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Futur avion de combat européen: les craintes du patron de Dassault sur le projet Scaf

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Pour Eric Trappier, directeur général de Dassault Aviation, le Scaf, cet avion européen, ne pourra se faire qu'à deux conditions: qu'il soit maitre d'oeuvre et que l'Europe affiche "une vraie volonté" de souveraineté de défense.

Avec 236 Rafale vendus à l'export, le succès commercial de l'avion de combat de Dassault est indiscutable. Mais il s'agit désormais de bâtir le futur avion de combat, le Scaf un projet mené non plus seulement par la France, mais avec l'Allemagne et l'Espagne. Plus précisément, il s'agit aussi de faire collaborer Dassault et Airbus, deux mastodontes européens de l'aéronautique.

Sur BFM Business, Eric Trappier, directeur général de Dassault, s'est montré d'une prudence extrême dans cette collaboration. Sans évoquer le "plan B" dont il faisait allusion il y a un an au moment d'une forte crise avec l'avionneur européen, il rappelle que pour réussir ce projet, "les règles définies doivent être respectées". Plus clairement, le dirigeant français maintient sa volonté d'être seul maître à bord pour mettre au point le NGF (new generation fighter), l'avion qui sera connecté au Scaf. Un démonstrateur est programmé pour 2027 et le premier modèle opérationnel pour 2040.

"On est encore dans une phase amont. On défend les principes qui peuvent amener à faire un avion de combat de bon niveau. On est prêt à poursuivre, pourvu que ces principes sont respectés. Mais si on repart sur des principes 'co-co', c'est à dire un co-développement où tout le monde fait tout, ça ne peut pas marcher", prévient Eric Trappier.

Volonté d'une Europe souveraine

Pour justifier cette légitimité, Dassault Aviation prend pour exemple la réussite du Rafale et sa mise en concurrence avec les avions de combat américains parmi lesquels le F-35. Le Rafale vendu aux Emirats Arabes Unis est au standard F4, une nouvelle génération d'appareils connectés dotés d'une motorisation qui a fait ses preuves.

"Le Rafale est une illustration de la réussite française. Si on veut faire un avion européen, il faut faire mieux. On peut partager les coûts, mais il faut donner le travail à ceux qui savent faire", explique Eric Trappier. "Le risque est de faire de la duplication qui consiste à ne pas forcément mettre les meilleurs aux meilleurs endroits. Ce n'est pas comme ça qu'on fera un meilleur avion".

Le "plan B" dont parlait Eric Trappier portant sur un scénario de rupture avec l'Allemagne et l'Espagne. La France serait-elle capable de créer seule un avion du futur? Pour Eric Trappier, c'est incontestable grâce aux savoir-faire de Dassault, Safran et Thales.

Mais le dirigeant veut encore croire à la réussite d'un projet européen qui ne peut se réaliser que "si les règles édictées au départ sont suivies avec un vrai maître d'œuvre". Il enjoint de dépasser les divisions européennes issues "d'une volonté de diviser".

"On pourra avoir un avion de combat européen, ou un sous-marin européen, le jour où on partagera une vraie volonté d'avoir une Europe souveraine. La France est souveraine, elle a des armées et un modèle cohérent et elle a su faire la réussite du Rafale", déclare Eric Trappier.
Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco