Vaccination contre la grippe: ce que permettront les futurs vaccins ARN messager

Un hiver sous haute tension? Alors qu'une reprise épidémique du Covid-19 n'est pas à exclure, l'arrivée annuelle du virus de la grippe inquiète les autorités. En début de semaine, le ministre de la Santé Olivier Véran a annoncé le début de la campagne de vaccination contre la grippe ce vendredi, soit quatre jours avant la date prévue. Une décision prise à la suite d'une note "urgente" de la Direction générale de la santé (DGS) qui s'inquiète du "risque de co-infection" des personnes fragiles.
Il faut dire que, cette année, la grippe pourrait bien se montrer imprévisible. Loin des taux de protection des vaccins contre le Covid-19, ceux contre la grippe affichent en moyenne un taux de protection autour de 60% avec des années meilleures que d'autres. Pour cette saison 2021-2022, forcément inédite compte tenu du peu de virus (hors Covid-19) qui ont circulé dans le monde, difficile de prévoir à l'avance l'efficacité de la nouvelle mouture.
Incertitudes et prédictions
Mais cela pourrait bientôt changer puisque plusieurs laboratoires avancent leurs pions grâce à la technologie ARN messager, celle utilisée par Pfizer et Moderna contre le Covid-19. Les deux groupes ont déjà annoncé le lancement de premiers essais. Sanofi, leader mondial du vaccin antigrippal, a aussi décidé de mettre de côté son travail sur un vaccin ARN messager contre le Covid-19 pour se concentrer, avec la même technologie sur la grippe. Les premières études cliniques devraient débuter l'année prochaine, indiquait récemment le laboratoire français.
Quel est l'intérêt de cette technologie? La réactivité. Car le principal problème du virus de la grippe est la rapidité de sa mutation, bien plus importante que celle du Covid-19. Les souches sont nombreuses et pour produire un vaccin, les laboratoires s'appuient sur les prévisions de l'OMS, six mois avant l'automne.
Chaque année, l'organisation mondiale de la santé évalue les souches qui circulent le plus dans l'hémisphère sud et qui ont le plus de chance de devenir dominantes dans l'hémisphère nord. A partir de ces prédictions, les vaccins sont fabriqués dans des œufs de poules, selon un processus long de plusieurs mois... sans certitude que les souches choisies seront bien celles responsables de l'épidémie à venir.
C'est pour cette raison que l'efficacité du vaccin contre la grippe varie chaque année. Pendant l'hiver 2014-2015, les vaccins ont par exemple montré très peu d'efficacité.
Des défis à relever
L'intérêt de l'ARN messager est donc de pouvoir produire un nouveau vaccin, basé sur une des nouvelles souches, très rapidement.
En réalité, ce n'est pas nouveau. En 1993, une équipe scientifique française avait mené de premières expériences mais la technologie n'avait pas encore la maturité qu'elle a obtenu ces dernières années. Moderna travaillait aussi sur la grippe avant l'arrivée du Covid-19 avec des résultats encourageants. Les revenus dégagés par le laboratoire lui permettent d'accélérer ses recherches même si de nombreux défis doivent encore être relevés, notamment les indispensables conditions de stockage à des températures très basses.
Surtout, ces vaccins prendront probablement plusieurs années avant d'être autorisés. Si tout a été accéléré par l'urgence du Covid-19, le temps long devrait redevenir la norme pour la commercialisation.
Pourtant, la grippe saisonnière touche 2 à 8 millions de personnes chaque année en France et est responsable de 10.000 à 15.000 décès dans l'hexagone et entre 290.000 et 650.000 décès dans le monde. Pour les laboratoires, c'est aussi une nouvelle manne de plusieurs milliards d'euros par an à redistribuer.