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La navette de la SNCF qui roule sur les routes comme les rails, bientôt opérationnelle en Bourgogne

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Flexy, ce drôle de véhicule développé avec Michelin, va être testé puis expérimenté commercialement entre Autun et Etang-sur-Arroux en Bourgogne-Franche-Comté. L'idée est d'aller chercher les voyageurs dans des zones rurales privées de gare et de rouler sur les petites voies désaffectées du réseau.

Flexy bientôt sur les rails. Ou sur les routes, c'est selon. Grâce à l'obtention d'un nouveau financement (15 millions d'euros dans le cadre de l'Appel à Manifestation d'Intérêt Corifer consacré à l'innovation ferroviaire), cette petite navette à batterie capable de rouler sur les deux types de voies franchit une nouvelle étape vers une potentielle première exploitation grandeur nature.

Après de premiers tests en interne par la SNCF depuis l'an dernier en Bretagne, Flexy va être testée dans les prochains mois sur une ligne désaffectée, entre Autun et Etang-sur-Arroux, dans le département de Saône-et-Loire, en région Bourgogne-Franche-Comté, en vue d'une expérimentation en exploitation commerciale en 2025 ou 2026 selon Les Echos.

L'objectif est de proposer 8 à 10 allers-retours par jour sur cette ancienne ligne bourguignonne (environ 17 kilomètres) de la SNCF qui a été désaffectée en 2020.

Abandonner la voiture dans les zones où le train a disparu

Conçue par le français Milla et l’institut de recherche Railenium, Flexy peut embarquer jusqu'à 14 personnes et circuler sur une distance de 10 à 30 kilomètres à une vitesse d’au moins 70 km/h sur rail et 80 km/h sur route (dans le respect bien sûr des limitations de vitesse en vigueur).

Car c'est bien l'enjeu de ce type de projet. Souvent critiqué pour avoir abandonné la desserte fine du territoire au profit du tout TGV, la SNCF planche depuis quelques années sur des solutions afin de rouvrir les petites lignes non exploitées et de faire en sorte que des habitants de zones mal desservies, à cause de fermetures de petites gares, abandonnent leurs voitures et reprennent le train.

L'une des solutions est de faire rouler des véhicules, qui ne sont pas des trains, sur les 5.700 kilomètres de petites lignes SNCF abandonnées en France, des voies souvent uniques.

Charge ensuite aux collectivités ou aux communautés de communes de manifester leur intérêt pour ces solutions.

Avec ses 3,5 tonnes, Flexy se range dans la catégorie des "trains très légers" et peut fonctionner de manière automatique même si pour des raisons de sécurité, il y aura toujours un "conducteur" à bord.

Flexy de la SNCF, et le dispositif qui permettra à deux navettes de se croiser
Flexy de la SNCF, et le dispositif qui permettra à deux navettes de se croiser © SNCF

Elle a la particularité de pouvoir rouler sur goudron (notamment là où de petites voies ont été recouvertes), mais aussi sur les voies ferroviaires grâce à un ingénieux système de roues hybrides (route/rail) développé par Michelin.

Flexy de la SNCF
Flexy de la SNCF © SNCF
Navette Flexy: la roue hybride route/rail développée par Michelin
Navette Flexy: la roue hybride route/rail développée par Michelin © OC/SNCF

D'autres projets aux fortunes diverses

Ce type de navette mi-ferroviaire, mi-routier est-il pertinent pour désenclaver les zones rurales?

"Les trains légers et très légers le sont plutôt, expliquait à BFM Business la Fédération Nationale des Associations d'Usagers des Transports (FNAUT). Mais dans le cas de Flexy, le champ d'application sera limité".

"Il n'y pas tellement de lignes qui vont permettre de le faire, ce sera un marché de niche. L'accessibilité aux gares risque d'être difficile puisque ces navettes ne pourront pas circuler sur le réseau classique", poursuivait la FNAUT.

Pour la SNCF au contraire, le potentiel existe. D'autant plus que l'exploitation d'un service à la Flexy réduirait de 50% les coûts par rapport à une ligne locale classique (maintenance, entretien).

L'expérimentation de Flexy entre Autun et Etang-sur-Arroux permettra de savoir si ce type de solution est pertinente et répond aux besoins. La SNCF table sur 2027 "pour le début de la commercialisation possible sur le marché national".

Il existe d'autres projets de ce type. Avec néanmoins des fortunes diverses. Exemple avec Ferromobile piloté par Arnaud Montebourg, ancien ministre du Redressement productif.

Concrètement, la Ferromobile est un véhicule de série Peugeot, électrique, qui se conduit comme une voiture classique sur la route mais circule aussi de manière autonome sur les rails. Le passager doit prendre les commandes sur la route, mais il lâche le volant lorsque l'on passe sur la voie ferrée.

La "Ferromobile" en circulation sur une voie ferrée.
La "Ferromobile" en circulation sur une voie ferrée. © Ferromobile (Sicef)

Le projet a été construit en partenariat avec Systra, ancienne filiale commune de la SNCF et de la RATP, ainsi qu'avec Stellantis et Alstom. L'entreprise a déjà obtenu en 2022 un financement de 10 millions d'euros de la part de France Relance.

C'est une solution "pour toutes les petites lignes fermées", afin de rapprocher les habitants des zones rurales des bassins d'emploi et des services, expliquait alors Arnaud Montebourg. Une expérimentation provisoire serait à l'étude dans l'Aude.

Un service public

En revanche, le projet Taxirail, un train léger autonome à hydrogène, ne verra pas le jour. "Des contraintes financières liées à l’impossibilité de faire financer des projets industriels innovants en France et des dynamiques de marché imprévisibles ont contribué à cette décision difficile", explique Régis Coat, président de Exid-Cd.

Le projet Taxirail
Le projet Taxirail © Exid-CD

Lancé en 2017 dans les Côtes d’Armor, le projet Taxirail est un train léger de 8 tonnes pouvant transporter 40 voyageurs. Il devait fonctionner de façon autonome, sans conducteur et à la demande.

Comme Flexy, il s'agissait de le faire rouler sur des lignes abandonnées ou des lignes non électrifiées. Un premier accord de financement avait pourtant été trouvé avec l'Ademe à hauteur de 13 millions d'euros. Mais il en manquait encore 13 autres.

Car si l'idée de ce type de véhicule est assez séduisante sur le papier, elle fait fuir les investisseurs compte tenu de sa rentabilité plus qu'aléatoire et d'investissements qui restent importants.

Reste que ces véhicules s'inscrivent dans une logique de service public qui n'ont pas forcément vocation à être rentables, et ce sont a priori aux régions et aux collectivités de les financer.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business