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Usine de dessalement, recharge artificielle des nappes… comment la France doit désormais s'adapter à son climat

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La France devrait notamment s'inspirer de ses voisins, et notamment de l'Espagne, confrontée aux canicules qui s'installent dans l'hexagone. Et notre pays a de nombreux retards à rattraper.

La France change de climat. Si cette période de sécheresse est inédite, elle vient surtout confirmer une série de fortes chaleurs en été. "La France est entrée dans un stade où notre climat est devenu semi-aride, un peu comme l'Espagne", juge ainsi Franck Galland, président ES2, cabinet d'ingénierie conseil en résilience urbaine sur BFM Business.

Si la France se pensait protégée des aléas climatiques, cette vague de canicule, après des hivers marqués par des épisodes désastreux comme les pluies diluviennes de l'arrière-pays niçois en 2020, oblige le pays à s'adapter pour gérer son eau.

Et justement, l'Espagne est un bon exemple en la matière. "On a beaucoup à apprendre de la manière dont ils ont su s'adapter à une contrainte climatique avec de sécheresses régulières, de plus en plus longues mais également à des phénomènes de pluviométrie particulièrement intenses où pendant deux trois jours, vous avez l'équivalent d'un an de pluie", poursuit Franck Galland.

Investir massivement

Selon lui, une des premières mesures est de limiter les fuites, de l'ordre de 20% actuellement. Pour cela, "il faut investir massivement: 2 milliards par an pour le renouvellement des canalisations", prévient-il car le réseau français représente 900.000 kilomètres de tuyaux. Non seulement, le remplacement est cher (320 euros par mètre) mais il provoque aussi des travaux réguliers et donc contestés dans les villes.

L'autre axe majeur est celui du recyclage de l'eau usée. La France ne réutilise que moins de 1% de ses "eaux grises" qui pourraient être destinées à l'agriculture. A titre de comparaison, Israël recycle près de 90% de son eau.

Mais cela implique un changement de règlementation en France pour faciliter le traitement, qui aura forcément un prix. Le recyclage de l'eau à destination de l'agriculture peut coûter 10% de plus par mètre cube.

Recharge artificielle

Autre solution, les usines de dessalement. Aucune n'existe dans l'hexagone tandis que Barcelone possède la plus grande d'Europe, construite après une redoutable canicule en 2008.

Enfin, la question des nappes phréatiques, qui peinent à se remplir doit aussi être sur la table, estime Franck Galland. "Il faut s'ouvrir l'esprit: la recharge artificielle de nappes se pratique allègrement au Moyen-Orient, il faut qu'on puisse profiter de très fortes pluviométries l'hiver pour pouvoir réinjecter dans nos nappes" explique-t-il.

En l'occurrence, les énormes orages qui tombent sur un sol très sec ne permettent pas de recharger les nappes. La question de la recharge artificielle, en captant les cours d'eau en hiver, a déjà été posée par l'Anses qui l'a jugé "envisageable sous conditions", dans un rapport de 2016. Mais la contamination, notamment aux engrais ou aux pesticides est l'un des principaux obstacles à franchir.

Thomas Leroy Journaliste BFM Business