"Un tsunami industriel et social": les salariés d'Arcelormittal sous le choc après l'annonce d'un vaste plan social

Un coup de massue. Dans une sidérurgie européenne en crise, Arcelormittal a annoncé ce mercredi 23 avril envisager quelque 600 suppressions de postes dans le nord de la France, touchant les fonctions support délocalisées de l'Europe vers l'Inde, mais aussi la production, à la grande surprise des syndicats.
"Si on veut tuer une entreprise, on ne peut pas faire mieux. On supprime des postes dans des secteurs qui sont là pour assurer la sûreté de notre site industriel. On fait quoi? On attend qu'il y ait une explosion? C'est un AZF 2 qu'on veut ici?", s'insurge auprès de BFMTV Gaëtan Lecocq, délégué syndical d'Arcelormittal à Dunkerque (Nord) qui dénonce un projet "incohérent et incompréhensible".
Selon lui, "si Arcelor tombe, c'est l'ensemble de l'industrie du Nord de la France qui va tomber". "Ça va être un tsunami industriel et social", met-il en garde.
"Demain, ce sera la production qui sera délocalisée"
Le plan de la direction reste encore flou à ce stade: "Il nous ont présenté des chiffres assez globaux, des postes qui vont être supprimés et en partie délocalisés. Pour l'instant, il n'y a pas de détail particulier sur quelle fonction va aller à quel endroit", déplore Pierre Damiani, secrétaire CSE central d'entreprise CFE-CGC.
Même constat chez le secrétaire du comité d'entreprise européen Jean-Luc Ruffin (CGT) qui craint pour la suite: "On commence par délocaliser les fonctions de support et demain, ce sera la production qui sera délocalisée", s'est-il inquiété.
Le projet d'Arcelormittal concerne les 7 sites du groupe dans le Nord: Dunkerque, Florange, Basse-Indre, Mardyck, Mouzon, Desvres et Montataire. Ces sept usines emploient au total quelque 7.100 salariés.
Cette annonce intervient dans un contexte déjà morose alors que les surcapacités chinoises à bas coûts accaparent le marché européen. Fin mars, la Commission européenne a d'ailleurs présenté un "plan d’action" pour renforcer la compétitivté et la décarbonation de l'industrie sidérurgique et métallurgique. "On attend de l'Europe que le fameux 'plan acier' se mettent en place rapidement", a réclamé Pierre Damiani.
Quid des investissements pour la décarbonation?
La direction d'Arcelormittal a indiqué que ces annonces ne devraient pas remettre en cause les projets d'investissement massif du groupe dans la décarbonation du site de Dunkerque.
De son côté, le ministre de l'Industrie, Marc Ferracci a rappelé que l'État a promis une aide de 850 millions d'euros pour son projet d'investissement de 1,8 milliard, à condition que celui-ci voie réellement le jour. "Nous travaillons étroitement avec la direction d'Arcelor à ce que ces projets se concrétisent dans les prochains mois", a ajouté le ministre.
Mais des responsables politiques, à gauche comme à droite, ont dénoncé l'attitude et l'ambigüité du groupe. "Il est temps que le groupe nous dise quand ces investissements se feront. ils sont la seule garantie que l'acier continuera à être produit chez nous" a ainsi déclaré Xavier Bertrand, président LR de la région Hauts de France sur X. L'élu a également exigé "des engagements sur l'avenir des sites d'Arcelormittal en France et dans les Hauts-de-France et que les salariés qui vont perdre leur emploi soient vraiment respectés".
"Ou il s'engage à investir en France, à transformer ses hauts fourneaux, ou il faut nationaliser ces entreprises", a lancé pour sa part Fabien Roussel (PCF) en estimant que "la guerre de l'acier est lancée".
Pour Rémy Dick, maire LR de Florange (Moselle), ce plan social est surtout le symbole de la "mauvaise santé" de la filière sidérurgique française et européenne: "On n'a pas été au bout de la réindustrialisation. Quand on voit le problème de compétitivité de l'acier... (...) On voit bien que l'acier européen et l’acier français a un problème: c’est la question de l’évolution normative, notamment environnementale", a-t-il regretté, jugeant que le projet d'Arcelormittal "est une vraie alerte sur ce qu'il faudrait faire pour vraiment réindustrialiser".
Les salariés ne comptent pas pour autant baisser les bras: "On ne va pas se laisser crever comme ça. On est dans le Nord, on est des métallos, on ne va pas se laisser faire", a prévenu Gaétan Lecocq.