvent, pour 49 euros par mois, utiliser sans limite tous les métros, trams, bus urbains et, surtout, trains régionaux de tout le pays. Avec ce "Deutschlandticket" très avantageux, le gouvernement allemand souhaite réduire les déplacements en voiture, moyennant un coût estimé à un montant minimum de 3 milliards d’euros, partagé à parts égales entre l’Etat fédéral et les Länder –les toutes puissantes régions allemandes.
Le réseau ferré allemand est deux fois plus dense qu'en France
Pourrait-on faire pareil en France? Une telle décision –éminemment politique- se heurterait à plusieurs obstacles. D’abord nos infrastructures de transports publics ne pourraient probablement pas supporter l’arrivée soudaine d’un nombre très important de nouveaux passagers. Interrogé sur le sujet, le président de la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (FNAUT) a un avis bien tranché sur le sujet.
"Le système français de transport public urbain et régional serait malheureusement incapable d’absorber un afflux de passagers tel que celui constaté en Allemagne" estime Bruno Gazeau.
De fait, autant avec son TGV, la France a pris de l’avance sur l’Allemagne avec un réseau permettant de se déplacer très vite d’une grande ville à l’autre, autant pour les transports collectifs urbains et régionaux, elle est à la traîne.
Pour s’en convaincre, il suffit de comparer le nombre de kilomètres de voies ferrés exploités: 40.826 kilomètres, outre-Rhin contre 27.483 kilomètres dans l’Hexagone. Si l’on prend en compte la différence de superficie, cela signifie que les Allemands bénéficient d’un réseau ferré deux fois plus important que les Français.
En France, les employeurs paient la plus grosse partie des transports publics de proximité
Deuxième obstacle: mettre tout le monde d’accord. Rappelons qu’en France, chaque région gère et finance son réseau ferroviaire sans réelle coordination avec ses voisines. Les règles tarifaires diffèrent d’une région à l’autre. Quant aux réseaux urbains de métros, tram ou bus, ils sont gérés par les agglomérations.
Enfin, il y a ce principe très français consistant à faire payer aux employeurs la plus grosse partie du coût des transports publics de proximité. En soi, cela n’a rien d’aberrant puisqu’ils sont les premiers à en profiter, leurs salariés pouvant accéder plus facilement à leur lieu de travail. Mais cela vient compliquer l’équation financière.
Les Franciliens paient leur passe Navigo 84 euros pour un coût réel de 254 euros
L’exemple francilien est de ce point de vue très parlant. L’abonnement mensuel classique –le passe Navigo- y est aujourd’hui vendu un peu plus de 84 euros. Mais si les usagers devaient payer ce que coûte vraiment le fonctionnement des RER, trains Transilien, trams, métro et bus, ils devraient, selon Ile de France Mobilités, payer quasiment 254 euros.
Quel serait alors le prix à payer d’une transformation de cet abonnement en ticket à 49 euros valable dans toute la France sachant qu’aujourd’hui le pass navigo est utilisé tous les mois par plus de 2 millions d’usagers dont une partie n’en paient que la moitié, grâce au remboursement de leur employeur. Qui devrait payer ce nouveau surcoût? Les employeurs ou le contribuable? On le voit, sur le papier, l’idée d’une transposition en France du "Deutschlandticket" séduisant mais quand on commence à en mesurer les conséquences, cela devient très compliqué.
