Trains autonomes: une nouvelle étape vient d'être franchie

La locomotive de manœuvre diesel-hydraulique appartenant à Lineas utilisée pour la démonstration - Alstom
Faire rouler des trains de manière autonome, sans aucune intervention humaine, n'est plus de la science-fiction. Réalité dans les transports urbains (bientôt 3 lignes de métro à Paris 100% automatisées), dans le ferroviaire où les contraintes sont bien plus nombreuses, les choses avancent.
Le français Alstom qui travaille sur la question depuis de nombreuses années annonce ainsi avoir "fait la démonstration du plus haut niveau d'automatisation sur une locomotive de manœuvre (qui est utilisée pour composer les rames de fret avant leur départ, NDLR) près de Breda, aux Pays-Bas". C'est une première mondiale.
Cette démonstration a été réalisée dans le cadre d'un partenariat avec le gestionnaire d'infrastructure néerlandais ProRail et l'opérateur ferroviaire belge Lineas.
L'industriel affirme ainsi que le démarrage, la conduite et l’arrêt ont été entièrement automatisés, et que la gestion d'obstacles ou d'événements imprévus s'est faite sans l'intervention directe du personnel du train pendant les activités de manœuvre.

"La locomotive, fonctionnant de manière autonome, a été confrontée à divers obstacles (une personne, une voiture, un wagon et un aiguillage mal positionné) et a réagi de manière entièrement autonome et sans l'intervention de personnel actif à bord" explique le fabricant.
Nouvelles perspectives pour le fret
Pour parvenir à ce résultat, l'entreprise a développé un système intelligent de détection et de reconnaissance des obstacles qui s'interface avec le système d'exploitation automatique des trains d'Alstom, permettant ainsi au train de réagir de manière autonome à divers obstacles.
"En intégrant une détection avancée des obstacles dans nos systèmes de conduite autonome, nous avons montré qu'il était possible de faire en sorte que les trains 'voient' devant eux et fassent face à l'imprévu en toute sécurité. Les résultats positifs prouvent qu'Alstom possède la technologie nécessaire pour soutenir les opérateurs avec des technologies de conduite autonome qui, à terme, amélioreront les performances opérationnelles des lignes de fret' commente Stéphane Féray-Beaumont, vice-président de l'innovation et de la mobilité intelligente chez Alstom.
De quoi ouvrir des perspectives afin d'augmenter la capacité des opérations de fret, dans un contexte de demande croissante de services dans ce secteur...

Côté transports de passagers, l'objectif de l'automatisation est de faire circuler plus de trains régionaux sur les lignes avec des vitesses optimisées et accessoirement faire baisser les coûts d'exploitation. La R&D avance également.
Trains autonomes pour les passagers: d'abord les lignes régionales
Outre-Rhin, Alstom travaille avec la région de Basse-Saxe et diverses institutions comme le Centre allemand pour l'aéronautique et l'astronautique et l’Université Technique de Berlin pour développer un train de ce type.
En juin dernier, l'industriel annonçait que "la conduite automatisée sera testée sur des lignes ferroviaires du nord de l'Allemagne" sans donner de calendrier précis.
"Pour ces essais, de nouveaux systèmes de conduite autonome seront développés dans une première phase. Il s'agit notamment de la reconnaissance des signaux latéraux, qui doit permettre de reconnaître et d'interpréter les signaux de circulation ferroviaire installés le long des voies. En outre, le train devra être capable de détecter les obstacles présents sur la voie" explique Alstom.
L'industriel précise qu"'en cas de dysfonctionnement, le train sera commandé à distance ou piloté par l'accompagnateur du train".
D'ailleurs, à terme, un conducteur devrait rester à bord de ces trains autonomes pour des questions évidentes de sécurité.
La SNCF vise des trains autonomes voyageurs en 2023
"Dans une deuxième phase, la conduite automatisée se déroulera dans des conditions réelles au sein d’un laboratoire grandeur nature. Les nouveaux systèmes seront installés dans deux rames de l’opérateur LNVG pré-équipées du système ETCS (système européen de contrôle des trains) et testées en exploitation. Les résultats du développement et de l'exploitation permettront de préparer l'homologation ultérieure de trains entièrement autonomes et de poursuivre l'automatisation du transport régional.
Rappelons qu'en France, la SNCF associée avec Alstom, Bosch, Spirops, Thales et l’Institut de Recherche Technologique Railenium a fait circuler une rame TER prototype d'essai autonome en 2021 sur la voie située entre Aulnoye et Busigny et entre Busigny et Calais.
Les tests se font en plusieurs étapes. "La conduite semi-autonome permet l’automatisation de l’accélération et du freinage du train, supervisée par un conducteur. Ces essais constituent une étape clé vers l’objectif final fixé par le consortium: maîtriser l’autonomie complète en 2023", expliquait-on il y a un an. Ces tests grandeur nature se sont poursuivis cette année avec un objectif toujours maintenu au 2e semestre 2023.
Dans ce projet, la question centrale est évidemment la sécurité. Ces essais doivent donc étayer " la démonstration de sécurité nécessaire à la future autorisation de circulation du matériel roulant". Outre la sécurité ferroviaire, le point sensible est la sécurité informatique, le train autonome étant ultra-connecté afin de fonctionner. Ce qui implique des risques de piratage. Un point qui a été pris en compte dès le début du projet assure la SNCF.