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Le masque français en crise: "aucun enseignement n'a été tiré"

Un masque fabriqué par La Coop des Masques à Graces (Côtes d'Armor), dans l'ouest de la France, le 26 janvier 2021

Un masque fabriqué par La Coop des Masques à Graces (Côtes d'Armor), dans l'ouest de la France, le 26 janvier 2021 - Fred TANNEAU © 2019 AFP

En Bretagne, la Coop des Masques ne parvient plus à écouler ses stocks. Alors qu'une filière française est censée éviter de futures pénuries, tous les acteurs se tournent finalement vers l'Asie pour se fournir.

"Ça craque, la filière est en crise." Neuf mois après son lancement, la Coop des Masques tire la langue. Son patron, l'ancien député Guy Hascoët, ne cache plus son inquiétude. L'entreprise de masques chirurgicaux et FFP2 installée dans les Côtes-d'Armor joue sa survie, faute de pouvoir écouler ses stocks. "Nous avons pour un million d'euros de masques dans notre entrepôt" explique-t-il à BFM Business. Pour renflouer la trésorerie, la coopérative doit donc sortir du volume, et rapidement.

Problème, les masques "made in France" peinent à convaincre les acheteurs. Plus chers, forcément, que les masques asiatiques ("du simple au double" indique Guy Hascoët), ils sont délaissés malgré les volontés politiques de créer une filière française pour éviter les goulots d'étranglement connus au début de la crise sanitaire.

"Quelle sera la capacité d'approvisionnement en cas de nouvelle crise?" s'interroge Guy Hascoët. "On nous a demandé d'aller vite mais on ne peut pas non plus tirer les prix vers le bas".

Et de souffler: "aucun enseignement n'a été tiré. Si cela ne change pas, dans six mois, tout est dégagé."

Surstockage

Car c'est la filière entière qui attend un sursaut. Selon le Syndicat des Fabricants Français de Masques, 97% des achats étaient orientés vers l'Asie au premier semestre 2021. "La plupart des usines sont à l'arrêt, certaines ont déjà fermé" avertit le patron de la Coop, qui pointe du doigt "un problème de consignes". En clair, les masques français doivent être une forme de devoir civique pour assurer le maintien de la filière.

Le signal d'alarme semble néanmoins avoir fonctionné. Depuis la semaine dernière, 400.000 masques ont été achetés et les commandes affluent. De quoi soulager la trésorerie en attendant des jours meilleurs.

"L'autre problème, c'est le surstockage. Beaucoup de nos partenaires ont déjà des masques pour six mois ou un an mais ont laissé entendre qu'ils reviendront vers nous au printemps."

L'hiver s'annonce donc rude et la fin progressive de la crise sanitaire ne devrait pas relancer massivement les commandes. Les fabricants français espèrent néanmoins qu'ils n'en paieront pas les conséquences.

Thomas Leroy Journaliste BFM Business