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Métros, bus, RER: la qualité de service peut-elle perdurer après les JO?

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Les transports parisiens ont connu une nette amélioration pendant les Jeux olympiques mais qu'en sera-t-il en septembre et ensuite?

"Un moment de grâce". Julien est un habitué du métro parisien qu'il prend tous les jours, il en connaît tous les défauts et les habituels dysfonctionnements. Mais pendant les Jeux olympiques de Paris, la surprise a été totale avec des trains plus fréquents, plus nombreux, plus propres, sans cohue, sans pannes, des agents partout.

Alors qu'il y encore quelques mois, le cauchemar était total sur certaines lignes, provoquant d'ailleurs la colère de la région face à la RATP, pendant cette parenthèse enchantée, tout a roulé que ce soit dans le métro, le RER ou les bus, sans le moindre accro grâce à d'importants moyens déployés par les opérateurs.

Sécu, transports, propreté... ça va rester après les JO ? - 12/08
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Même constat en interne. Un conducteur de train à la SNCF le confirme: "je dois bien reconnaître que j’étais très sceptique à l’approche des Jeux Olympiques. Je dois bien reconnaître que je me trompais. La mobilisation de centaines de collègues et de renforts a tout simplement été exceptionnelle. Tout s’est extrêmement bien déroulé, les petits tracas et incidents du quotidien ont vite été oubliés. En sept ans de conduite, je crois que je n’avais jamais vu un RER D aussi bien rodé".

Divine surprise

Aujourd'hui, tous les Parisiens ont la même question en tête: cette divine surprise se maintiendra-t-elle en septembre et ensuite, une fois que les Jeux paralympiques seront achevés?

Chez Ile-de-France Mobilités (IDFM), l'autorité organisatrice des transports publics franciliens, on veut y croire. On se félicite du succès de l'effort collectif pendant les JO et on affiche clairement l'objectif de maintenir le niveau de qualité de service observé.

Avec un argument de poids: les quelque 250 recrutements réalisés avant les JO à la RATP (conducteurs, agents de sécurité...) sont là pour durer. En tout, 480 conducteurs de métro ont été recrutés et formés depuis janvier 2023, avance la RATP. La SNCF estime de son côté que ses recrutements ont bondi de 50% entre 2022 et 2023.

Ainsi, les objectifs de production qui n'étaient pas tenus par la RATP avant les Jeux seront désormais progressivement atteint, veux-t-on croire. Selon nos informations, ces objectifs pourraient même être rehaussés.

"L’accélération des recrutements et des formations des conducteurs avant les Jeux mettra fin à la crise de recrutements de conducteurs qui avait pénalisé la réalisation du service", a assuré la région Ile-de-France, lors d'une conférence de presse sur le bilan Transports des Jeux.

IDFM promet également une subvention de 30 millions d'euros aux opérateurs de bus pour les aider à maintenir leur offre de manière pérenne.

Fin de la pénurie de conducteurs?

L'Autorité mise également sur la conservation de l’algorithme de l’application Transport Public Paris 2024 pour mieux répartir les voyageurs sur différentes lignes en temps réel.

La meilleure coordination entre les opérateurs observée pendant l'événement devrait également devenir une règle à l'avenir, de quoi améliorer la gestion des flux de passagers en fonction du contexte (panne, événement sportif...)

Enfin, en matière de sécurité, "le réseau va retrouver le niveau des 1.350 policiers nationaux de 2011 (200 policiers qui resteront en héritage JO) et 100 agents supplémentaires de la Brigade Régionale de Transports seront pérennisés", promet la région. De quoi améliorer la gestion quotidienne du fléau des bagages abandonnés.

Pour autant, de nombreux doutes subsistent. D'abord, les travaux sur le réseau qui ont été stoppés pendant les Jeux vont reprendre, avec son cortège de conséquences sur l'offre de trains.

Ensuite, entre la fin des JO et le début des Paralympiques, l'offre devrait sensiblement baisser, période estivale oblige, mais même plus que d'habitude, alertent des élus parisiens d'opposition.

"Très utopique"

"Certaines lignes auront une offre de transport encore plus allégée que d’habitude. Seulement 60% du service estival habituel sera en place sur les RER C, 84% sur le RER D, 83% sur le RER E. C’est ce qui a été voté en termes de fréquence au sein du conseil d’administration d’Île-de-France Mobilités", assure Céline Malaisé, présidente de la Gauche communiste, écologiste et citoyenne au conseil régional d’Île-de-France, citée par Reporterre.

"La fête est finie", assène-t-elle. Cette baisse de l'offre s'explique en partie par les congés que prennent les conducteurs qui ont été mobilisés pendant les Jeux.

La période de septembre sera délicate avec, à la fois, la rentrée scolaire et l'organisation des Jeux paralympiques. Malgré une offre qui devrait être similaire à celle observée pendant les JO, ça risque de coincer: "une épreuve", reconnaît le conducteur de RER. Près de 9 millions de voyageurs sont attendus contre environ 6 millions habituellement...

Ensuite, les centaines d'agents en renfort, déployés sur le terrain pour parer aux avaries ou pour aiguiller les passagers ne seront plus là. Les équipes de maintenance "volantes", les conducteurs en réserve non plus...

"Il serait très utopique de penser que l’on puisse maintenir un tel niveau de présence d’agents sur le terrain quand on pense à toutes les fonctions administratives qui ont littéralement été mises en pause pour que tous les agents quittent les bureaux et viennent en renfort en gare", estime ainsi l'agent de la SNCF.

Le retour au quotidien risque donc d'être un peu douloureux pour les Franciliens. Pour autant, de nombreux gains, notamment humains, et retours d'expérience devraient permettre aux transports publics de sortir renforcés de cette période dorée.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business